Réglons d’emblée la question : non, toutes les drags ne sont pas gaies. Et tout le monde peut aussi faire de la drag, quelle que soit son orientation. Rita Baga, et son créateur Jean-François Guevremont, qui a présenté plus de 100 fois son one-drag show Créature, qu’on a vue entre autres à Canada’s Drag Race et Big Brother Célébrités, répond à vos questions.

« Bonjour, j’aimerais savoir si toutes les drags sont homosexuelles. Et à quel âge avez-vous pensé devenir drag ? » – Michelle Piché

« Non, toutes les drags ne le sont pas. Il ne faut pas présumer de l’orientation sexuelle d’une personne. Tout le monde peut faire de la drag, peu importe son identité de genre ou son orientation sexuelle. C’est plus fréquent de faire partie de la diversité sexuelle et de genre et de pratiquer ce métier-là, mais il y a des hétérosexuels, des pansexuels, des bisexuels, des asexuels qui pratiquent le métier et on ne peut pas le savoir ! Je n’ai jamais pensé devenir drag, en fait, j’avais des amis qui pratiquaient ce métier, et je n’avais aucune attirance envers la chose. Il y a fallu que je me prête au jeu à l’âge de 19 ans pour réaliser que c’était vraiment quelque chose qui rassemblait plein de disciplines artistiques que j’appréciais (incarner un personnage, la danse, le chant, le théâtre, la comédie). On dirait qu’il fallait que je le vive pour faire le constat que, finalement, c’est fantastique, ce métier-là ! »

« Êtes-vous tanné des fois d’être obligé de vous transformer en votre personnage pour passer à la télévision ? » – Richard Salera

« Non. Et c’est toujours complexe de répondre à ça parce que ce qui peut être, disons tannant ou un peu fatigant, c’est le temps de préparation. C’est certain que si je compare avec d’autres artistes sur un plateau, la préparation n’est pas du tout la même. Je n’arrive pas 30 minutes avant l’enregistrement pour m’asseoir sur une chaise et me faire maquiller, et voilà, c’est réglé. Ça me prend 90 minutes juste le maquillage. Et avant ça, il y a la recherche de costumes, parfois il faut faire faire des accessoires et des perruques. Et comme j’en fais de plus en plus, je veux m’assurer de ne pas reporter quelque chose que j’ai déjà porté, donc ça devient un peu complexe ! […] C’est certain que si je pouvais claquer des doigts et c’était fait, ce serait l’idéal. Surtout si c’est tôt le matin, quand on est convoqué à 9 h sur un plateau, cela implique que je doive me préparer trois heures avant. […] Mais la transformation, c’est aussi le moteur qui fait que je suis capable de livrer une performance. C’est ce qui me donne la confiance manquante pour me prêter à l’exercice. »

« Vous devez dépenser des fortunes pour les costumes. J’aimerais savoir le pourcentage que représente ce coût des costumes comparativement à votre salaire annuel. Dépensez-vous 40 % du salaire en costumes, par exemple, comparativement aux autres artistes ? » – Gilles Rondeau

« C’est très difficile à calculer parce que parfois, pour des productions de télévision, on a des budgets pour ça, négociés en amont. Mais la plupart du temps, on n’en a pas. […] Une approximation très générale, je crois que c’est 25 %, je ne sais pas si ma comptable serait d’accord, mais je crois que c’est 25 % ! »

« Avez-vous déjà pensé rendre votre physique un peu plus féminin ou ce ne serait d’aucune utilité pour votre personnage ? » – Allan Moris

« Ça dépend de ce qu’on entend par “un peu plus féminin”. Je change ma silhouette chaque fois que je suis en drag, dans le fond, je porte des bourrures à la poitrine et aux hanches, pour me faire une silhouette de ce qu’on convient comme étant plus féminin, sans tomber nécessairement dans la grande caricature. Ça m’embête un peu de répondre à cette question, parce que qu’est-ce que la féminité, finalement ? Tous les corps sont différents ! »

« Passez-vous plus de temps en drag qu’en homme, dans une journée/une année ? Comment réussissez-vous à vivre avec les deux univers, au quotidien ? » – Thérèse Fournier

Non, je ne passe pas plus de temps en drag, par contre j’ai des rushs, des périodes plus occupées, où là, oui. Par exemple, lorsqu’on tournait La drag en moi (Crave), c’était des journées de 12 heures de travail, je me levais, je buvais un café, puis je commençais. Le soir, j’étais très fatigué, donc je me démaquillais, je mangeais et j’allais me coucher. Dans ces moments de rush oui, j’étais plus souvent en drag. Mais sinon, normalement, il y a une assez bonne balance, un bon équilibre. Ça prend des périodes d’accalmie où je donne une pause au visage et au corps, où je me recharge, c’est important de se laisser du temps de repos. Quand je suis en drag, c’est pour le travail, alors on planifie les journées en conséquence. Je suis aussi entrepreneur, donc il y a un gros côté où je ne suis pas en drag, je suis dans la planification, l’organisation d’évènements, la gérance d’autres artistes. Donc il y a vraiment un équilibre entre la vie de bureau et la vie sur scène. »