Juan-Manuel Santos, dauphin d'Alvaro Uribe, est parti largement en tête dans la course à la présidentielle en Colombie obtenant plus de 46% des suffrages au premier tour dimanche, largement en avance sur Antanas Mockus (21,5%) avec qui un rendez-vous est assuré au second tour le 20 juin.

Les Colombiens ont manifestement entériné dimanche la «continuité» incarnée par Juan-Manuel Santos, qui est passé très près d'une victoire au premier tour.

M. Santos, qui n'avait jamais eu auparavant de mandat électif, avait en effet axé sa campagne sur ses réussites à la tête du ministère de la Défense entre 2006 et 2009.

Durant cette période, il a asséné de durs coups à la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes), notamment lors de l'opération militaire Jaque, qui lui avait arraché 15 de ses plus précieux otages, dont la Franco-colombienne Ingrid Betancourt, le 2 juillet 2008.

Selon des résultats portant sur 99% des bureaux de vote diffusés par la commission électorale vers 18h, Juan-Manuel Santos, candidat du Parti social d'union nationale (Partido de la U, droite) obtient 6,7 millions de voix contre 3,1 millions pour l'ex-maire de Bogota Antanas Mockus, candidat du Parti Vert.

German Vargas Lleras, de Cambio Radical (droite) membre de la coalition qui a porté Uribe au pouvoir, obtient 10% des suffrages.

Le candidat de la gauche Gustavo Petro (Pôle démocratique alternatif) arrive en quatrième position, avec 9% des suffrages, suivi de Noemi Sanin, du Parti conservateur (6%) et de Rafael Pardo, candidat du Parti libéral (centre-gauche, 4,3%)

Dès 17h, des sympathisants de l'ex-ministre de la Défense, âgé de 58 ans, ont manifesté leur joie aux abords de l'hôtel où il s'était réuni avec son équipe.

«Santos, c'est comme Uribe, il va lutter contre la guérilla et le narcotrafic», expliquait à l'AFP quelques heures plus tôt Sandi Ochoa, 30 ans, en tenant une pancarte de sa campagne, aux abords de Corferias, l'un des plus grands bureaux de vote de la capitale.

Du côté des partisans d'Antanas Mockus, qui avait axé sa campagne sur le retour de la «morale» dans une société gangrenée par le narcotrafic, équipé d'un tournesol et d'un crayon, c'était en revanche la tristesse.

«C'est décevant pour la Colombie qu'une alternative aussi décente que Mockus ne soit pas victorieuse», a réagi Jorge Millan, accusant le président sortant d'avoir trop ouvertement pris parti pour M. Santos.

Quelque 30 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes dimanche pour le premier tour de cette présidentielle marquant la fin de l'ère Uribe, arrivé au pouvoir en 2002 et dont la politique de fermeté à l'égard de la guérilla des Farc reste très populaire.

Juan-Manuel Santos, un temps dépassé dans les sondages par M. Mockus, avait revu ses messages à un mois de la présidentielle, et mis l'accent sur la création d'emplois, dans un pays où près de 46% des habitants vivent sous le seuil de pauvreté et où le chômage (13%) est la principale préoccupation, bien avant la guérilla.

Ses partisans ont en outre présenté Antanas Mockus comme un homme au programme vague, dont l'élection représenterait un «saut dans le vide» pour ce pays de 46 millions d'habitants où cohabitent encore guérilleros, paramilitaires et narcotrafiquants.

Le scrutin a été entouré d'un calme relatif.

«Les incidents d'ordre public ont diminué de 78%» par rapport à 2002, a assuré le ministre de l'Intérieur, Fabio Valencia Cossio, à la mi-journée.

Des combats impliquant les Farc - comptant encore entre 7 500 et 10 000 combattants selon les estimations - ont toutefois été rapportés dans plusieurs départements, notamment dans le Cauca (sud-ouest), où la guérilla reste très active.

Au moins quatre soldats ont été tués, de même qu'un membre des Farc, selon le ministère de l'Intérieur.