Deux ans plus tard, nous prenons des nouvelles des entrepreneurs qui ont témoigné de leurs difficultés, alors que la pandémie paralysait l’économie. Aujourd’hui : Bush Knowledge Safaris.

Qu’était-il advenu de l’agence de safaris d’Anne Domingue en Afrique de l’Est ?

Son entreprise n’avait-elle été qu’un feu de brousse éteint par une vague de la pandémie ?

Elle a d’autant plus facilement accepté de nous raconter la suite de ses aventures qu’elle avait elle-même songé à en faire la proposition. « Soyez prêt, je ne choisis pas les chemins faciles », nous a-t-elle écrit.

Aux dernières nouvelles que nous en avions eues, au printemps 2020, Anne Domingue et son ami et cofondateur de l’agence Bush Knowledge Safaris, le Tanzanien Leonard Msanze, avaient atterri à Montréal au terme d’une abracadabrante échappée depuis la Tanzanie. La saison touristique qui s’y préparait sous les meilleurs auspices avait été stoppée aussi net qu’un tout-terrain happant un rhinocéros.

À leur arrivée au Canada, le 23 mars 2020, ils se sont installés dans le condo qu’Anne louait à Sherbrooke.

PHOTO FOURNIE PAR ANNE DOMINGUE

Anne Domingue et Leonard Msanze, en Tanzanie avant la pandémie

Extrait de l’article du 8 avril 2020

Ils ont aussitôt demandé un permis de travail pour Leo, puis se sont mis sur la piste d’emplois temporaires — il leur fallait « un plan B pour payer l’épicerie ». Ils les ont trouvés sur une ferme maraîchère bio de Compton, où le fils d’Anne avait travaillé quelques années plus tôt.

Du courage. En latin, leo signifie lion.

Lisez « Face à la crise : le rugissement de la COVID-19 »

La porte de la ferme se ferme

Avec le recul, ce ne fut pas aussi simple.

« Même avec une lettre de cet entrepreneur-là qui disait qu’il avait besoin de Leonard une douzaine d’heures par jour et jusqu’à sept jours par semaine s’il voulait, ça n’a pas fonctionné, raconte-t-elle. Leonard n’a pas eu son permis de travail. »

Il est retourné en Tanzanie en juillet 2020.

Anne est restée au Canada.

Au cours de l’été 2020, une connaissance lui a demandé un coup de main pour lancer un projet de coopérative financière. Elle y a consacré six mois de « bénévolat forcé parce qu’on a un petit peu abusé du lien de confiance », résume-t-elle sobrement.

« L’important, c’est que j’ai eu une nouvelle expérience en démarrage d’entreprise et dans le domaine coopératif, que je ne connaissais pas. »

Séjour en Tanzanie

Anne est retournée en Tanzanie pour un séjour de six semaines à la fin de 2020.

Le parc du Serengeti était pratiquement vide de touristes, ses chemins envahis par les foins. Elle a profité de son séjour pour reprendre une petite initiative humanitaire personnelle.

Tout juste avant la pandémie, elle avait conçu le projet de distribuer des serviettes hygiéniques lavables dont l’entreprise québécoise La Petite Ourse lui faisait don, avec l’aide d’une ONG locale. Elle en a rempli trois grandes valises.

PHOTO FOURNIE PAR ANNE DOMINGUE

Une des distributions de serviettes hygiéniques lavables, dans une école de soccer pour jeunes filles, à Mwanza, en Tanzanie, à la fin 2021

Le deuxième retour

En janvier 2021, Leonard est revenu avec elle au Canada. Elle s’est alors lancée dans un de ses plus ambitieux projets : lui obtenir la résidence permanente canadienne.

« J’ai travaillé toute seule là-dessus et très fort. Ça m’a pris 10 mois. »

« Une chance que je suis une acharnée. Il y a des gens à qui ça prend des années. Mais c’est parce que c’était ma mission. »

Leonard occupe maintenant un emploi dans la distribution alimentaire et un autre emploi manuel. « Il travaille fort ! »

Il prévoit retourner en Tanzanie en décembre prochain.

PHOTO FOURNIE PAR ANNE DOMINGUE

Anne Domingue apparaît à la fenêtre de la camionnette de brousse de l’agence Bush Knowledge Safaris.

Car l’agence Bush Knowledge Safaris respire toujours. « L’agence continue à rouler et à faire ses frais. Cette entreprise-là est bien rodée. Les permis sont toujours à jour. Et on travaille fort pour tout ça, même s’il n’y a vraiment pas eu beaucoup de safaris, depuis le début de l’année. »

Un autre démarrage

Entre-temps, Anne a acheté et revendu avec un petit profit son condo sherbrookois, puis en a loué un autre sur la Rive-Sud de Montréal.

Elle a entrepris une autre aventure en s’inscrivant au Microprogramme multidisciplinaire en gestion à HEC Montréal.

« Donc mes premiers cours universitaires à vie, question de me donner un objectif, et une nouvelle mission dans le monde des affaires », décrit-elle.

Elle se voit consultante en démarrage d’entreprise.

« Je pense que mon créneau va être d’encourager les nouveaux entrepreneurs, puis d’utiliser tout ce que j’ai comme connaissances et expérience pour aller chercher les outils qui vont faire démarrer une idée, la faire avancer, la faire prospérer », évoque-t-elle.

« Je pense que ça va être ça, mes prochains 25 ans, monsieur. »

Anne Cœur de Lion ne perd pas courage.