Air Canada n’a pas seulement les yeux rivés sur la demande pour les billets d’avion par les temps qui courent. Le plus important transporteur au pays doit aussi s’entendre avec ses 5000 pilotes, qui exigent un important rééquilibrage par rapport à leurs confrères américains.

Le troisième trimestre – qui coïncidait avec la saison estivale – terminé le 30 septembre dernier s’est soldé par une augmentation de 17 % des salaires en raison d’une augmentation de l’effectif global. Ce poste de dépense est appelé à croître avec les demandes des pilotes. En conférence avec les analystes financiers pour commenter la performance des mois de juillet, août et septembre, lundi, le président et chef de la direction d’Air Canada, Michael Rousseau, s’est montré réticent à commenter l’état des négociations avec l’Association des pilotes de ligne (ALPA).

« WestJet a conclu une entente plus tôt cette année et cela correspondait à nos attentes, a-t-il dit, lorsqu’interrogé par un analyste. Je crois que c’est le plus loin que nous pouvons aller. »

Annoncé en mai dernier, l’accord intervenu entre le transporteur albertain et les syndiqués prévoit des augmentations de 24 % échelonnées sur quatre ans. L’ALPA estime qu’Air Canada joue dans la cour des grands, aux côtés de Delta Air Lines, United Airlines et American Airlines. Les hausses consenties aux pilotes de ces trois compagnies américaines variaient entre 34 et 40 % sur quatre ans.

L’ALPA n’a pas chiffré ses demandes dans le cadre des pourparlers avec Air Canada, mais il est permis de croire que ce qui a été annoncé au sud de la frontière constitue un point de départ.

En négociation

Il y a un mois que le contrat de travail des 5000 pilotes d’Air Canada est venu à échéance. À l’aéroport Montréal-Trudeau, lundi matin, quelque 230 membres de l’ALPA – des pilotes d’Air Canada appuyés par des collèges d’autres compagnies – ont manifesté pour accroître la pression à l’endroit de la compagnie établie dans la métropole. Des rassemblements similaires ont également eu lieu aux aéroports Pearson (Toronto) et de Calgary depuis un mois.

PHOTO FOURNIE PAR L’ALPA

Des membres de l’ALPA, qui représente les pilotes d’Air Canada, manifestent à l’aéroport Montréal-Trudeau.

« Air Canada a pu profiter du contrat [de travail] de 10 ans que nous avions conclu et qui nous a placés à la traîne dans l’industrie, a expliqué à La Presse Hugo Desrochers, pilote pour Air Canada et vice-président du conseil local montréalais pour l’ALPA. Il est temps de réduire le fossé avec nos confrères américains. »

Les pilotes du transporteur canadien ont obtenu une hausse de salaire annuelle de 2 % au cours de la dernière décennie. De plus, les plus récents résultats trimestriels de la compagnie aérienne démontrent qu’elle s’est relevée de la pandémie, affirme M. Desrochers. Il ajoute qu’au plus fort de la crise sanitaire, les pilotes d’Air Canada ont aussi apporté leur contribution en « baissant [leurs] salaires. »

Les discussions entre l’ALPA et l’employeur se poursuivent. Avec les analystes financiers, M. Rousseau a souligné qu’il était difficile de s’avancer sur un moment où un accord pourrait intervenir.

Une demande vigoureuse

Chose certaine, le contexte actuel risque de jouer en faveur du syndicat. Après un été vigoureux, les consommateurs semblent toujours prêts à dépenser pour voyager en dépit de l’augmentation des taux d’intérêt et du ralentissement économique.

« Les réservations correspondent aux attentes, a souligné le vice-président de la planification du réseau chez Air Canada, Mark Galardo. Nous n’entrevoyons pas de ralentissement majeur en ce moment. La demande est forte dans presque tous les segments et les régions où nous sommes présents. »

En plus de livrer des résultats supérieurs aux attentes des analystes au troisième trimestre, Air Canada a laissé entendre que la performance devrait également être au rendez-vous pendant les mois d’octobre, novembre et décembre. Sa haute direction s’attend à atteindre la « partie supérieure » de sa fourchette de prévisions pour l’exercice en cours.

Le bénéfice d’exploitation ajusté devrait ainsi frôler les 4 milliards.

« Malgré les préoccupations du marché concernant l’incertitude économique, l’intensification de la concurrence (principalement sur le marché intérieur) et l’augmentation des prix du carburant, nous estimons que les conditions de marché (une demande vigoureuse alors que la capacité reste limitée dans l’industrie) se maintiendront », croit l’analyste Cameron Doerksen, de la Financière Banque Nationale.

La performance trimestrielle de la compagnie aérienne ne semblait toutefois pas convaincre les investisseurs. Lundi, à la Bourse de Toronto, son action a retraité de 1,3 %, ou 22 cents, pour clôturer à 16,50 $.

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  • 90 %
    Coefficient d’occupation des avions d’Air Canada au troisième trimestre
    source : Air Canada