Le Musée d'art contemporain présente une vingtaine de tableaux du peintre montréalais Étienne Zack jusqu'au 25 avril. Ce lauréat des prix Pierre-Ayot (2008) et RBC (2005) a déjà exposé ses oeuvres à Londres, à Madrid et à Bergen. La Presse l'a rencontré récemment.

Étienne Zack est aux anges. Sa jeune carrière a déjà été récompensée deux fois. Le peintre montréalais, qui a étudié au Emily Carr Institute of Art and Design de Vancouver, vit sa première exposition solo au Musée d'art contemporain à Montréal. Dans la grande salle du MAC, son oeuvre explose littéralement. Notamment, deux grands formats réalisés pour cette occasion.

 

La peinture de Zack part de l'acte de peindre. Elle décrit les matériaux et les lieux de l'artiste, mais derrière cette apparence de simplicité, son oeuvre expose des «natures mortes» très vivantes. Très réfléchie, son utilisation de la perspective, notamment, amène le regard vers un deuxième degré de lecture, voire souvent trois ou quatre. Son travail, on le comprendra, prend du temps.

«Je ne peins pas si je n'ai pas d'idée, dit-il. Ça commence dans ma tête et ça peut prendre un ou deux mois avant que tout retombe en sédiments. Je construis les images comme ça. L'autre questionnement, c'est la déconstruction de la peinture elle-même. Ça arrive en fragments et c'est comme ça que je peins aussi. Avec des choses très proches de moi, mais aussi des métaphores plus grandes.»

Convergence, divergence. Immobilité, mouvement. Fini et infini. Ce jeu constant entre les opposés, les contraires, les compléments aussi, fait de ses tableaux des univers complets en soi. Un monde de mystère et de mystification, mais qui préfère le ludique à l'intellectualisme. L'atelier du peintre sert bien souvent de décor, de point d'ancrage à son imaginaire libre et illimité. Il dit être un peintre «d'atelier» comme certains musiciens se disent de «studio».

«Je me demande souvent si je pourrais m'y rendre et m'y enfermer en attendant que le monde me nourrisse, note-t-il. Être en atelier, ça veut aussi dire passer beaucoup de temps «au bureau» et ça me fait me remettre en question.»

Ses tableaux utilisent donc le temps pour se complexifier. Mais dans cet univers autosuffisant, on ne saurait déceler la première inspiration de la dernière. C'est parce qu'il transpose dans l'espace le temps que peut nécessiter la création du tableau.

«L'espace est tordu pour donner une idée plus globale de ce qui se passe, décrit-il. Un peu comme les peintres cubistes faisaient, ou plutôt les muralistes mexicains. Mais ça me prend de plus en plus de temps pour faire un tableau. Entre ma mémoire et le moment où je fais une touche sur la toile, c'est ce temps-là qui m'intéresse. Il se compresse et s'étire.»

Formation

Étienne Zack transpose également sa formation de peintre sur la toile: «Je me suis toujours questionné beaucoup sur la peinture. Pollock, par exemple, je l'utilise parfois comme symbole, parfois avec ironie. Moi, au contraire, j'ai eu une formation plus féministe.»

La figure humaine, pourtant, apparaît rarement dans ses oeuvres, mais les matériaux nobles, comme le bois, y sont omniprésents. «Le bois est un excellent support. C'est un bon matériau pour construire et déconstruire mes blocs d'idées», croit-il.

Enfin, l'humour est quelque chose d'important dans son travail, dans sa façon de creuser le réel, de le magnifier ou de le détourner. C'est une façon, peut-être aussi, de rester humble face à l'acte artistique. «Est-ce qu'on crée vraiment ou ne fait-on que des mimiques?» se demande-t-il.

Il aime se situer entre le grand art et ce qu'il appelle le bric-à-brac. Étienne Zack se pose constamment des questions en peignant. Avant, pendant et après le geste créatif, ce qui donne des instantanés d'irréels possibles. «Mes peintures deviennent les seuls documents de choses qui n'existent pas vraiment», conclut-il.

Étienne Zack, au Musée d'art contemporain jusqu'au 25 avril.