Le cabinet du premier ministre Harper a rejeté la proposition de Paul Martin d'ajouter les changements climatiques et la pauvreté à l'ordre du jour du sommet du G20.

L'ancien premier ministre canadien a déclaré mercredi qu'Ottawa avait la responsabilité d'insérer le réchauffement climatique et la pauvreté au haut de la liste des priorités du G20 parce que ces facteurs menacent autant la stabilité du monde que son économie.

Mais les défis économiques sont si grands actuellement qu'ils doivent occuper toute l'attention, sans aucune autre distraction, a dit le porte-parole du premier ministre Stephen Harper, Andrew MacDougall. Selon lui, la situation est telle que l'attention des leaders doit être concentrée sur l'économie mondiale.

M. Harper a répété à plusieurs reprises par le passé que le G20 avait établi son efficacité en 2008 et 2009 en s'entendant sur un effort coordonné et sans précédent visant à stimuler l'économie mondiale.

Aujourd'hui, il demande aux chefs de gouvernement de ne pas oublier cette promesse - particulièrement depuis que la dette de la Grèce menace l'Union européenne et la relance économique mondiale.

M. Harper a d'ailleurs passé la majorité de son temps sur les tribunes à réduire les attentes en prévision des sommets du G20 à Toronto et du G8 à Huntsville, en Ontario, à la fin du mois.

Pour le G20, il souhaite que les pays arrêtent de parler d'une taxe bancaire mondiale et se penchent davantage sur l'établissement de principes communs de bonne gestion bancaire. M. Harper espère aussi que les pays développés évalueront les moyens qu'ils ont pour juguler leurs déficits.

Et il espère que les pays émergents, comme la Chine, augmenteront leurs dépenses et laisseront flotter leur taux de change.

M. Martin, lui, estime qu'il faut aller beaucoup plus loin pour que le sommet du G20 soit considéré comme une réussite. Il a profité d'un discours à Toronto, mercredi, pour déclarer que le G20 est le nouveau «comité de direction» de la planète, et qu'il ne peut se contenter de discussions sur les banques et l'économie.

Ce discours souligne les divergences qui ont cours actuellement à propos de la puissance que devrait avoir le G20, a commenté Tom Bernes, directeur exécutif du Centre pour l'innovation dans la gouvernance internationale. «Il y a de toute évidence un débat sur les autres problèmes urgents. L'ancien premier ministre Martin a demandé que l'ordre du jour soit élargi», a dit M. Bernes, qui a assisté au discours.

Puisque les changements climatiques comptent parmi les questions les plus pressantes de l'heure, a dit M. Martin, le G20 se doit d'adopter une position qui garantirait le succès des négociations internationales qui auront lieu en décembre au Mexique.

«Ce qui est important, ce sont les signaux qu'envoie le G20 aux tables de négociations du monde», a déclaré M. Martin devant les membres de l'Empire Club et du Canadian Club lors d'un discours sur les éléments nécessaires pour que le sommet du G20 soit considéré comme une réussite.

Il croit que des signaux forts envoyés lors du sommet permettraient d'éviter que la réunion mexicaine ne se transforme en une confrontation entre les États-Unis, la Chine et quelques autres pays, comme cela fut le cas à Copenhague.

De plus, a dit l'ancien premier ministre libéral, le G20 doit s'attaquer à la pauvreté mondiale, qui représente elle aussi une menace importante à la mondialisation. Il presse le G20 d'y aller d'une réponse plus urgente que ce qui a été le cas jusqu'à maintenant.

L'Europe a demandé à plusieurs reprises au premier ministre canadien d'inscrire les changements climatiques à l'ordre du jour du G20, mais Stephen Harper n'entend discuter que de règles bancaires et de stabilité économique.

M. Martin a rappelé que l'hôte d'un sommet est dans une position unique pour influencer les débats, et que le Canada ne se retrouvera plus dans cette position avant plusieurs années. «L'hôte du sommet se trouve dans une position forte et, s'il en décide ainsi, il peut influencer l'ordre du jour, a-t-il dit. Nous n'accueillerons pas d'autre sommet (du G20) avant une autre génération. Ne laissons pas filer l'opportunité qui se présente à nous.»