(Tegucigalpa) Xiomara Castro a prêté serment jeudi, devenant ainsi la première présidente du Honduras, pour un mandat de quatre ans, et a promis devant une foule enthousiaste de fonder « un État socialiste et démocratique ».

La nouvelle présidente de gauche a prêté serment en présence de Luis Redondo, qu’elle a reconnu comme président du Parlement, faisant fi de la crise ouverte il y a six jours par deux factions rivales de son parti Libre et qui a donné lieu à des scènes de pugilat à la tribune de l’Assemblée.  

« L’État du Honduras a été mené à la faillite durant ces dernières douze années » de gestion par la droite, a asséné la cheffe de l’État dans son discours d’investiture devant la foule massée dans le Stade national de Tegucigalpa.  

« Je le reçois en banqueroute », s’est-elle indignée en soulignant que « le pays doit savoir ce qu’ils (ses prédécesseurs) ont fait de l’argent ». La dette publique du Honduras s’élève à 17 milliards de dollars.

La présidente a promis que jusqu’à la fin de son mandat en 2026, elle concentrera ses efforts sur « l’éducation, la santé, la sécurité et l’emploi ».

Mais la controverse au sein de son parti, où les deux groupes rivaux ont élu deux présidents de deux Parlements concurrents, fait peser l’incertitude sur sa capacité à mettre en œuvre son programme de transformation du Honduras.

Pour réformer le pays, gangréné par la corruption et l’influence des narcotrafiquants qui ont infiltré l’État jusqu’à son plus haut niveau, Mme Castro a besoin du Parlement où son parti et ses alliés n’y disposent pas de la majorité.

La crise parlementaire a éclaté quand des dissidents de Libre ont refusé d’honorer un accord entre leur parti et des alliés d’un autre parti de gauche, dont le soutien a été déterminant dans la victoire de Mme Castro lors du scrutin de novembre.

Dénouer la crise parlementaire

M. Redondo, qui a ceint la présidente de l’écharpe bleu et blanc, symbole de sa fonction, avait ouvert quelques heures avant une session de « son » Parlement, dans le bâtiment officiel, tandis que le président de l’assemblée concurrente, Jorge Calix, gardait le silence.

Dans une tentative pour dénouer la crise, la présidente désignée avait offert mercredi soir un haut poste dans son gouvernement à M. Calix, qui a bénéficié des voix de députés de l’opposition de droite pour se faire élire comme président de l’assemblée concurrente.

Le dissident a remercié sur Twitter pour « l’honneur » qui lui est fait et a promis une « réponse rapide ». Mais celle-ci se fait attendre.

La vice-présidente américaine Kamala Harris, le roi d’Espagne Felipe VI et le vice-président taïwanais William Lai, notamment, ont assisté à la cérémonie.

Mme Castro a été qualifiée de « communiste » par ses adversaires durant la campagne, mais « les États-Unis ont compris qu’elle ne représente pas une gauche radicale », estime le sociologue Eugenio Sosa, de l’Université Nationale du Honduras.

« Il y a un virage à gauche […] ils veulent maquiller ça avec l’arrivée de la vice-présidente Kamala Harris, mais en réalité ils sont très engagés avec le Venezuela », a dénoncé auprès de l’AFP David Chavez, le chef du Parti National (droite), désormais dans l’opposition.

La vice-présidente américaine Kamala Harris a encouragé la nouvelle présidente du Honduras Xiomara Castro à lutter contre la corruption, considérée comme l’une des causes de l’émigration massive d’habitants d’Amérique centrale vers les États-Unis.

Mme Harris a été la première à rencontrer la nouvelle présidente après avoir assisté à la cérémonie d’investiture.

« La vice-présidente (Kamala) Harris a accueilli positivement la priorité donnée par la présidente (Xiomara) Castro à la lutte contre la corruption et l’impunité, y compris son intention de demander l’aide des Nations unies pour mettre sur pied une commission internationale contre la corruption », selon une note distribuée à la presse par le bureau de Mme Harris.

Dans son discours d’investiture, la nouvelle présidente a avancé que 74 % des près de 10 millions d’habitants du pays vivent en dessous du seuil de pauvreté (59 % selon les chiffres officiels, 71 % selon une ONG hondurienne).

« Ce chiffre à lui seul explique les caravanes de milliers de personnes qui fuient vers le nord, vers le Mexique et les États-Unis, à la recherche […] d’une manière de subsister, même au risque de leur vie », a déclaré Mme Castro.

La violence des gangs, qui fait du Honduras l’un des plus dangereux au monde (près de 40 meurtres pour 100 000 habitants), pousse aussi à émigrer des habitants terrorisés.