Le gouvernement colombien s'est dit mardi déterminé à maintenir l'offensive contre l'Armée de libération nationale (ELN), après une attaque meurtrière de cette guérilla qui n'est pas encore engagée dans le processus de paix.

«Les forces armées maintiendront les opérations contre la guérilla de l'ELN», a assuré le ministre de la Défense Luis Carlos Villegas à l'issue d'un conseil de sécurité extraordinaire convoqué par le président Juan Manuel Santos.

M. Villegas a réitéré l'ordre rappelé la veille par le chef de l'État, après une attaque aux explosifs de l'ELN qui a fait 12 morts dans un hameau indigène de la commune de Güican, à environ 400 km au nord-est de Bogota. «Deux soldats de la patrie sont séquestrés», a-t-il précisé, rendant l'ELN responsable de leur «vie et intégrité».

Mardi soir, l'ELN a revendiqué l'attaque, dans un communiqué diffusé sur Twitter par son organe de communication Radio nationale patrie libre (Ranpal), mais en faisant état de «17 militaires et un policier» tués. Elle a confirmé détenir deux soldats, assurant qu'ils étaient «en parfait état de santé» et seraient «libérés dans les prochains jours».

Cette guérilla d'extrême gauche, qui compte quelque 2500 combattants, a vu le jour en 1965 à l'issue d'une révolte paysanne. Inspirée de la révolution cubaine et du Che Guevara, elle est le second mouvement rebelle du pays, après les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) en pourparlers de paix depuis bientôt trois ans.

Le président Santos était intervenu à la télévision lundi soir pour annoncer le «coeur brisé» la mort de onze militaires et un policier au cours de cette attaque contre une commission électorale qui veillait sur des bulletins de vote du scrutin local de dimanche.

Le ministre de la Défense avait en outre fait état de trois militaires blessés et de six disparus, dont deux agents électoraux et deux militaires.

Les deux agents électoraux ont toutefois donné signe de vie mardi matin. «Ils étaient restés cachés», a déclaré à l'AFP une fonctionnaire du registre électoral du département de Boyaca, Elisabeth Monsalve, soulignant la difficulté des communications dans cette zone rurale isolée.

Les autorités n'ont en revanche donné aucune information sur le sort de deux autres disparus, un policier et un guide indigène U'wa.

L'ELN pour «un cessez-le-feu bilatéral»

Cette attaque «démontre que l'ELN n'a pas compris que nous sommes dans un temps de paix, et non de guerre», a déploré M. Santos, dont le gouvernement a entamé en janvier 2014 des «dialogues préparatoires» à des pourparlers avec cette guérilla, sans résultat concret à ce jour.

L'ELN s'est toutefois déclaré mardi soir prête à signer «un cessez-le-feu bilatéral» avec le gouvernement afin de générer «un climat favorable» à des négociations de paix.

Peu avant, le commandant de l'armée de terre, le général Alberto Mejia, avait annoncé sur Twitter que trois guérilleros avaient été capturés, «dont un blessé».

En réagissant à l'attaque, M. Santos avait affirmé lundi que «si l'ELN pense qu'avec de tels actes, elle va (...) se renforcer dans la perspective d'une éventuelle négociation, elle se trompe complètement» et souligné avoir ordonné «d'intensifier ses actions militaires contre cette organisation».

Une autre action de l'ELN dimanche dans le département d'Antioquia (nord-ouest), au cours de laquelle un soldat a été tué, avait été l'incident le plus grave d'une journée électorale au calme inédit. Le ministre de l'Intérieur Juan Fernando Cristo l'avait même qualifiée de «la plus pacifique et la plus sûre de l'histoire de la Colombie».

Le gouvernement de centre droit de M. Santos mène depuis novembre 2012 des pourparlers avec les FARC et les deux parties se sont engagées à signer un accord de paix définitif avant le 23 mars. Cette guérilla, la principale de Colombie avec quelque 7000 combattants, est née en 1964, également d'une insurrection paysanne.

Si elle observe une trêve unilatérale depuis juillet et si le gouvernement a suspendu ses bombardements aériens contre les FARC, il n'a pas baissé la garde. Six guérilleros de l'ELN ont ainsi été tués la semaine dernière dans le Bolivar (nord-est) et six autres en septembre dans le Cauca (sud-ouest).