(Rio de Janeiro) L’ex-président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva et le chef de l’État sortant d’extrême droite Jair Bolsonaro, favoris de la présidentielle de dimanche au Brésil, ont échangé des propos haineux lors du dernier débat télévisé jeudi soir, se traitant mutuellement de « menteur » et de « corrompu ».   

Les premières minutes de ce débat – auquel des dizaines de millions de téléspectateurs ont assisté durant plus de trois heures sur la chaîne TV Globo – ont donné lieu à de violentes passes d’armes, à trois jours du scrutin le plus polarisé de l’histoire récente du Brésil.

Lula comme Bolsonaro sont sortis de leurs gonds et ont dû être rappelés à l’ordre à plusieurs reprises par le médiateur.  

La tension a ensuite baissé d’un cran, mais peu de propositions concrètes ont été formulées par les sept candidats présents (sur les 11 en lice), lors d’un débat jugé d’un faible niveau par les commentateurs.  

PHOTO BRUNA PRADO, ASSOCIATED PRESS

Le président brésilien sortant, Jair Bolsonaro

Dès sa première prise de parole, Jair Bolsonaro, 67 ans, a accusé Lula, 76 ans, d’avoir été le chef de file d’une bande de « voleurs », quand la gauche a dirigé le pays de 2003 à 2016, tout en le traitant de « menteur » et « traître à la patrie ».

Une allusion au scandale de corruption de Petrobras, pour lequel l’ancien syndicaliste a été incarcéré pendant 18 mois en 2018 et 2019, avant de voir ses condamnations annulées par la Cour suprême.

« C’est moche de voir un président de la République mentir sans arrêt », a rétorqué Lula, qui l’a à son tour accusé de corruption.

« Comment peux-tu te regarder dans le miroir, quand on voit ce qui s’est passé sous ton gouvernement ? », a-t-il déclaré, citant notamment des soupçons de détournements de fonds de Flavio Bolsonaro, fils aîné du président.

« Le peuple va te renvoyer chez toi le 2 octobre ! », a lancé Lula, à qui les sondages prédisent une victoire possible dès dimanche.

Neymar avec Bolsonaro

Selon la dernière enquête d’opinion publiée par l’institut Datafolha peu avant ce troisième débat télévisé, l’ex-syndicaliste conserve un avantage confortable sur Bolsonaro, avec 48 % des intentions de vote contre 34 %.

Le Parti des Travailleurs (PT) de Lula fait campagne auprès des Brésiliens pour le « vote utile » afin d’accorder leurs voix au vieux lion de la politique brésilienne dès ce premier tour, avec l’appui de vedettes de la chanson comme la chanteuse Anitta.

Mais Jair Bolsonaro a obtenu un soutien de poids jeudi : Neymar, superstar du football brésilien, qui a ouvertement déclaré sa préférence dans une vidéo publiée sur TikTok.

Interpellé sur sa politique environnementale, très critiquée par les écologistes, le président d’extrême droite a répondu : « nous n’avons pas entendu parler d’incendies de forêt en Amazonie, à part ceux qui ont lieu habituellement ».

Mais les données officielles recueillies par satellite par l’Institut national de recherche spatiale (INPE) ont montré que le Brésil avait enregistré en moins de neuf mois davantage d’incendies dans la plus grande forêt tropicale de la planète que pendant toute l’année 2021.

Fausses informations

La cellule de vérification des faits de l’AFP a relevé plusieurs fausses informations lors du débat de jeudi soir. Pour se défendre d’accusations de retards dans l’achat de vaccins contre la COVID-19 au Brésil, le président Bolsonaro a dit qu’« aucun pays au monde n’avait acheté de vaccin en 2020 », tandis que plusieurs pays avaient commencé à immuniser leur population dès la fin de cette année-là.

Lula, pour sa part, a affirmé qu’il avait été « innocenté dans 26 procès », mais ses condamnations ont été annulées pour vice de forme, sans que le fond soit analysé.

Lors des deux précédents débats télévisés, le président Bolsonaro avait essuyé une pluie de critiques après ses attaques sexistes envers l’une des journalistes l’ayant interrogé.  

Après une performance jugée décevante par les commentateurs lors du premier débat – il n’avait notamment pas su se défendre des accusations de corruption lancées par Jair Bolsonaro – Lula n’avait pas participé au deuxième débat, invoquant un emploi du temps déjà très chargé.

La campagne électorale à la radio et télévision a pris fin ce jeudi à minuit, mais les rassemblements et la distribution de tracts resteront autorisés jusqu’à samedi soir, veille du scrutin.