Quatre chefs-d’œuvre du dernier romantisme allemand transfigurés par la direction de Jakub Hrůša.

À 41 ans, le Tchèque Jakub Hrůša (prononcer « Roucha ») n’a pas fini de faire parler de lui. Élève de Jiří Běholávek à Prague, il deviendra directeur musical du Royal Opera House de Londres en 2025. En attendant, il poursuit sa féconde association avec l’Orchestre symphonique de Bamberg, entamée en 2016.

Bamberg, une bourgade bavaroise aussi peuplée que Drummondville, compte un orchestre de renom, formé au sortir de la Deuxième Guerre mondiale par des musiciens allemands ayant fui la Tchécoslovaquie. Son premier chef fut le grand wagnérien Joseph Keilberth, suivi de nul autre que Eugen Jochum et – brièvement avant sa mort précoce – István Kertész.

Après plusieurs disques primés, l’orchestre sort Liebestod chez Accentus, un bouleversant programme Wagner-Mahler-Strauss enregistré l’été dernier. Le titre (« Mort d’amour ») est illustré par une sublime composition abstraite du peintre Dieter Ladewig. 

Pour le chef, la mort n’est pas qu’un moment tragique, mais aussi « qui donne une signification à nos vies ». C’est pour cette raison que le disque se termine par Mort et transfiguration de Richard Strauss, dont le chef fouille patiemment les ténèbres jusqu’à la lumière finale, apaisée.

Mais c’est le Prélude et le Liebestod de Wagner qui ouvrent le programme, dans une lenteur habitée où le frémissement des cordes se mêle à des vagues inexorables qui montent des profondeurs de l’orchestre. 

Entre les deux, Totenfeier (qui allait ensuite devenir le premier mouvement de la Symphonie no 2) et l’Adagietto de la Symphonie no 5 de Mahler. 

Le premier est un grand voyage dans d’inexorables noirceurs où Hrůša nous guide d’une main sûre. Le second, une immense caresse, un poème d’amour susurré par les cordes magnifiques de Bamberg. Le chef prend une minute de plus que Rafael Payare dans son dernier disque, et cela fait toute la différence en donnant le temps à la musique de respirer.

Un grand disque.

Extrait de Prelude

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Liebestod

Musique classique

Liebestod

Jakub Hrůša

Accentus

9/10