Elle a été la reine de la country pop, mais avec son dernier album, Queen of Me, Shania Twain lorgne le titre de reine de la pop tout court. La célébrissime cowgirl canadienne avait envie de danser, raconte-t-elle, à la veille du premier des deux concerts qu’elle donnera au Centre Bell cette année.

« Je n’ai jamais eu autant de plaisir », lance Shania Twain, avec un large sourire dans la voix. Sa tournée marche bien, les foules surpassent ses attentes, son public se diversifie (« Il y a plusieurs générations », se réjouit-elle) et la superstar originaire de l’Ontario a un bonheur fou à chanter.

Son enthousiasme colle tout à fait à l’état d’esprit de Queen of Me, lancé en février, son album le plus pop depuis Up !, au tournant du millénaire. Délaissant les accents country qu’on entendait encore sur Now (2017), elle a opté pour des rythmes dansants et un emballage sonore au goût du jour.

« La racine de toutes mes chansons, c’est toujours moi et ma guitare. Je ne cherche pas à déterminer comment j’ai envie que ça sonne au bout du compte quand j’en suis à cette étape-là », explique d’abord Shania Twain. Ce qui a guidé son écriture, cette fois-ci, ce sont les incertitudes et l’isolement liés à la COVID-19. Et surtout une envie forte de retrouver de la joie et de l’optimisme.

« Toutes les chansons de l’album cherchent délibérément à faire danser. Même la dernière, The Hardest Stone, parle d’optimisme », précise-t-elle, à propos de ce morceau qui parle de faire la paix avec ce qu’on ne peut pas changer. Shania Twain ajoute que l’idée générale qui traverse Queen of Me est de reprendre possession de soi-même. « Je suis la seule responsable de mon état d’esprit, de mes gestes et de la façon dont je m’exprime, dit-elle. Il y a une beauté dans ça aussi. Cette forme d’indépendance m’est très importante. »

Faire son chemin

Sous son emballage pop qu’on peut trouver générique, Queen of Me est, il est vrai, en parfait accord avec ce qui a guidé Shania Twain depuis ses débuts : faire les choses à sa manière. Quitte à déranger ou même à choquer. Not Just a Girl, un documentaire diffusé sur Netflix qui retrace sa carrière et raconte sa lutte contre la maladie de Lyme, rappelle en effet combien ses débuts ont été difficiles.

Shania Twain a considérablement bousculé le monde de la musique country au tournant des années 1990. Se faire prendre au sérieux et être reconnue pour ses talents d’autrice-compositrice-interprète et son intelligence plutôt que pour son physique n’a pas été une mince affaire. Elle le dit plus clairement dans le documentaire que dans son entretien avec La Presse : elle voulait assumer sa féminité et son côté sexy. Par choix. Comme Madonna, Pat Benatar et quelques autres avant elle.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Spectacle de Shania Twain au Centre Bell, en 2004

C’était tellement controversé de dévoiler mon nombril à mes débuts. J’en ris maintenant, mais il y a tellement de gens qui concluaient que c’était la raison pour laquelle les choses marchaient pour moi. Je me disais : ne serait-ce pas merveilleux si mes chansons avaient été écrites par mon nombril. Ce serait une super histoire !

Shania Twain

Ceux qui ne lui posaient pas des questions sur son physique laissaient entendre que son succès était dû au travail de son réalisateur, Robert Mutt Lange, qui a été son mari de 1993 à 2010 et qui avait été aux commandes de disques multimillionnaires d’AC/DC, de Def Leppard et de Bryan Adams. Sans lui donner le mérite qui lui revenait à elle.

Un peu comme Dolly

Des décennies plus tard, Shania Twain s’avoue un peu surprise de la résistance qu’elle a rencontrée en débarquant à Nashville, capitale de la musique country. « J’ai cru qu’on ne me trouverait pas si différente, parce que Dolly Parton était passée par là », explique-t-elle. La reine du country avait en effet passablement bousculé les conventions et affiché ses couleurs dès ses débuts, notamment avec Dumb Blonde, chanson ironique où elle dit en souriant « Cette stupide blonde n’est pas idiote » (« This dumb blonde ain’t nobody’s fool »).

Shania Twain a pensé que la voie était au moins un peu ouverte. Elle se trompait. « J’ai réalisé que ce serait toute une aventure que d’essayer d’être qui j’étais, de mettre en œuvre la vision que j’avais. Je ne parle pas seulement de ce que je voulais écrire, mais de comment je voulais sonner, comment je voulais présenter cet univers et comment je voulais me présenter moi, précise-t-elle. Ç’a été mon combat, là-bas, et ç’a été le sien aussi. »

Extrait de Man ! I Fell Like a Woman !

L’une des clés, selon elle, a été l’humour. Il y avait en effet une touche de malice sur certains de ses plus grands succès des années 1990 comme That Don’t Impress Me Much et Man ! I Feel Like A Woman !. Le clip de cette chanson constituait d’ailleurs un clin d’œil à celui, jugé sexiste, de Robert Palmer pour Addicted to love. Ce côté pétillant, son côté cowgirl power, demeure un élément essentiel de son immense succès. Come on Over s’est vendu à des dizaines de millions d’exemplaires (40, dit-on), ce qui le place parmi les albums les plus vendus, toutes catégories confondues.

On sent moins ce genre de clin d’œil sur les plus récents disques de Shania Twain, mais son envie de s’amuser, elle, demeure présente. Surtout que la chanteuse, dont la voix a été affectée par des complications de la maladie de Lyme, se sent mieux que jamais. « Je trouve que je sonne plus sexy, parce que j’ai quelque chose d’un peu plus grave dans la voix maintenant, dit-elle. Je suis vraiment heureuse et à l’aise avec ma voix. »

Dimanche, 19 h 30, au Centre Bell. Aussi le 25 octobre, 19 h 30, au Centre Bell.

Consultez le site de l’artiste (en anglais)