Le Chili votait dimanche lors d'élections générales qui devraient ramener au pouvoir l'ex-présidente socialiste Michelle Bachelet, portée par une popularité immense et l'espoir de changement de millions de Chiliens qui pourraient lui assurer la victoire dès le premier tour.

Les bureaux de vote ont ouvert leurs portes à 8H00 (6h, heure de Montréal) et quelque 13,5 millions d'électeurs ont jusqu'à 18 h (15 h à Montréal) pour choisir le nouveau président du Chili, 120 députés, 20 sénateurs et les conseillers régionaux.

Dès samedi soir, les quelque 40 000 bureaux de vote du pays, dont le plus grand d'entre eux, le stade national de Santiago, ont été placés sous la protection de l'armée.

À quelques heures du scrutin, le président Sebastian Piñera (centre droit) a appelé ses concitoyens à voter, la participation restant la grande inconnue après la récente modification de la loi abolissant le vote obligatoire.

«Je vous demande à tous d'aller voter, de motiver vos familles, vos collègues de travail et vos voisins pour qu'ils fassent de même», a exhorté M. Piñera, qui quittera la présidence le 11 mars 2014, la Constitution l'empêchant de briguer deux mandats consécutifs.

La socialiste Michelle Bachelet, 62 ans, médecin de formation et première femme élue à la tête d'un pays sud-américain en 2006, est créditée en moyenne de 47 % des intentions de vote. Ces sondages laissent entrevoir pour Mme Bachelet la possibilité d'éviter un deuxième tour en dépassant la barre des 50 % des suffrages, ce qui ne s'est pas produit au Chili depuis 1993.

Loin derrière, huit autres candidats, un nombre inédit au Chili, sont en lice dont la principale rivale de l'ex-présidente, Evelyn Matthei, première femme candidate conservatrice à une présidentielle chilienne, qui n'a obtenu que 14 % d'intentions de vote en moyenne.

Investie après plusieurs retraits de barons de la droite chilienne, l'ex-ministre du Travail de Sebastian Piñera n'est pas parvenue à convaincre avec son programme libéral visant la continuité.

«Je vais vous faire un résumé. Notre projet évoque l'Allemagne de (la chancelière Angela) Merkel. Leur projet (de la coalition de gauche de Bachelet) rappelle l'Allemagne du Mur de Berlin», a-t-elle asséné lors de la campagne.

Mme Matthei n'a pas non plus suscité un fort engouement parmi les soutiens traditionnels d'une droite affaiblie par les divisions internes et les défections.

Par contraste, Michelle Bachelet baigne dans un climat de ferveur, particulièrement palpable lors de sa dernière réunion de campagne jeudi, qui a réuni dans un parc les dirigeants historiques de la gauche chilienne comme l'ex-président Ricardo Lagos ou le secrétaire général du PC Guillermo Teillier, mais aussi une foule d'inconditionnels de tous horizons, en particulier venant des secteurs les plus défavorisés.

Appuyée par une large coalition, la «Nouvelle majorité», regroupant communistes, démocrates-chrétiens et divers courants socialistes, Michelle Bachelet est consciente des attentes d'un pays, différent de celui qu'elle a quitté à la fin de son premier mandat en 2010 pour exercer les fonctions de directrice exécutive de l'ONU Femmes.

Mme Bachelet, appelant à voter «massivement» pour s'assurer la victoire au premier tour, a promis de mettre en marche dans les 100 jours après son élection les réformes qu'elle n'avait pas lancées lors de son premier mandat.

Ce programme ambitieux est basé notamment sur une révision de la Constitution héritée de la dictature, une réforme fiscale envisageant une augmentation de l'impôt des sociétés de l'ordre de quelque 8 milliards de dollars (3 % du PIB) destiné notamment à une refondation du système éducatif pour instaurer une éducation publique de qualité, l'amélioration du réseau de la santé et des services publics.

Mais la capacité de manoeuvre du nouveau gouvernement et l'ampleur des réformes promises, dont une réforme de la loi sur l'avortement, interdit sous toutes ses formes, dépendront du résultat des élections législatives et sénatoriales qui renouvellent la totalité de la Chambre des députés et plus de la moitié du Sénat.

La candidate socialiste a oeuvré ces dernières semaines à réduire les attentes, réitérant dans son discours de clôture que «la tâche ne sera pas facile». «Quatre ans, c'est peu de temps».

Cette retenue pourtant pourrait lui coûter cher au sein d'une partie de sa base électorale, particulièrement chez les protestataires qui ont appuyé sa candidature.

Photo IVAN ALVARADO, Reuters

À quelques heures du scrutin, le président Sebastian Piñera a appelé ses concitoyens à voter, la participation restant la grande inconnue après la récente modification de la loi abolissant le vote obligatoire.