L'ancien chef guérillero tupamaro José Mujica a remporté dimanche la présidentielle en Uruguay, selon les sondages sorties des urnes, près d'un demi-siècle après avoir prôné dans les années 60 la lutte armée contre le système capitaliste et l'État bourgeois.

Aujourd'hui, il se revendique moins du Vénézuélien Chavez que du Brésilien Lula, son «modèle», car il fait «de la négociation permanente le centre de sa politique».

Mujica, né en 1935, a cofondé au début des années 60 la guérilla d'extrême-gauche du Mouvement de Libération national-Tupamaro (MLN-T), qui prônait la lutte armée contre le système capitaliste et l'État «bourgeois».

Le MLN-T s'est fait connaître par des opérations spectaculaires: attaques de banques et de casinos, enlèvements de hauts fonctionnaires, dénonciations de corruption.

En 1970, Mujica est grièvement blessé par balles et fait prisonnier avant de participer à l'évasion la plus spectaculaire de l'histoire de l'Uruguay, quand 111 prisonniers s'enfuient de la prison «Liberté» de Punta Carretas qui deviendra un centre commercial.

À l'époque, les actions des «Tupamaros», dans un pays frappé par une grave crise économique, contribuent à la radicalisation du climat politique, qui dégénère en un coup d'État militaire en juin 1973.

«Pepe», arrêté dès 1972, restera en prison dans des conditions très dures de détention et d'isolement jusqu'au retour de la démocratie, treize ans plus tard.

Après l'amnistie de 1985, Mujica réintègre la vie politique et, en novembre 1994, il est le premier ancien guerillero élu à la chambre des députés.

Arrivé en scooter au parlement, cet homme rond et moustachu vêtu d'un jean et d'une chemise, est refoulé par les gardes. Il attendra une visite au Brésil, 14 ans plus tard, pour porter son premier costume.

Devenu ministre de l'Agriculture (2005-2008), son franc-parler déclenche souvent des polémiques, comme lorsqu'il traite l'Argentine voisine, partenaire obligée de l'Uruguay, de nation «irrationnelle et hystérique».

Elevé par sa mère après la mort de son père, un paysan ruiné, il a grandi en cultivant des fleurs. Aujourd'hui, il continue et propose d'organiser ses conseils des ministres dans sa «chacra», sa petite ferme des environs de Montevideo. «Pepe» reverse une partie de son salaire à une fondation d'aide aux petits producteurs.

Agé de 74 ans, «Pepe» est marié, depuis peu, avec une ancienne guérillera, Lucia Toplanski qui a partagé 25 ans de sa vie. Il n'a pas d'enfant.