(Ottawa) Le géant du web Google a plaidé mardi que le projet de loi C-18 entraînerait une prolifération de la désinformation et rendrait plus difficile l’accès à du contenu médiatique fiable.

« C-18 définit les entreprises de presse admissibles de façon extrêmement vaste et les éditeurs ne sont pas requis de répondre à des standards journalistiques de base », a dit Colin McKay, chef des politiques publiques et des relations gouvernementales pour Google Canada.

Ce dernier a taillé en pièces, en témoignant au comité du patrimoine de la Chambre des communes, le projet de loi visant à forcer les plateformes numériques à payer pour le partage de contenus produits par des médias d’information.

« Cela va mener à la propagation de désinformation et de contenus servant seulement à générer des clics (“click bates”) », a ajouté M. McKay.

Des membres du comité ont paru sceptiques face à cette affirmation. Le bloquiste Martin Champoux a laissé entendre que Google répandait lui-même de la désinformation sur le projet de loi C-18.

Il a mentionné que la façon dont un sondage commandé par l’entreprise a été mené le laissait perplexe, notamment le fait que les résultats indiquent que les Canadiens ne souhaitent pas devoir payer pour accéder à du contenu relayé par Google.

« C’est quoi la question que vous avez posée aux Canadiens […] pour leur laisser croire qu’il y aurait des frais à payer de leur part […] ? J’essaie de comprendre parce que vous dites que vous voulez contrer la désinformation [et], pour moi, il y a comme une dichotomie », a lancé M. Champoux.

M. McKay a répondu qu’il n’avait pas la formulation de la question sous la main, mais que cette information pourra être fournie au comité après coup.

« Nous aurions vraiment besoin de cette information. Nous devons tous, chacun de nous, combattre la désinformation », a renchéri le néo-démocrate Peter Julian. Il a dit avoir été et « perturbé » par la façon dont Google a présenté le sondage qu’il a commandé à la firme Abacus Data.

M. McKay a aussi mentionné d’autres préoccupations quant au projet de loi C-18, comme celle que les plateformes ne pourraient pas désavantager certains médias dans le partage de contenus sur la base que leurs articles sont jugés comme étant moins fiables.

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Brian Myles, directeur du quotidien Le Devoir

D’autres témoins comparaissant mardi ont plutôt vanté les bienfaits qu’aura selon eux le projet de loi s’il en vient à être adopté.

Le directeur du quotidien « Le Devoir », Brian Myles, a affirmé que « la force de frappe » des réseaux tels que Facebook ou Google est nécessaire pour tout média qui mise sur les revenus d’abonnements.

« Ils rendent possible la découvrabilité de nos contenus et nous permettent d’élargir la base d’utilisateurs et potentiellement de les convertir en abonnés », a-t-il soutenu.

Le comité du patrimoine étudie le projet de loi C-18, qui vise à obliger des plateformes - principalement Google et Facebook - à conclure des ententes d’indemnisation avec les entreprises de presse. Plusieurs médias ont déjà conclu des ententes avec des géants du web. C’est le cas du « Devoir », comme l’a rappelé M. Myles en soulignant que cela n’empêchait pas l’équipe du quotidien de soutenir le projet de loi C-18.

Des représentants de petites entreprises de presse avaient précédemment défendu le C-18, affirmant que toute négociation passe dans leur cas par la négociation collective.

Dans une déclaration écrite transmise en soirée, l’attachée de presse du ministre du Patrimoine Pablo Rodriguez, Laura Scaffidi, a fait valoir qu’« une presse libre et indépendante est le meilleur rempart contre la désinformation. Avec C-18, les Canadiens auront accès à plus des nouvelles de qualité, fondées sur des faits, tant locales que nationales ».