L’entreprise obtient l’autorisation de vendre de l’alcool avec ses produits. Ou sans.

Les clients de Goodfood qui commandent des boîtes-repas, de l’épicerie ou du prêt-à-manger pourront y ajouter une bouteille de bière ou de vin. La Régie des alcools, des courses et des jeux vient de donner la permission à l’entreprise de vendre de l’alcool au Québec, même si les livreurs ne sont pas nécessairement ses employés, à condition qu’ils vérifient l’identité du destinataire pour s’assurer qu’il est bien majeur.

Cette décision était attendue par Goodfood, qui a déjà connu des jours meilleurs. L’entreprise perd des clients et ses résultats du trimestre printanier montrent un recul des ventes de 38 % en un an.

Goodfood avait annoncé son intention d’ajouter de l’alcool à son offre au début de l’année 2021, souhaitant que son projet se concrétise avant la fin de cette même année. Ç’aura été plus long qu’espéré, car la Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ) a convoqué l’entreprise en audience, bien qu’elle détienne un permis d’épicerie.

Les clients de Goodfood n’auront pas l’obligation de commander de la nourriture avec leur boisson, comme c’est le cas pour les détaillants alimentaires qui ont un permis d’épicerie, et contrairement au permis de restaurant.

L’ensemble de la clientèle devrait avoir accès à la carte des vins dès le 23 août. Elle comprend des vins québécois, dont ceux de Léon Courville, et des bières de microbrasseries ainsi que des produits Labatt, Sleeman et Molson. La livraison d’alcool, avec ou sans nourriture, sera offerte avec le service « 30 minutes » lancé plus tôt cette année, qui assure que le client reçoit sa commande au maximum une demi-heure après l’avoir placée.

Nouveau modèle d’affaires

C’est l’aspect virtuel du commerce qui demandait une étude plus approfondie, selon la RAJC qui porte une attention particulière aux demandes émanant de nouveaux modèles d’affaires. Pour vendre de l’alcool au Québec, un marché doit consacrer 51 % de sa superficie physique à l’alimentation. Les épiceries régulières et les dépanneurs peuvent déjà vendre et livrer de l’alcool.

Dans le cas de commerces virtuels, la RACJ doit s’assurer que la proportion est respectée dans l’offre du demandeur. C’est aussi le cas pour un entrepôt de Metro qui ne vend pas dans un espace physique, mais seulement par l’entremise des commandes en ligne. La RACJ a voulu soumettre ce nouveau modèle aux régisseurs – ce Metro virtuel a également reçu un avis favorable et pourra faire la livraison d’alcool, avec ou sans autres commandes.

Inquiétudes

Le vice-président aux affaires publiques de l’Association des détaillants en alimentation du Québec, Stéphane Lacasse, s’inquiète du possible manque de contrôle occasionné par la livraison de bouteilles d’alcool par un tiers. Par exemple, dit-il, si vous ajoutez une bouteille de cidre à votre épicerie de la semaine, les livreurs des grandes chaînes d’alimentation s’assurent que la vérification de l’identité du destinataire sera faite.

« On s’assure qu’une preuve d’âge sera demandée », précise Stéphane Lacasse, qui croit que le lien est plus ténu lorsque la livraison est confiée à une autre entreprise que le vendeur.

Comment la Régie va s’assurer du respect de l’application de la loi ?

Stéphane Lacasse, vice-président aux affaires publiques de l’Association des détaillants en alimentation du Québec

L’avocate Joyce Tremblay, porte-parole de la RACJ, concède que la Régie n’a qu’une dizaine d’inspecteurs pour l’ensemble du territoire québécois et que leur mandat est large. Les plaintes, lorsqu’il y en a pour ce genre de fautes, sont toutefois traitées, et la Régie travaille avec les corps policiers en place dans l’endroit concerné, dit-elle.

Du côté de Goodfood, on assure que « les livreurs sont tenus de vérifier l’identité de la personne qui réceptionne le colis à la porte ».

Ces récentes décisions ne sont pas un précédent : les livreurs d’Uber Eats, un intermédiaire entre le restaurant et le client, peuvent aussi livrer de l’alcool. Les Fermes Lufa, qui font pousser des légumes sur des toits de Montréal et de Laval, distribuent également des produits alimentaires de tout acabit, y compris de l’alcool. Elles utilisent des entreprises de livraison externes pour la distribution de leurs paniers.