Toute sa vie durant, un musicien cherche à définir un peu plus son identité, à comprendre son rôle dans l'univers musical, m'explique Brian Fallon, joint chez lui, dans le New Jersey. Son groupe, The Gaslight Anthem, vient justement de faire un pas de géant en ce sens avec son troisième album, American Slang.

The Gaslight Anthem était déjà un groupe à suivre quand il s'est produit à La Tulipe en mars 2009. La presse rock internationale avait souligné l'énergie, la puissance et l'authenticité de ce rock qui puisait dans les grands mythes de la culture populaire américaine. Dans ses textes, Brian Fallon faisait volontiers référence à Elvis, à Tom Petty et surtout à Springsteen, avec qui il a chanté No Surrender devant une mer de monde, à Londres, il y a un an.

Dans son tout récent album, American Slang, The Gaslight Anthem s'affranchit de plus en plus de ces influences assumées et trouve sa propre voix. Le chanteur et guitariste Fallon estime que, à partir d'éléments qu'il possédaient déjà, le groupe a créé une musique différente de celle qu'il faisait et de ce qu'on entend ailleurs. The Gaslight Anthem, ajoute-t-il, a gagné en finesse, un mot qu'on ne trouve pas souvent dans le vocabulaire des groupes issus du courant punk/hardcore.

«Je ne me plie pas aux règles du punk rock, se défend Fallon. J'aime cette musique et nous venons d'une scène musicale qui a beaucoup à voir avec le punk rock, mais je ne vois pas la nécessité de me conformer à quelque courant que ce soit.»

Ni riche ni pauvre

Fallon ne comprend pas non plus ce que signifie l'expression «rock col bleu» qu'on lui accole souvent: «Nous n'avons jamais eu à quêter dans la rue, mais il y a eu des moments où nous n'avions pas d'argent et où nos parents étaient en chômage. Nous sommes de l'Amérique normale, beaucoup plus commune chez nous que les très riches ou les très pauvres. On n'est pas assez pauvres pour nous plaindre, mais pas assez riches pour subvenir à nos besoins. C'est une situation un peu étrange.»

Tant qu'à y être, Fallon en profite pour nier le penchant pour la nostalgie qu'on attribue à The Gaslight Anthem, sans doute à cause de son deuxième album, The '59 Sound: «Ça m'énerve quand on dit que nous conduisons des Cadillac des années 50. Je ne sais pas d'où ça vient, je n'ai même pas de voiture! Et je n'ai pas de fixation sur le passé. J'ai même une chanson qui dit: «Ne me chantez pas une chanson qui parle du bon vieux temps!»»

Ce qui ne change pas, toutefois, c'est la passion de la musique qui anime Fallon et ses copains, qui se manifeste par des références au blues ou à la soul de Motown dans les textes de leurs chansons. Pour eux comme pour Springsteen, leur aîné du New Jersey, la musique est un baume, un refuge, une voie vers la rédemption.

«J'ai découvert la musique quand j'étais enfant, quand ma mère faisait jouer la radio dans la voiture, se souvient Fallon. C'est là que j'ai entendu Dylan la première fois. Aux États-Unis, la musique fait vraiment partie du tissu social. Ça va avec la distance, je crois: tout le monde conduit une voiture. Qu'est-ce que tu fais quand tu fais une heure de route pour aller travailler? Tu écoutes la radio.»

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The Gaslight Anthem au festival Osheaga, le dimanche 1er août.