Mauricio Macri a prêté serment jeudi comme président de l'Argentine après 12 ans de règne des époux Kirchner, un changement de cap en perspective puisqu'il a promis de libéraliser l'économie et d'en finir avec les pratiques protectionnistes.

La cérémonie a débuté vers 11 h 30 (9 h 30 heure de Montréal), devant les parlementaires réunis au Congrès. Le nouveau président de centre droit a promis que son gouvernement lutterait «de manière infatigable pour ceux qui en ont le plus besoin».

Alors que les Argentins redoutent des mesures économiques douloureuses pour relancer la 3e puissance économique d'Amérique latine, il s'est voulu apaisant.

«Les défis sont énormes et on ne va pas résoudre les problèmes du jour au lendemain, a-t-il dit. Les grandes transformations se font en avançant pas à pas chaque jour».

Le nouveau président devait se rendre ensuite au palais présidentiel toujours escorté par les grenadiers. C'est là que l'écharpe présidentielle et le bâton de commandeur de la nation doivent lui être remis.

Il avait quitté son appartement du centre de Buenos Aires dans un 4x4 blanc, prenant la direction du Congrès, escorté par des dizaines de cavaliers de l'unité des grenadiers de l'armée argentine, saluant la foule.

Une dizaine de chefs d'État, notamment sud-américains, ainsi que l'ancien Roi d'Espagne Juan Carlos, étaient présents à Buenos Aires.

À la suite d'un différend avec son successeur sur le lieu de la remise de l'écharpe présidentielle, la présidente sortante Cristina Kirchner n'a pas participé à la cérémonie, en vertu d'une décision de justice écourtant son mandat de quelques heures.

Parmi les Argentins massés sur le parcours, Susana Antonietti, une femme au foyer de 60 ans, est venue de Merlo, une banlieue de Buenos Aires, pour assister à l'évènement. «Depuis 1983 (fin de la dictature, NDLR) nous avons vu beaucoup de choses, dit-elle. J'ai de l'espoir. Je veux qu'on en finisse avec la corruption. Je suis contre le Péronisme», le mouvement politique de la présidente sortante Cristina Kirchner.

Les milieux d'affaires applaudissent l'arrivée au pouvoir du maire de Buenos Aires, qui a remporté la présidentielle à la surprise générale. Il s'est imposé au second tour de l'élection (51,33 % contre 48,66 %) face à Daniel Scioli, le candidat de la coalition de gauche, au pouvoir depuis 2003.

Macri, 56 ans, ingénieur de formation et fils d'un milliardaire italien ayant fait fortune en Argentine, aurait pu suivre les traces de son père, mais après une dizaine d'années à la tête d'entreprises du Groupe Macri, il s'est lancé dans la politique.

Il a d'abord été élu en 1995 président du club de soccer de Boca Juniors, le plus prestigieux d'Argentine, avant de fonder son propre parti politique.

Après un premier échec en 2003, il est élu en 2007 maire de Buenos Aires.

Relancer l'économie

Le principal défi de M. Macri sera de relancer la 3e économie d'Amérique latine.

La situation économique de l'Argentine est loin d'être aussi catastrophique qu'après la crise économique de 2001/2002. Mauricio Macri hérite d'un pays désendetté, mais la croissance est en berne, le déficit budgétaire de plus de 5 %, l'inflation de 30 %, le peso est surévalué et les réserves de devises s'amenuisent.

Bien aidés par la croissance des années 2000 et la flambée du soja et des céréales, Nestor (2003-2007) puis son épouse Cristina Kirchner ont remis l'Argentine en ordre de marche, avant un essoufflement de la croissance fin 2013, dû en grande partie au contexte régional et mondial.

Une des premières initiatives du gouvernement Macri sera d'entamer des pourparlers à New York pour dénouer le conflit opposant l'Argentine aux fonds «vautours» sur un résidu de dette.

Le litige entre l'Argentine et les fonds «vautours» est dans l'impasse. Les fonds spéculatifs détenteurs de 7 % de la dette ont systématiquement refusé les restructurations acceptées par la plupart des créanciers (93 %) moyennant une remise de dette.

Un premier contact officiel a eu lieu cette semaine entre le médiateur et le secrétaire argentin aux Finances, Luis Caputo, préambule à l'ouverture de négociations.

Gouverner l'Argentine sans majorité propre à la Chambre des députés ni au Sénat est l'autre grand défi du nouveau président. Il devra constituer des alliances pour rallier à sa cause gouverneurs provinciaux, députés et sénateurs.

Mauricio Macri a fait campagne sur la thématique du changement et de la «pauvreté zéro», mais il a d'ores et déjà annoncé qu'il maintiendrait en partie les aides sociales aux foyers les plus démunis, introduites par ses prédécesseurs.

«Adios» à Cristina Kirchner

Des milliers de partisans de la présidente argentine se sont rassemblés mercredi devant le palais présidentiel à Buenos Aires pour saluer Cristina Kirchner, qui quitte le pouvoir après deux mandats de 4 ans.

La telenovela politique de l'ère Kirchner a connu son épilogue mardi lorsque la justice, saisie par M. Macri, a tranché un différend sur les modalités de la passation de pouvoir, obligeant Mme Kirchner à quitter le palais présidentiel mercredi soir.

Cristina Kirchner, 62 ans, ne pouvait pas briguer un troisième mandat consécutif, mais elle peut théoriquement se présenter à nouveau en 2019.

Mme Kirchner devait quitter jeudi la capitale argentine et se rendre dans son fief de Patagonie pour assister à la prise de fonction de sa belle-soeur, Alicia Kirchner, élue gouverneure de la province de Santa Cruz.