Les Colombiens ont manifesté une nouvelle fois vendredi pour réclamer la libération des otages encore aux mains des groupes armés, mais cinq mois après le sauvetage de la plus connue d'entre eux, Ingrid Betancourt, la mobilisation semble avoir faibli.

Sous le slogan «unis pour la vie et la liberté», les manifestants, arborant des t-shirts blancs où l'on pouvait lire «Colombia soy yo» (Je suis la Colombie), ont commencé à défiler vers 11h00 locales dans les principales villes du pays.

Vers 15h00, les autorités n'avaient pas encore livré d'estimation sur la participation, mais selon des journalistes et photographes de l'AFP à Bogota, Cali et Medellin la mobilisation était beaucoup plus faible que lors de la dernière manifestation pour les otages, le 20 juillet, qui avait rassemblé quatre millions de personnes.

Environ 5000 personnes étaient rassemblées vers 13h00 sur la grande place Bolivar de Bogota, face au Congrès, a constaté l'AFP.

Les manifestants ont réclamé la libération des quelque 3000 otages encore aux mains des groupes armés, dont 350 à 700 seraient détenus par la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC, marxistes).

Parmi eux, on compte encore 28 otages dits «politiques», que la guérilla se dit prête à échanger contre 500 de ses combattants capturés par les autorités. Celles-ci refusent catégoriquement un tel échange.

«Liberté, liberté, liberté», scandait la foule de la place Bolivar, dont beaucoup de parents d'otages venus avec des photos de leurs proches, disparus il y a dix ans ou juste deux semaines, comme Fanny Leal, la soeur de Guillermo Leal, travailleur social d'une localité proche de Bogota enlevé le 16 novembre.

Les Colombiens répondaient à l'appel lancé fin octobre par la Franco-Colombienne Ingrid Betancourt, libérée par l'armée le 2 juillet avec 14 autres otages «politiques» de la guérilla, dont trois Américains.

«Tous les Colombiens doivent défiler. Celui qui ne le fera pas ne pourra pas passer Noël en paix avec sa conscience», avait-t-elle déclaré.

Mme Betancourt a quitté la Colombie le 3 juillet, au lendemain de sa libération, et n'y est plus jamais retournée. Elle n'était pas présente dans le pays vendredi, «pour des raisons de sécurité», mais a participé à un rassemblement à Madrid, où elle a demandé aux FARC «de déposer les armes».

Pendant ce temps, son grand ami l'ex-parlementaire Luis Eladio Perez, ex-otage qui avait partagé avec elle plusieurs années de captivité, jusqu'en 2007, s'exprimait à Bogota.

«Pas plus de chaînes, pas plus d'enlèvements», disait-il à la foule de la place Bolivar.

«La cause des otages a perdu du poids au niveau international», a-t-il déploré dans un entretien avec l'AFP peu avant le défilé.

Depuis la libération des plus connus, «il n'y a plus la même pression face aux FARC et au gouvernement», a-t-il estimé en mentionnant notamment le désintérêt de la France.

Il a ajouté qu'il craignait aussi une plus faible mobilisation de la société colombienne, en proie à des difficultés économiques liées à la ruine de milliers d'épargnants, escroqués par des sociétés d'épargne frauduleuse et «moins euphorique que le 20 juillet».

«La moitié du pays est déprimée en raison de la situation économique générée par la faillite», de ces sociétés, a aussi expliqué Carolina Melo, responsable de la communication à la Fondation pays libre, une des ONG organisatrices.

Tout dialogue direct avec la guérilla semble gelé depuis les libérations du 2 juillet, mais, compte tenu de leur «fragilisation» «il n'est pas impossible que les FARC adoptent une position plus flexible», a par ailleurs estimé Alfredo Rangel, expert en sécurité.

Depuis le début de l'année, la guérilla a perdu 24 de ses otages les plus précieux - libérés unilatéralement ou par l'armée - et au moins trois de ses dirigeants historiques.