(Quito) Le président de l’Équateur, Daniel Noboa, a ordonné l’extradition de tous les prisonniers étrangers incarcérés dans le pays, en proie à une crise carcérale aiguë sur fond d’emprise croissante des narcotrafiquants.

Il a ordonné à l’autorité pénitentiaire SNAI d’effectuer les procédures administratives nécessaires pour que les étrangers purgent leur peine « dans leur pays d’origine ou de nationalité », dans un décret signé lundi.

Mardi, s’exprimant auprès d’un média national, le président a affirmé que ces détenus remis à leur pays d’origine seraient « interdits d’entrer en Équateur pour toujours ».

M. Noboa a fait valoir que les prisons du pays ne disposent que de 30 200 places pour plus de 33 000 détenus. Un recensement réalisé en 2022 avait établi que plus de 10 % des personnes détenues en Équateur étaient de nationalité étrangère.

Quito a décrété l’état d’urgence le 8 janvier après que l’évasion d’un chef de gang, Adolfo Macias dit « Fito », eut provoqué une vague de violences criminelles sans précédent à travers le pays.

Les gangs liés au trafic de stupéfiants et impliquant notamment des Colombiens et des Mexicains se livrent une guerre sans merci jusque dans les prisons, où depuis le début de l’année au moins 20 personnes ont été tuées et où quelque 200 policiers et gardiens ont été pris en otages.

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Un véhicule militaire à côté d’une prison, alors que les forces armées équatoriennes pénètrent dans les prisons du pays pour tenter de rétablir l’ordre après la libération de gardiens de prison et d’autres membres du personnel qui avaient été pris en otage

Mi-janvier, M. Noboa avait annoncé l’extradition de quelque 1500 prisonniers colombiens, une mesure rejetée par Bogota qui avait prévenu que les personnes rapatriées unilatéralement seraient remises en liberté dès qu’elles auraient franchi la frontière.

Mardi, le ministre colombien de la Justice, Nestor Osuna, a déclaré que lors de récents entretiens avec le gouvernement équatorien, ils s’étaient mis d’accord sur un rapatriement « au cas par cas, étudié un par un, dans le respect des conditions du traité » signé en 1990.

« C’est une bonne nouvelle d’un bon exercice de diplomatie qui permet de résoudre un problème dans le cadre des règles en vigueur, dans un esprit sincère de collaboration entre les deux pays », a-t-il commenté.

Selon le gouvernement colombien, le processus pourrait durer jusqu’à six mois et les prisonniers concernés doivent avoir purgé 50 % de leur peine. En 2023, 10 prisonniers ont été rapatriés de l’Équateur vers la Colombie.

Dans le cadre de son plan de pacification des prisons, gangrénées par les gangs tout-puissants, le président Noboa prévoit de construire deux prisons de haute sécurité pour les détenus les plus dangereux au cours des onze prochains mois.

Le jeune président, qui a pris ses fonctions en novembre pour un court mandat allant jusqu’en 2025, a déclaré la guerre à une vingtaine de gangs liés aux cartels colombiens et mexicains à la suite de l’évasion d’un baron de la drogue.

Face à la violence de ces groupes, M. Noboa a déployé l’armée dans les rues et les prisons, ce qui a permis de procéder à près de 4500 arrestations et de saisir 40 tonnes de drogue depuis le début du mois de janvier. La riposte sanglante des gangs a fait une vingtaine de morts.