Une très belle surprise que ce premier recueil de nouvelles signé par Alec Serra-Wagneur.

Il s’est fait connaître comme acteur sur les planches (Hiver, Théâtre Prospero), et son texte L’enfouissement avait été retenu pour le Prix de la nouvelle de Radio-Canada, en 2020. Mais Le silence des braises est la première incursion officielle du jeune auteur dans le monde littéraire, et force est de constater qu’il s’agit là d’un effort très probant et prometteur.

L’écriture de nouvelles est un art en soi et Serra-Wagneur sait camper en quelques lignes lieux, personnages et ambiances. Il nous entraîne chaque fois dans des récits intimistes aux montées dramatiques finement maîtrisées. Sa plume habile sait peindre sans tomber dans l’hyperbole de magnifiques paysages et panoramas, de la Jamésie à la Haute-Mauricie en passant par la sauvage Warren Island, au large du Maine, ou le parc provincial de Prudhomme Lake, en Colombie-Britannique.

La métaphore des braises, ce feu ardent qui sommeille, parfois presque éteint, mais pas mort, est le fil conducteur de ces nouvelles. Elles présentent toutes des personnages qui portent en eux une faille, une solitude, un mal-être, dans un rapport intime à la nature, et plus particulièrement à la forêt, omniprésente et personnage central, au bout du compte, de ce recueil – on n’est pas étonné de lire dans la bio de l’auteur qu’il a notamment parcouru la Superior Hiking Trail, au Minnesota, et la Long Trail, au Vermont.

La nature-refuge, où on vient s’isoler de la bêtise des hommes et de la folie du monde ; la nature-sanctuaire, où on vient panser des blessures profondes et, peut-être, arriver à les guérir ; la nature-aventure, où l’homme se mesure à la force des éléments, en mode survie, et va au bout de lui-même pour mieux se retrouver (ou se perdre) ; la nature sauvage, impétueuse, parfois dangereuse, qui avalera ceux qui n’y prennent garde. Sous la canopée, ce feu endormi pourra trouver l’air pour se remettre à pulser et à brûler, tel un cœur qui sort d’une longue hibernation.

« Quand tu auras retrouvé dans les bois cette chose ancienne qui t’habite [...] tu auras compris comment aviver les braises qui crépitent au fond de ta tête. » D’une grande sensibilité.

Le silence des braises

Le silence des braises

Les éditions de la maison en feu

168 pages

8,5/10