(New York) Sous le nom de « la révolte des gobelets rouges », des employés de plus d’une centaine de Starbucks aux États-Unis ont prévu de manifester devant leur magasin jeudi pour dénoncer les tactiques anti-syndicales de l’entreprise.  

Tout près du mythique Times Square à New York, une dizaine de jeunes salariés protestent ainsi dans un froid glaçant devant le café qui les emploie, en brandissant des pancartes au nom de l’organisation à l’origine de ce mouvement, Starbucks Workers United (SWU), et scandant « travailleurs en grève ».

Aux passants qui le souhaitent, ils distribuent un gobelet rouge portant l’insigne du syndicat. Une initiative destinée à contrer une opération marketing de la chaîne de cafés, qui distribue gratuitement jeudi un gobelet réutilisable rouge aux clients achetant une boisson dans une sélection d’établissements à travers le pays.

Hal Battjes, 21 ans, arpente le trottoir avec son mégaphone depuis 5 h 30.  

« On a eu beaucoup de soutien de nos réguliers » à l’heure de pointe du matin, certains choisissant de renoncer à leur café, assure-t-elle. D’autres clients vont prendre leur commande sans prêter spécialement attention.  

Les manifestants demandent des emplois du temps plus réguliers, un meilleur salaire et que Starbucks s’installe sans rechigner à la table des négociations avec SWU.  

Un groupe de salariés de l’entreprise à Buffalo a en effet créé la surprise fin 2021 en montant le premier syndicat dans un magasin directement géré par la chaîne dans le pays. Ils ont ensuite fait des émules, plus de 260 établissements ayant désormais rejoint SWU.  

Mais la direction de l’entreprise a tardé à engager des négociations sur des conventions collectives et est accusée par le syndicat de tactiques d’intimidation envers ses membres. Parmi celles-ci le renvoi pour des raisons fallacieuses de salariés cherchant à se syndiquer, voire la fermeture pure et simple de magasins.  

« Un combat qui vaut le coup »

Au café près de Times Square, les manifestants espèrent pouvoir organiser un vote sur la création d’un syndicat le mois prochain.  

« C’est un combat qui vaut le coup d’être mené », affirme Jay Tosa, 18 ans.  

Son père, électricien, est syndiqué depuis longtemps. « Je connais les avantages que cela peut apporter », dit-elle.  

Surtout, elle se sent mieux armée pour combattre « la vieille propagande anti-syndicale » répandue par les gérants qui leur répètent régulièrement qu’ils ont beaucoup à perdre en voulant se faire représenter par une organisation tierce.  

Le Bureau en charge du droit du travail aux États-Unis (NLRB) a porté des dizaines de plaintes à l’encontre de l’entreprise pour des pratiques anti-syndicales. En août, un juge a forcé Starbucks à ré-embaucher sept salariés d’un établissement de Memphis (Tennessee), licenciés pour avoir tenté de se syndiquer.  

« Nous sommes conscients que des manifestations syndicales sont prévues dans un petit nombre des magasins directement gérés par l’entreprise » aux États-Unis, a indiqué dans un message à l’AFP Starbucks, qui gère au total un peu plus de 10 200 cafés en Amérique du Nord.  

« Nous respectons leur droit de participer à des activités de protestation légales », ajoute le groupe en soulignant que sa priorité reste d’améliorer l’expérience des clients et de l’ensemble des salariés. La chaîne de cafés affirme aussi négocier « de bonne foi » avec les syndiqués.  

Dans le sillage de Starbucks, plusieurs syndicats ont fait ces derniers mois des percées dans des entreprises qui avaient jusqu’alors réussi à repousser les velléités de leurs salariés, dont Amazon, Apple, Chipotle ou Trader’s Joe.  

Mais face à la résistance de leur direction, ils peinent encore à transformer leurs victoires en avancées concrètes.

« Si Starbucks peut enfreindre la loi pour décourager les efforts de syndicalisation de ses travailleurs, d’autres entreprises pourraient suivre son exemple », remarque SWU. Cela représente une menace pour « l’avenir du mouvement syndical aux États-Unis », déplore l’organisation.