Éditions de Robes, entreprise 100 % panier bleu, qui a accompagné certains de nos moments historiques, fermera ses portes samedi. La pandémie et les remises en question post-COVID-19 ont eu raison de son modèle d’affaires.

Éditions de Robes a marqué la victoire historique de la première mairesse de Montréal et sublimé la rencontre de la première dame du Canada avec la duchesse Kate Middleton. Un concept panier bleu, à l’empreinte écologique diminuée, qui voulait aider les femmes à briser les plafonds de verre.

« Je voyais la robe comme bouclier pour aider les femmes professionnelles à mener les combats qu’elles ont au quotidien », explique avec passion la créatrice et propriétaire Julie Pesant, qui souligne avoir acquis sa confiance en elle étape par étape, élevée par une mère au foyer.

« Je suis quelqu’un de combatif dans la vie, poursuit-elle lors d’une entrevue avec La Presse. Je ne baisse jamais les bras, mais je ne voulais pas faire d’acharnement. Il faut juste être réaliste en affaires. J’essaie de vivre cette fermeture avec grâce, parce que je n’ai pas mal géré mon entreprise. »

À l’avant-garde en 2012

C’est après avoir travaillé 20 ans chez Jacob et 10 ans chez San Francisco, des entreprises où les vêtements étaient confectionnés localement, mais surtout en Asie, que Julie Pesant a voulu renverser la vapeur. « La Chine est devenue l’usine du monde, observe-t-elle. Je voulais que tout soit fait à Montréal et que les produits soient durables, parce que je me disais que j’allais desservir une clientèle de professionnelles et de femmes intelligentes qui allaient vouloir consommer intelligemment. »

Son seul écart, précise-t-elle, ce sont les tissus importés d’Espagne et d’Italie, car il n’y a pas de tisserands au Québec. C’est donc dans des matières qui résistent au temps et magnifient toutes les types de silhouettes que les robes étaient confectionnées dans des ateliers de Montréal.

Galas et cocktails

Au cours des dix dernières années, les robes aux lignes impeccables ont accompagné la carrière des PDG Manon Brouillette et Isabelle Hudon, mais aussi de nombreuses avocates, juges, femmes en finances, comédiennes et artistes. Aux robes professionnelles se sont ajoutées celles de galas et de cocktails.

Des clientes d’Éditions de Robes
  • Valérie Plante

    photo fournie par edr

    Valérie Plante

  • Isabelle Hudon (au centre, en rose)

    photo fournie par edr

    Isabelle Hudon (au centre, en rose)

  • Sophie Grégoire (à droite)

    photo fournie par edr

    Sophie Grégoire (à droite)

  • Manon Brouillette

    photo fournie par edr

    Manon Brouillette

  • Anne-Marie Cadieux

    photo fournie par edr

    Anne-Marie Cadieux

  • Anne-Élisabeth Bossé

    photo fournie par edr

    Anne-Élisabeth Bossé

  • Anne Dorval

    photo fournie par edr

    Anne Dorval

  • Julie Le Breton

    photo fournie par edr

    Julie Le Breton

  • Magalie Lépine-Blondeau

    photo fournie par edr

    Magalie Lépine-Blondeau

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En 2019, Éditions de Robes créait une quarantaine de styles par saison et vendait 150 robes par style, voire jusqu’à 175 pour la robe Leila.

Une mort lente

Or, la pandémie, avec les bureaux fermés, le centre-ville déserté, le télétravail et la tendance au mou lui ont donné du fil à retordre. Quand les magasins ont rouvert une première fois en 2020, il n’y avait aucune file devant la boutique. Ni la deuxième fois.

« Pendant deux ans, j’ai continué de développer pour que ce soit toujours plus beau et toujours plus intéressant. On ne pouvait pas deviner combien de temps ça allait durer. »

Julie Pesant et son équipe ont amélioré le site web, ajouté des vestons, des pantalons, créé la nouvelle collection Parada de Flor Amélia Taillefer-Pérez, qui travaille avec Julie Pesant depuis 2012. Mais ces efforts et cette passion ne se sont pas traduits en chiffres : les ventes ont chuté de 50 à 60 %.

« Ç’a été une mort lente. L’élastique est tendu, illustre-t-elle. Je suis en train de puiser dans mes ressources personnelles. Les états financiers sont désastreux. »

Remise en question de la façon de consommer

Samedi, lors du passage de La Presse, les clientes se succédaient non seulement pour venir profiter des derniers jours de la boutique, mais aussi pour témoigner de leur affection. « Qu’est-ce que je vais faire sans vous ? », s’est exclamée l’une. « Où vais-je trouver des robes de qualité pour ma silhouette ? », a dit une autre. Une reconnaissance qui a ému la créatrice.

La femme québécoise est extraordinaire. Si on avait la chance de remplir une grande pièce avec les femmes que j’ai côtoyées, on pourrait changer le monde, vraiment.

Julie Pesant, propriétaire d’Éditions de Robes

Si la boutique et le site web ferment officiellement et définitivement le samedi 11 juin à 17 h, des projets se dessinent tranquillement.

Du-sur mesure, des commandes spéciales et d’autres propositions dont elle ne peut pas parler. « Je vais resurgir autrement. Dans ma tête, le mot retraite ne veut rien dire. Je me suis toujours vue comme les artistes, comme Renoir qui a peint jusqu’à la fin de sa vie. »