(Lahore) La Pakistanaise Malala Yousafzai, prix Nobel de la paix, est sous le feu des critiques dans son pays natal après une publicité réalisée pour une comédie musicale sur les suffragettes qu’elle produit avec Hillary Clinton.

Sur X, anonymes et commentateurs lui reprochent d’être apparue à Broadway aux côtés de l’ex-secrétaire d’État américaine – sous le mandat de laquelle des frappes de drones ont tué des civils au Pakistan – et de ne pas se prononcer sur la guerre à Gaza, y voyant un « deux poids, deux mesures ».

Si Malala Yousafzai, 26 ans, est une militante obstinée des droits des femmes louée à travers le monde, les cercles islamistes et une partie importante de l’opinion publique pakistanaise voient en elle un « agent des États-Unis » créé pour corrompre la jeunesse.

Après la première représentation de Suffs, le cercle des critiques semble s’être élargi à des figures du féminisme au Pakistan.

« J’ai défendu bec et ongle Malala toutes ces années mais, là, je ne la suis pas. C’est vraiment difficile de la défendre depuis six mois », écrit ainsi la militante Leena Ghani, en référence à la guerre lancée par Israël à Gaza en réponse à l’attaque meurtrière du Hamas sur son sol le 7 octobre.

« J’admire Malala depuis 2011 », affirme l’éditorialiste Mehr Tarar sur X, mais « sa collaboration théâtrale avec Hillary Clinton-qui défend le soutien infaillible de l’Amérique au génocide des Palestiniens-est un vrai coup à sa crédibilité comme défenseuse des droits humains ».  

« Tu nous as laissés tomber »

Mme Clinton a dit soutenir la guerre contre le Hamas et rejeté des appels au cessez-le-feu à Gaza. Elle a aussi réclamé la protection des civils dans le petit territoire contrôlé par le mouvement islamiste depuis 2007.

« Quelle déception Malala, tu nous as laissés tomber », écrit de son côté la professeure et militante féministe Nida Kirmani.

De nombreuses voix au Pakistan ont accusé Malala Yousafzai de ne pas avoir exprimé sa solidarité avec les Palestiniens. La jeune femme avait pourtant précédemment publiquement condamné la mort de civils à Gaza et réclamé un cessez-le-feu.  

Le New York Times rapporte qu’elle portait une épinglette rouge et noir pour la première représentation de Suffs, un signe de soutien au cessez-le-feu.

Après ces critiques, la jeune femme a affirmé mardi sur le réseau social X son soutien aux habitants de Gaza et condamné la guerre menée par Israël.

« Je veux qu’il n’y ait aucune confusion quant à mon soutien à la population de Gaza », a écrit Malala Yousafzai.

« Nous n’avons pas besoin de voir davantage de cadavres, d’écoles bombardées et d’enfants affamés pour comprendre qu’un cessez-le-feu est urgent et nécessaire ».

« J’ai condamné et je continuerai à condamner le gouvernement israélien pour ses violations du droit international et ses crimes de guerre », a-t-elle ajouté.

La jeune fille originaire de la verdoyante vallée de Swat, dans le nord-ouest du Pakistan, avait été blessée par balle au visage en 2012 par des islamistes.

Soignée en urgence en Grande-Bretagne, elle est ensuite devenue un symbole mondial de résistance à l’extrémisme religieux et la porte-voix des filles privées d’instruction, puis en 2014 la plus jeune prix Nobel de la Paix de l’histoire.

Depuis qu’elle a été attaquée, elle n’est revenue que deux fois dans son pays.