Depui dimanche, les pays de l'Union européenne vont cesser d'importer du pétrole iranien et interdiront aux compagnies européennes d'assurer les pétroliers en provenance du pays moyen-oriental. Un coup dur pour le régime islamique? Pas vraiment, affirme le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, rencontré à Téhéran la semaine dernière.

«Si on fait le calcul, les exportations de pétrole vers l'Europe ne représentent que 18% de nos exportations de pétrole qui, elles-mêmes, ne constituent que 35% du budget de l'État iranien. Au pire, les sanctions vont toucher 7% du budget iranien. Ce n'est pas ça qui va faire changer notre pays de cap», affirme Ramin Mehmanparast, sous le regard des ayatollahs Khomeiny et Khamenei, dont les portraits sont accrochés aux murs de son grand bureau.

Au moment de la rencontre, les négociations entre l'Iran et les cinq grandes puissances nucléaires mondiales (États-Unis, Russie, Chine, France, Grande-Bretagne) et l'Allemagne venaient tout juste de se terminer en queue de poisson à Moscou. Devant l'impasse, les pourparlers ont été renvoyés dans la cour des experts techniques. Les menaces de nouvelles sanctions, s'ajoutant à des dizaines d'autres déployées depuis 2006, étaient devenues inéluctables.

Convaincu du droit de l'Iran d'enrichir son propre uranium et de développer son programme nucléaire dans les paramètres du traité de non-prolifération que le gouvernement iranien affirme respecter, M. Mehmanparast estime que l'Europe va payer ses sanctions plus cher que la République islamique.

«La fin de nos exportations de pétrole causera de sérieux maux de tête aux pays européens qui pensent qu'ils peuvent imposer des sanctions sans ressentir eux-mêmes de choc, mais les prix du pétrole risquent d'augmenter et l'impact sera plus grand chez eux que chez nous», estime M. Mehmanparast.

Tous ne sont pas de cet avis. Plusieurs experts occidentaux estiment que les menaces de sanctions ont incité l'Iran à revenir à la table de négociations dans les derniers mois.

Une ancienne députée iranienne de l'opposition réformiste, Soheila Jelodarzadeh, rencontrée elle aussi la semaine dernière, croit pour sa part que l'impact à long terme des sanctions en Iran risque de causer un soulèvement contre le gouvernement en place dans une population qui a de plus en plus de difficulté à joindre les deux bouts.

M. Mehmanparast rejette cette hypothèse d'un revers de main. En temps de nécessité, les Iraniens savent se serrer les coudes pour protéger leur indépendance par rapport à l'Ouest, estime-t-il. Ils l'ont montré pendant la guerre Iran-Irak. Ils seront prêts à le faire de nouveau. La même chose serait vraie, selon lui, si Israël mettait à exécution ses menaces d'attaquer l'Iran, selon le porte-parole.

«Ici, personne ne prend au sérieux les menaces d'Israël», lance-t-il, sur un ton assuré, en ajoutant qu'une telle initiative israélienne serait un véritable boomerang. «Beaucoup de pays au Moyen-Orient attendent qu'Israël fasse l'erreur d'attaquer l'Iran. Si ça arrive, il y aura un nouveau plan pour le Moyen-Orient», laisse-t-il tomber, énigmatique.