Les indicateurs de rentabilité sont au rouge chez Transat, alors que le spécialiste du voyage d’agrément bat de l’aile sur plusieurs fronts. Ce n’est pas facile, reconnaît sa présidente et cheffe de la direction, Annick Guérard.

« C’est une année remplie de défis, a-t-elle laissé tomber, jeudi, en conférence téléphonique avec les analystes pour discuter des résultats du deuxième trimestre. Nous sommes confrontés à des éléments qui échappent à notre contrôle, mais [ailleurs], on peut faire une différence. »

La société mère d’Air Transat avait prévenu, le 10 mai dernier, que la pression sur les prix des billets, les turbulences syndicales et des avions cloués au sol en raison de problèmes de moteurs allaient lui couper les ailes.

Malgré une augmentation de ses revenus, l’entreprise québécoise a creusé sa perte nette pendant les mois de février, mars et avril. Les revenus aériens unitaires – un indicateur clé de la performance dans l’industrie aérienne – se sont contractés de 7,5 % pendant le deuxième trimestre.

Cette performance est en partie attribuable à la pression sur les prix des billets, selon Transat. Les voyageurs ont toujours le goût d’escapades à l’étranger, mais ils sont de plus en plus nombreux à y réfléchir à deux fois avant de délier les cordons de leur bourse.

Les Canadiens continuent à ressentir l’impact de l’inflation et des taux d’intérêt élevés.

Annick Guérard., présidente et cheffe de la direction de Transat

« Certains repoussent leurs dépenses. Il y a eu une augmentation significative de la capacité [dans l’industrie]. La demande est là, mais le taux de croissance n’est pas aussi vigoureux que l’an dernier », a affirmé Mme Guérard.

Transat prévoyait initialement bonifier sa capacité de 19 % cette année. Après avoir abaissé sa cible à 13 %, la compagnie à l’étoile bleue la fixe maintenant à 11 %. En vue de la saison estivale, le coefficient d’occupation de ses avions est actuellement inférieur de 2,1 points de pourcentage par rapport à la même période il y a un an.

De leur côté, les revenus aériens unitaires sont en baisse de 8 %.

Année mouvementée

Les derniers mois ont été turbulents pour le transporteur aérien et voyagiste.

Après le spectre d’une grève de ses 2100 agents de bord, Transat voit plusieurs de ses Airbus A321LR – l’appareil monocouloir au cœur de sa stratégie – cloués au sol en raison de l’usure prématurée des moteurs construits par Pratt & Whitney.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Annick Guérard est présidente et cheffe de la direction de Transat.

Plusieurs transporteurs aériens sont touchés par cette problématique. Certaines pièces des PW1100G-JM ont été fabriquées avec de la poudre de métal contaminée susceptible de provoquer des fissures. Quatre des 16 A321LR de Transat sont actuellement coincés à l’atelier pour cette raison. Ce nombre devrait grimper à six plus tard cette année et passer à huit en 2025.

L’entreprise a loué trois A330 pour atténuer les secousses, mais cela fait grimper ses coûts. Elle attend aussi la livraison de trois autres A321LR d’ici l’été.

« La stabilisation de la demande par rapport à sa vigueur insoutenable (à notre avis) de l’an dernier semble survenir plus rapidement que prévu, souligne l’analyste Tim James, de la Banque TD. La disponibilité des moteurs accroît les inefficacités et la concurrence, un autre vent de face. »

Plus de temps

Par ailleurs, en attendant de trouver une manière de refinancer sa lourde dette, Transat a été en mesure d’obtenir un peu de répit au terme de négociations avec le gouvernement fédéral, qui lui avait prêté plusieurs centaines de millions en 2021 pour l’aider à passer au travers de la pandémie de COVID-19

L’entreprise aura jusqu’en février prochain – dix mois de plus – pour rembourser une dette de 91 millions. La compagnie a aussi remboursé un autre prêt de 36 millions pendant le deuxième trimestre.

Nous discutons avec notre principal créancier, le gouvernement [fédéral], et nous sommes convaincus que nous mettrons en place un plan de refinancement bénéfique pour l’entreprise.

Jean-François Pruneau, chef de la direction financière de Transat

À la Financière Banque Nationale, l’analyste Cameron Doerksen estime que ce plan risque de se traduire par une émission de titres, ce qui pourrait entraîner « un effet dilutif important » pour les actionnaires existants du transporteur aérien et voyagiste.

Jeudi, à la Bourse de Toronto, l’action de Transat reculait de trois cents, ou près de 4 %, pour se négocier à 2,90 $.

En savoir plus
  • 1,9 milliard
    Dette nette de Transat en date du 30 avril dernier
    Source : Transat
  • 43
    Nombre d’appareils dans la flotte de Transat
    Source : Transat