Les chefs d'Etat d'Amérique du sud ont débattu et même négocié en direct à la télévision lors d'un sommet ultra-sensible à Bariloche (Argentine) destiné à désamorcer une crise provoquée par un accord militaire américano-colombien, une première pour la région.

«Certains s'attendaient à ce que cette réunion vole en éclats: nous avons été capables de débattre publiquement», a déclaré la présidente argentine Cristina Kirchner à l'issue du sommet.

C'est à la demande du président colombien Alvaro Uribe que ces échanges ont été retransmis dans leur totalité et en direct sur les écrans de la salle de presse à proximité du grand hôtel Llao Llao, situé au bord d'un lac, événement rare pour des sommets de crise de ce genre.

La question même de la retransmission a été débattue en public. «Quelqu'un a-t-il une objection ?» a demandé le président équatorien Rafael Correa. Personne n'a osé s'opposer mais à l'évidence certains n'étaient pas d'accord.

Les journalistes et les téléspectateurs de certaines chaînes latino-américaines ont ainsi pu suivre la moindre boutade d'un chef de l'Etat à l'autre. Comme lorsque le président péruvien Alan Garcia a lancé à son homologue vénézuélien Hugo Chavez: «A quoi sert-il de contrôler le pétrole, puisque tu le vends ensuite entièrement aux Américains?», avant d'ajouter: «C'est une blague!».

Ils ont vu les chefs d'Etat déjeuner tout en débattant et ont éclaté de rire lorsque la caméra a fixé longuement le président brésilien concentré sur son énorme plat.

Lula a fini par laisser exploser sa colère, reprochant à ses homologues d'avoir trop parlé pour les caméras au lieu de se mettre au travail.

«Au moment où nous pensions que la réunion était finie, voilà que la réunion reprend. Certains présidents ont parlé trois ou quatre fois !», a-t-il dit, avant d'éteindre son micro, visiblement contrarié.

«Moi ce qui me préoccupe, c'est ce que va dire la presse demain», a fait valoir Lula, comme s'il avait oublié que les médias l'écoutaient.

Son homologue équatorien Rafael Correa a lâché: «Moi, ce que dit la presse, je m'en fiche !». Peu après, le même Correa a lu le projet de déclaration finale et interrogé un à un les autres présidents pour connaître les modifications qu'ils souhaitaient apporter. Une vraie négociation en direct.