Le marathon politique italien du week-end, en vue d'annoncer rapidement la nomination du nouveau premier ministre Mario Monti, n'a pas donné les résultats escomptés. Peu rassurés, tous les marchés européens ont clôturé la séance d'hier avec des pertes de plus de 1%, à l'exception des Bourses de Londres et de Zurich qui ont respectivement perdu 0,46% et gagné 0,14%.

La journée avait pourtant bien commencé avec les Bourses de Londres et de Milan qui annonçaient des gains de près de 1%.

La nomination in extremis de Mario Monti comme premier ministre italien n'a pas réussi à dégager, même minimalement, l'incertitude qui plane toujours sur la solvabilité du pays et de celle nombreux autres pays européens.

À preuve, l'Italie a mis aux enchères hier matin pour 4 milliards de titres portant échéance sur cinq ans et a obtenu un taux de 6,29%, le plus haut niveau jamais payé depuis juin 1997.

Si les marchés financiers ont forcé le départ de Silvio Berlsusconi, ils ne sont pas encore convaincus que l'Italie pourra s'en sortir et encore moins selon un échéancier prévisible.

Les problèmes d'endettement du gouvernement italien ne sont pas les seuls qui préoccupent les marchés.

La Banque UniCredit, plus grosse banque d'Italie, a dévoilé dans la foulée hier une perte trimestrielle de 10,6 milliards d'euros, la suppression de 6150 emplois - dont 5000 en Italie - et un nouveau financement public de quelque 7,5 milliards d'euros (10,3 milliards US).

La banque italienne, née de la fusion au cours des dernières années d'une constellation de banques européennes et qui est présente aujourd'hui dans 22 pays, doit refaire sa base de capital après avoir perdu près de la moitié de sa valeur boursière au cours de l'année.

L'action a perdu dans la seule journée d'hier 5,7% de sa valeur pour tomber à 0,78 euro.

Selon l'agence de presse financière Bloomberg, UniCredit doit rehausser à 9% sa base de capitaux propres d'ici le 30 juin, après avoir radié la valeur de ses prêts souverains à risque. La banque détient notamment 38 milliards d'euros de Bons du trésor italien.

La Banque Royale du Canada fait partie du syndicat bancaire international qui agira comme preneur ferme de la nouvelle émission d'actions de 10,2 milliards US.

Paola Di Raimondo, directrice des relations de la banque UniCredit avec les médias internationaux, a confié à La Presse que la journée avait été longue. «Mais il fallait faire ces annonces. On traverse une époque difficile en Italie et difficile en Europe, mais il va falloir passer au travers», a-t-elle soupiré.

D'autres perturbations à venir

Tous les analystes s'entendent pour dire que d'autres perturbations sont à prévoir dans les prochains mois en Italie et ailleurs en Europe. La formation d'un gouvernement technique en Italie ne suffira pas à elle seule à solutionner la crise budgétaire italienne.

«Personne ne peut prédire à quel moment l'Italie sortira de la crise, mais il serait utopique de penser que les choses vont aller mieux avant le printemps 2013», estime Mascia Bedendo, professeur de Finance à la Bocconi School of Management de Milan.

«On prévoit une croissance économique encore faible cette année en Italie, de 0,3% selon les dernières prévisions du FMI (Fonds monétaire international), et c'est avec de la croissance que le pays pourra progressivement s'en sortir», observe la professeure.

C'est pourquoi, selon elle, le nouveau premier ministre Monti va devoir s'attaquer en priorité à mettre en place des mesures de stimulation de la croissance. «C'est la priorité, avec la révision du système de pension étatique qui est un véritable gouffre financier pour l'Italie.»

Parmi tous les facteurs d'incertitude, la cohabitation d'un gouvernement technique et du Parlement italien sera étroitement surveillée au cours des prochains mois.

«Tout le monde est de bonne volonté, mais il faudra voir comment le Parlement va accepter la gestion du programme d'austérité», appréhende Mme Bedendo.

Détermination

Mario Monti, qui était jusqu'à récemment le président de l'Université où elle enseigne, est tout désigné selon elle pour faire avancer les choses.

«Il n'est pas politique pour un sou. Il a une réputation sans faille. Même s'il est très réservé, c'est un homme déterminé.»

Chose certaine, le climat d'incertitude est maintenu à un niveau très élevé au sein du gouvernement italien, personne ne voulant commenter la façon dont s'effectuera la transition à un nouveau cabinet.

«On est entre deux situations. On ne peut rien commenter. Il va falloir attendre», s'excuse Giovani Chiroui, à la direction des communications du ministère des Finances.

M. Chiroui ne sait toujours pas qui sera son prochain patron. C'est la question que se pose aussi une majorité d'Européens.