Un journaliste tombe sur le scoop qui pourra (re) lancer sa carrière. Il fonce. Vite. Trop? Resurrecting the Champ n'est pas un drame sportif comme les autres.

«Il existe une ligne de plus en plus mince entre l'information et le divertissement.» Une phrase que l'on entend souvent. Elle est si concrète pour Rod Lurie, qui a été journaliste avant de devenir réalisateur, que, depuis 10 ans, il a voulu traiter du sujet dans un film.

Ainsi a-t-il acheté les droits de l'histoire du journaliste J.R. Moerhinger qui, en mai 1997 dans le Los Angeles Times, a publié un article retraçant l'ascension et la chute d'un boxeur qui a failli être champion du monde et a fini dans la rue.

C'est, racontait le réalisateur de The Contender lors d'une rencontre de presse tenue à Los Angeles, le point de départ de Resurrecting the Champ. Un film «inspiré d'un fait vécu» qui traite d'éthique journalistique avant tout. Mais, aussi, des difficultés que traversent ceux qui ont la chance de briller parmi les étoiles avant de connaître la malchance et de choir dans la boue; de la difficulté de vivre dans l'ombre de quelqu'un - qui peut-être soi-même - et des relations père-fils.

Rod Lurie ne pourra pas être épinglé ici pour avoir succombé à la facilité. Un défi qu'il fait partager avec ses ex-collègues appelés à couvrir la sortie de son long métrage: Resurrecting the Champ s'apprécie mieux quand on en ignore les ressorts dramatiques.

Pour porter le film, il a pensé à Josh Hartnett et à Samuel L. Jackson.

«Je voulais Josh parce que j'ai du respect pour ses choix de carrière. Avec la gueule qu'il a, il pourrait jouer les jeunes premiers dans des projets de plusieurs millions et être parmi les stars majeures. Il préfère les rôles plus complexes, comme celui-là.» Celui-là, c'est celui d'Erik Kernan, journaliste sportif. Fils d'Erik Kernan, journaliste sportif. Un fils ordinaire. Un père superstar. Qui a quitté femme et enfant pour mieux briller dans le star système.

«Rod m'a aidé en me parlant de son passé de journaliste. Il me racontait sa manière de s'emparer d'un crayon dès que le téléphone sonnait, de s'éjecter de sa chaise quand il sentait que son interlocuteur lui livrait un scoop. De mon côté, j'ai parlé à J.R. Moerhinger», raconte l'acteur de 29 ans qui se glisse ici, pour la première fois, dans la peau d'un père.

Ainsi a-t-il appris sur un métier, celui de journaliste, qu'il ne connaissait que de l'extérieur... et pas sous son meilleur jour. «Au moins 95 % de ce qui est écrit à mon sujet est faux», fait celui qui, toutefois, a découvert combien la compétition est féroce dans ce milieu où «si vous ne montez pas, vous descendez. C'est comme ça qu'on en arrive à un point où on fait des erreurs, où on publie des nouvelles qui n'en sont pas».

Pour ce qui est de Samuel L. Jackson, qui devient The Champ, le boxeur déchu, Rod Lurie l'a choisi parce qu'il incarne en général les types forts. «J'aimais l'idée de le voir à terre.» Le principal concerné, lui, aimait l'idée de se transformer physiquement. De se faire rider la peau, grisonner les cheveux. Et adopter, pour un temps, la voix de son grand-père. «À la fin de sa vie, il avait cette voix basse qui obligeait les gens à tendre l'oreille s'ils voulaient le comprendre», explique l'acteur qui apprécie ce type d'expériences, «celles où, quand je me regarde dans le miroir, ce n'est pas moi que je vois».

À la tête du Denver Times, où travaille Erik, Rod Lurie avait besoin «d'une figure d'autorité». Alan Alda a accepté la mission d'acculer le journaliste talentueux mais pas allumé au mur. Le vétéran acteur côtoie depuis plusieurs décennies la gent journalistique... qu'il prend avec un grain de sel: «Être cité hors contexte? Nous le sommes tous. Les gens vous enregistrent et extraient trois phrases de l'entrevue pour les fins de leur article», s'amuse-t-il... en jetant un oeil sur les enregistreuses posées devant lui. Sourire espiègle.

Mais ça fait partie du métier. Du sien, qu'il aime et n'est pas près d'abandonner malgré certaines offres que certains jugeraient alléchantes: on lui a récemment proposé de se présenter comme sénateur pour le New Jersey. «J'ai refusé parce que je suis un acteur, pas un politicien. On m'a répondu: Ce n'est pas grave, tu pourrais gagner. Et j'ai encore refusé.» Jouer la politique - son passage dans The West Wing est à ce titre remarquable - est une chose. En faire, est une autre paire de manches. «Mais bien sûr, je ne parle que pour moi quand je dis ça», affirme-t-il. Sourire espiègle. Encore.

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Resurrecting the Champ prend l'affiche vendredi, en anglais seulement. Les frais de voyage ont été payés par Alliance Atlantis Vivafilm.