(Ottawa) Le Bureau de la concurrence n’aura pas une nouvelle chance d’empêcher Rogers Communications d’acquérir Shaw Communications, a statué mardi la Cour d’appel fédérale.

La Cour d’appel fédérale rejette la contestation du Bureau de la concurrence entourant la fusion de Rogers et Shaw, une opération évaluée à 26 milliards de dollars (dette de 6 milliards comprise).

La décision a été rendue séance tenante mardi lors d’une audience à Ottawa. Le juge David Stratas a déterminé que les arguments du Bureau de la concurrence n’étaient pas suffisants pour annuler la décision prise en décembre par le Tribunal de la concurrence, qui avait approuvé le mariage entre les deux groupes de télécommunications.

« Il ne suffit pas de tirer sur les feuilles et les branches et de laisser l’arbre debout, c’est plutôt l’arbre entier qui doit tomber », a-t-il déclaré dans sa décision rendue sans délibéré, avant même que les entreprises concernées n’aient donné leur réponse.

Le Tribunal de la concurrence a clairement indiqué que la transaction n’empêcherait ou ne réduirait probablement pas considérablement la concurrence, et sa décision était étayée par de nombreuses preuves, a affirmé le juge Stratas.

Même si le Tribunal de la concurrence s’était trompé sur les points de droit étroits que le commissaire soulève maintenant devant cette cour, nous ne sommes pas convaincus que le résultat serait différent. Il est donc inutile de renvoyer cette affaire au Tribunal de la concurrence.

Le juge David Stratas

En réaction, l’action de Rogers a clôturé la séance de mardi en hausse de 3 %, à 66,49 $, à la Bourse de Toronto. Celle de Shaw a gagné 3 %, à 39,50 $, tandis que le titre de Québecor s’est apprécié de 1 %, à 31,52 $.

Selon l’entente de fusion dévoilée en mars 2021, Rogers offre 40,50 $ par action aux actionnaires de Shaw.

Points soulevés

Le Bureau de la concurrence espérait infirmer la décision du Tribunal de la concurrence qui avait ouvert la voie au projet de fusion, le 29 décembre, en rendant une décision favorable à la transaction.

Les arguments du Bureau se concentraient sur ce qu’il considérait être quatre erreurs juridiques clés au sujet du rôle de la proposition de vente de l’opérateur sans fil de Shaw, Freedom Mobile, à Vidéotron dans la décision du tribunal.

Certains des points soulevés par le Bureau de la concurrence ont été contestés en tant que combinaison de questions de fait et de droit, tandis que la Cour d’appel ne peut examiner que des questions de droit, a souligné le juge Stratas.

Le commissaire semble nous inviter à réévaluer les preuves, ce que nous ne pouvons pas faire.

Le juge David Stratas

Le Tribunal de la concurrence estime que la vente proposée de Freedom Mobile à Vidéotron (Québecor) serait suffisante pour garantir que la concurrence ne soit pas considérablement réduite et que la transaction n’entraînerait probablement pas une hausse des prix pour les clients sans fil.

La vente de Freedom à Québecor au prix de 2,9 milliards avait été proposée l’année dernière par Rogers et Shaw pour apaiser les craintes sur la concurrence concernant leur projet de fusion.

Pour se concrétiser, la transaction doit toujours être approuvée par le ministre canadien de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne.

Le ministre avait imposé en octobre dernier des conditions que Québecor avait aussitôt acceptées. François-Philippe Champagne avait demandé un engagement à long terme de la part de Vidéotron si Québecor souhaiterait acquérir de nouvelles licences. Il disait aussi s’attendre à ce que les prix des services sans fil en Ontario et dans l’Ouest canadien soient comparables à ceux offerts par Vidéotron au Québec, qui sont, soulignait-il, inférieurs de 20 %, en moyenne, à ceux dans le reste du pays.

Le Bureau de la concurrence alléguait de son côté que le Tribunal avait commis des erreurs de droit, centrées en grande partie sur la façon dont la vente proposée de Freedom Mobile a été prise en compte dans la décision.

Le Bureau soutenait que la vente proposée de Freedom rendrait certaines activités de Vidéotron dépendantes de Rogers. Le Bureau faisait aussi valoir que le Tribunal avait commis une erreur en s’appuyant sur des engagements inapplicables attachés à la transaction.

Avec Richard Dufour, La Presse