Pour leur première collaboration, Anaïs Barbeau-Lavalette et Émile Proulx-Cloutier ont suivi, «à hauteur d'enfant», la préparation d'un opéra de Verdi par des jeunes des quartiers défavorisés de Montréal. Les petits géants est présenté en première ce soir, en clôture des 27es RVCQ.

Pendant une année scolaire, Anaïs Barbeau-Lavalette et Émile Proulx-Cloutier ont suivi le quotidien des enfants du quartier Émard, de la Petite Bourgogne et de Saint-Henri, à qui l'on a confié une tâche colossale: préparer pour la fin de l'année un spectacle inspiré d'Un bal masqué (Un ballo in maschera) de Verdi.

«Tout est parti d'un projet de coopération entre le centre-Ouest et l'Opéra de Montréal, monté pour forcer le lien entre l'art et les enfants», dit Anaïs Barbeau-Lavalette.

La maison de production Amérimage-Spectra propose aux jeunes documentaristes de faire un film sur le projet. «On s'est demandé: qu'est-ce qui nous parle, là-dedans? Le rapport au milieu social. On ne présente pas le projet, même si le film lui rend hommage, en filigrane», poursuit Émile Proulx-Cloutier.

Le documentaire s'attache à cinq enfants: Maxime, un jeune garçon qui vit en foyer d'accueil; Partheepan, un enfant ambitieux, premier de classe en français, alors que sa mère ne parle que le tamoul; Éric, élève timide et discret; Jimmy et Pierre-Christopher, qui se découvriront musiciens.

«Ce sont cinq géants qui sont à un âge funambule, entre l'enfance et l'adolescence, observe Anaïs Barbeau-Lavalette. Il n'y a pas de profs ou de psychologues dans le film, tout est montré à hauteur d'enfant.»

Moments privilégiés en coulisses

Avec beaucoup de pudeur, les réalisateurs ont su capter des moments privilégiés dans le processus de création; l'émerveillement, aussi, des enfants qui assistent, des coulisses à une représentation d'Un bal masqué, par l'Opéra de Montréal. Proche des enfants, la caméra recueille leurs émotions avec délicatesse.

«On ne voulait pas que notre regarde «cutifie» les enfants ou tombe dans le misérabilisme. Ce n'est pas toujours un regard flatteur, mais on n'a pas enfoncé le clou. Il n'y a pas de jugements dans ce que l'on voit», estime Anaïs Barbeau-Lavalette. «On avait 120 heures de rush, mais on a fait un montage honnête, respectueux et pudique», renchérit Émile Proulx-Cloutier.

Destiné d'abord à la seule télévision, Les petits géants a été également monté en version longue pour les salles de cinéma. «On se disait: il y a un long métrage à faire», dit Émile Proulx-Cloutier. Les RVCQ ont eu un coup de coeur pour le film, dont la version finale a été terminée il y a quelques jours à peine.

Le film sortira en salle l'automne prochain. D'ici là, les réalisateurs ont mille projets en tête. Ensemble, ils espèrent étendre leur collaboration pour d'autres documentaires. De son côté, Émile Proulx-Cloutier sera sur les planches du nouveau Quat'sous sous la direction de Loui Mauffette en avril. Enfin, Anaïs Barbeau-Lavalette poursuit l'écriture de son deuxième long métrage de fiction, Inch'Allah.

Entre le documentaire et la fiction, la réalisatrice du Ring, Buenos Aires no llores, et Les mains du monde ne compte pas choisir. «Je ne pourrais pas faire de fiction sans documentaire. C'est une appréhension du réel qui donne le droit de cultiver la fiction», estime la jeune femme.

Les petits géants d'Anaïs Barbeau-Lavalette et Émile Proulx-Cloutier est présenté ce soir, à 19h, au cinéma Impérial. La séance est ouverte au public. Infos: www.rvcq.com