(Guatemala) Le président du Guatemala, Alejandro Giammattei, a annoncé mardi qu’il ne se rendrait pas au Sommet des Amériques prévu début juin aux États-Unis, après de vives critiques de Washington sur la reconduction dans ce pays de la procureure générale soupçonnée de corruption.  

« Il ne vont pas m’inviter au Sommet. De toute façon, j’ai fait savoir que je n’irai pas », a déclaré le chef de l’État. Le Sommet des Amériques des chefs de l’État et de gouvernement doit se tenir le 10 juin à Los Angeles aux États-Unis.  

« Je l’ai dit et je le répète à l’ambassadeur de cette nation (les États-Unis) que ce pays (le Guatemala) peut être de cette taille mais que tant que je serai président, ce pays sera respecté et sa souveraineté sera respectée », a déclaré le président lors d’une cérémonie à l’ambassade du Mexique au Guatemala, un petit pays d’Amérique centrale.

La reconduction lundi pour un mandat de quatre ans de Consuelo Porras au poste de procureure général a suscité de vives critiques de la part de Washington, qui avait placé la procureure générale en septembre 2021 sur la liste américaine des « acteurs corrompus ».

Dans un communiqué, le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, a accusé Mme Porras d’avoir « à plusieurs reprises, entravé et sapé des enquêtes anticorruption au Guatemala pour protéger ses alliés politiques et obtenir des faveurs politiques indues ».

Mme Porras et les membres de sa famille immédiate sont interdits d’entrée aux États-Unis et son mari a également été sanctionné.

Mardi, le Ministère public a réagi en déclarant qu’il n’accepterait pas d’« ingérence » étrangère.  

« La procureure générale et cheffe du Ministère public (MP) n’accepte aucune sorte d’ingérence ni pression et poursuivra son travail de manière objective et impartiale en veillant au strict respect de la loi », a déclaré le Ministère public sur Twitter.  

« Le Ministère public est une institution autonome qui n’est soumise à aucune entité internationale », ajoute le message auquel était jointe une copie du communiqué de M. Blinken.

L’Union européenne a également réagi à cette nomination, disant regretter la « décision » du chef de l’État qui « suscite l’inquiétude sur l’engagement des autorités guatémaltèques à combattre la corruption et sauvegarder l’indépendance du pouvoir judiciaire ».  

Dans un communiqué, l’UE rappelle que sous la « supervision de cette procureure générale, le Ministère public a lancé des actions légales contre plusieurs juges, avocats, procureurs impliqués dans des enquêtes sur des affaires de corruption à haut niveau ».  

« Cela fait partie d’un schéma plus vaste d’intimidation et de harcèlement qui a poussé plus de 20 acteurs de justice à quitter le pays », souligne l’UE.  

Ces derniers mois, le Ministère public, sous les ordres de Mme Porras, a ordonné l’arrestation d’au moins six juristes ayant travaillé dans des organes de lutte contre la mafia au Guatemala, les accusant d’irrégularités dans leur travail.   

Pour les accusés, ces arrestations sont une « vengeance » contre ceux qui ont lutté contre la corruption, une version rejetée par Mme Porras.

En 2021, le procureur Juan Francisco Sandoval, alors considéré comme un « champion de la lutte contre la corruption » par Washington, avait également été limogé.

A présent en exil aux États-Unis, M. Sandoval avait déclaré à l’AFP en mars qu’il avait été démis de ses fonctions après la publication d’informations selon lesquelles il disposait d’éléments sur « de possibles pots-de-vin » versés au président par des hommes d’affaires russes désireux de gérer un port sur la côte caraïbe.