(Washington) Le réchauffement climatique menace la stabilité mondiale, selon un rapport des services de renseignement américain qui prévoient un risque croissant de conflits dus à la raréfaction de l’eau et aux mouvements migratoires après 2030.

« Les tensions géopolitiques vont probablement s’aggraver, car les pays auront des différends sur la façon de réduire les émissions à effet de serre pour respecter les objectifs de l’Accord de Paris », indique jeudi le renseignement américain à quelques semaines de la conférence mondiale sur le climat COP26 prévue à Glasgow début novembre.

Eau et migrations dès 2030

La fonte des glaces dans l’Arctique « amplifie déjà la concurrence stratégique pour l’accès à ses ressources naturelles », note ce rapport qui présente les conclusions de l’ensemble des services américains de renseignement. Ailleurs, avec la hausse des températures et des épisodes météo plus extrêmes, « il y a un risque croissant de conflits au sujet de l’eau et des migrations, notamment après 2030 ».

La plupart des pays « seront confrontés à des choix économiques difficiles et vont probablement compter sur des avancées technologiques pour réduire rapidement leurs émissions, mais plus tard », indiquent les services de renseignement, prévenant que les techniques de géo-ingénierie, qui visent à manipuler et à modifier le climat et l’environnement, risquent d’être une autre source de conflit.

Un pays pourrait ainsi « tester unilatéralement voire déployer des technologies solaires à grande échelle pour contrer les effets du changement climatique s’il considère que les autres efforts pour limiter le réchauffement à 1,5 degré Celsius ont échoué », expliquent-ils. « Sans un accord international sur ces technologies, nous considérons qu’un tel effort unilatéral se retournerait » contre ce pays.

Problèmes accrus après 2040

Après 2040, les pays les moins avancés seront les moins capables de s’adapter au changement climatique, ce qui va « accroître le risque d’instabilité voire de guerre civile dans ces pays », ajoutent-ils, avant d’identifier 11 pays considérés comme particulièrement à risque : l’Afghanistan, la Birmanie, l’Inde, le Pakistan, la Corée du Nord, le Guatemala, Haïti, le Honduras, le Nicaragua, la Colombie et l’Irak.

Ces pays « sont extrêmement vulnérables aux effets physiques (du changement climatique) et n’ont pas la capacité de s’y adapter » indiquent les services de renseignement, suggérant de les aider à s’adapter pour réduire les risques pour la sécurité des États-Unis.

Dans un rapport séparé sur le même sujet, publié en parallèle, le Pentagone souligne que la région Indo-Pacifique, devenue l’axe prioritaire des États-Unis qui cherchent à y contrer la montée en puissance de la Chine, est particulièrement vulnérable à la montée des eaux.

Les États-Unis ont des bases importantes sur l’île de Guam, dans l’archipel des Îles Marshall et dans les Palaos, note le rapport du ministère de la Défense, soulignant que la Chine pourrait « essayer de profiter de l’impact du changement climatique pour gagner de l’influence » dans la région.

Un troisième rapport, centré sur la stabilité financière, a été publié par le Conseil américain de surveillance de la stabilité financière (FSOC), instance issue de la crise de 2008 et qui réunit les autorités de régulation financière américaines sous la houlette du Trésor.

« Pour la première fois, le FSOC reconnaît le changement climatique comme une menace émergente et croissante pour notre stabilité financière », a salué la secrétaire au Trésor Janet Yellen, lors de la réunion virtuelle jeudi.

« Ce rapport met le changement climatique au premier plan de l’agenda de ses agences membres, et c’est une première étape cruciale dans la lutte contre la menace du changement climatique, ce ne sera en aucun cas la fin de ce travail », a-t-elle ajouté.