L’usine de Moderna qui s’implantera à Montréal aura à terme une capacité de production de 100 millions de doses par année, autant pour des vaccins contre la COVID-19 que l’influenza. On ignore pour l’instant où s’implantera l’infrastructure sur l’île.

« L’arrivée de Moderna va créer des centaines de bons emplois et va permettre de continuer à stimuler des talents ici dans la science », a aussi confirmé le premier ministre Justin Trudeau vendredi, lors d’une conférence de presse tenue à Montréal. Son gouvernement veut « créer un milieu où il y aura une effervescence de recherche et production ».

Mercredi, La Presse révélait que Montréal a damé le pion à Toronto pour accueillir cette usine de production de vaccins à base d’ARN du géant pharmaceutique. La nouvelle était attendue depuis quelques mois déjà. On ignore encore le lieu exact de l’usine, mais plusieurs « secteurs stratégiques » de l’île ont déjà été identifiés, selon nos informations. Moderna vise à débuter la construction aussi tôt que cet été.

« On peut dire que le Québec a gagné la bataille », a affirmé le premier ministre François Legault, le sourire aux lèvres, vantant le fait que sa province accueillera l’usine, et non l’Ontario. « Quelle belle nouvelle pour notre autonomie de dire qu’on aura cette usine pour des vaccins fabriqués ici », a-t-il insisté.

Jour « historique »

Sur place, le président de Moderna, Stéphane Bancel, a quant à lui parlé d’une « nouvelle historique ». « C’est un beau projet dans un beau pays. […] Nous sommes vraiment très excités de construire cette usine, mais aussi une relation pour les décennies qui viennent. » « Comme l’ARN est une molécule d’information, nous voulons la mettre à la disposition des meilleurs scientifiques du monde », a-t-il ajouté, en faisant valoir que l’expertise de l’Université McGill sera cruciale.

D’après le premier ministre québécois, l’avantage de l’arrivée d’un joueur comme Moderna à Montréal est d’abord économique. « Si on veut continuer de réduire l’écart de richesse avec nos voisins, il faut augmenter le salaire moyen. Et là, on va avoir des emplois payants », a-t-il dit. Il espère voir la culture « changer » au Québec dans la manière dont les universités travaillent avec le milieu des affaires.

« Travailler avec les entreprises, ça n’enlève rien aux universités. Au contraire, ça permet d’en faire plus », a-t-il plaidé, en disant vouloir multiplier les « zones d’innovation » dans la province qui font de la recherche « appliquée et commercialisée ». M. Bancel, lui, n’exclut pas d’augmenter ses activités au Canada avec le temps. « C’est possible dans le futur qu’on fasse plus [en matière de production], ici ou dans une autre province. On regardera les besoins », s’est-il limité à dire.

Au total, l’usine coûtera 180 millions, selon ce qu’a avancé François Legault. Ottawa injectera de son côté un budget supplémentaire pour acheter des vaccins provenant de la nouvelle usine. « On va inventer l’avenir des vaccins ici, chez nous », a fait valoir François-Philippe Champagne, le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, parlant d’un pas majeur pour l’écosystème de recherche canadien. « C’est une consécration », s’est enfin réjoui le ministre québécois de la Santé, Christian Dubé, pour qui tout le réseau de la santé profitera de cette nouvelle usine.

De longs pourparlers

Cette annonce survient après plusieurs mois d’échanges entre le ministre fédéral de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne et le PDG de Moderna, Stéphane Bancel. Elle représente une étape déterminante dans les efforts du gouvernement Trudeau visant à reconstruire le secteur de la biofabrication et des sciences de la vie au pays. L’usine permettra de consolider l’écosystème de l’industrie pharmaceutique dans la région de Montréal, afin de se préparer – par exemple – à d’autres « éventuelles pandémies ».

Dans un communiqué, le gouvernement Legault précise par ailleurs que Moderna fabriquera « non seulement des vaccins contre la COVID-19 », mais aussi « une gamme de vaccins à ARN messager » contre « différents virus respiratoires », dont l’influenza, qui connaît une montée au Québec à l’heure actuelle.

Moderna est l’un des deux grands fabricants de vaccins à base d’ARN messager contre la COVID-19 dans le monde – l’autre étant Pfizer/BioNTech. Les vaccins fabriqués par ces deux sociétés ont été utilisés par bon nombre de pays pour vacciner leur population, notamment le Canada et les États-Unis.

Au Canada, les provinces ont également utilisé le vaccin fabriqué par le groupe pharmaceutique suédo-britannique AstraZeneca, au début de la campagne de vaccination. La pandémie de COVID-19 a fait ressortir la vulnérabilité du Canada à plusieurs égards, notamment l’absence de production locale de vaccins efficaces contre le coronavirus et l’absence de production d’équipements de protection individuelle par des entreprises canadiennes, entre autres choses.

Avec Tommy Chouinard et Joël-Denis Bellavance, La Presse