(Toronto) Les faillites commerciales augmentent au Canada et de plus en plus de petites entreprises risquent de fermer, selon un regroupement de petites ou moyennes entreprises (PME).

Après avoir connu une baisse spectaculaire au début de la pandémie, le nombre de dossiers d’insolvabilité des entreprises est reparti à la hausse depuis le début de l’année 2022, montrent les données du Bureau du surintendant des faillites du Canada. En avril 2020, par exemple, on a rapporté 164 faillites ou propositions d’entreprises au Canada, dont 80 au Québec. En juin dernier, on en a enregistré 303 au Canada et 175 au Québec. Ce sont surtout les secteurs de la construction, de l’hébergement et de la restauration qui ont été touchés.

La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), qui compte 95 000 membres au pays, dispose en outre de ses propres statistiques qui dressent un portrait encore plus sombre. En fait, le nombre de faillites est « marginal » pour avoir un portrait des difficultés financières des PME, estime Jasmin Guénette, vice-président des affaires nationales à la FCEI.

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Jasmin Guénette, vice-président des affaires nationales à la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante

« La faillite, c’est le dernier recours, le plus complexe et celui qui a le plus de conséquences, explique-t-il. La majorité vont vouloir vendre l’entreprise, la fermer de façon permanente, conclure un accord avec des créanciers sur une base volontaire. »

En fait, selon un sondage de la FCEI mené en juin dernier, la faillite n’est l’avenue privilégiée que par un entrepreneur sur dix.

Par ailleurs, 17 % des entrepreneurs, soit un sur six, affirment envisager la faillite ou la fermeture de leur commerce. À l’échelle du Québec, il s’agirait donc de quelque 45 000 entreprises de moins de 500 employés qui pourraient fermer leurs portes.

« On est passés à travers deux ans et quelques mois de pandémie, de restrictions économiques, de confinements, rappelle le vice-président de la FCEI. Quand on ajoute à ça la pénurie de main-d’œuvre, l’inflation qui touche également les entrepreneurs, les problèmes de chaînes d’approvisionnement, beaucoup trouvent que ça devient ingérable. »

Revenus grugés

Les statistiques en hausse du produit intérieur brut jusqu’à tout récemment occultent une autre réalité : 54 % des PME n’ont pas retrouvé leurs niveaux de ventes prépandémie, selon le plus récent sondage de la FCEI. Deux entrepreneurs sur trois, 62 % plus précisément, traînent encore des dettes associées à la pandémie, par des prêts auprès d’institutions financières ou des gouvernements. À peine 10 % affirment les avoir remboursées.

Les PME canadiennes ont ainsi accumulé une dette moyenne de 158 000 $, 108 034 $ pour celles du Québec.

D’où les deux demandes de la FCEI à ce chapitre, d’abord en ce qui concerne les prêts jusqu’à 60 000 $ accordés à quelque 900 000 entreprises en vertu du Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes (CUEC). La date limite de remboursement prévue en décembre 2022 a été repoussée à décembre 2023. La FCEI demande un nouveau report, en décembre 2024.

Par ailleurs, l’entreprise qui rembourse son prêt avant l’échéance se voit octroyer une radiation partielle du tiers du prêt, jusqu’à 20 000 $. La FCEI demande plutôt que cette radiation soit établie à 50 %, ou 30 000 $.

Fiscalité à la rescousse

Pour M. Guénette, « les gouvernements ont le devoir de mettre en place des mesures pour aider les entreprises à s’en sortir ». D’autres avenues sont proposées par la FCEI, notamment de hausser la portion des revenus imposés au taux plus bas des petites entreprises, qui est actuellement de 500 000 $, pour le porter à 600 000 $ et de réduire ce taux de 9 à 8 %. Des demandes de longue date comme la réduction des taxes provinciales sur la masse salariale et le gel ou la baisse des cotisations d’assurance-emploi et de retraite sont de nouveau présentées. Enfin, on demande une réduction des frais d’utilisation des cartes de crédit pour les petits commerçants.

« Durant la pandémie, les programmes d’aide des gouvernements ont permis à beaucoup de PME de rester ouvertes, mais ces programmes sont maintenant terminés, souligne le vice-président de la FCEI. Le retour à la normale s’annonce long et compliqué. »