Le géant minier demande le soutien financier du gouvernement pour la construction d’une usine de recherche

Le Québec figure dans la stratégie lithium de Rio Tinto, qui fait du démarchage auprès du gouvernement Legault pour tenter d’obtenir un soutien financier en vue de la construction d’un centre de recherche sur ce métal vedette essentiel à la construction des batteries des voitures électriques.

Déjà, l’expertise des chercheurs québécois du géant minier a été mise à contribution pour l’aider à extraire du lithium de qualité « batterie » à partir des résidus miniers de sa mine californienne de Boron. Cela lui a permis de démarrer une usine de démonstration dans cet endroit.

Les intentions de la multinationale britanno-australienne figurent dans une mise à jour récente de son inscription au Registre des lobbyistes du Québec. Le soutien financier demandé à l’État québécois n’est pas précisé. Il en va de même en ce qui a trait à la superficie d’un éventuel centre de recherche sur le lithium en territoire québécois.

« Nous allons continuer à intensifier nos efforts en vue de développer des technologies pour valoriser les minéraux critiques au Québec et ailleurs », a expliqué dans un courriel le porte-parole de Rio Tinto, Simon Letendre, sans s’avancer davantage.

Selon le Registre, un potentiel financement pourrait se faire par le truchement d’un prêt et servirait essentiellement à « soutenir le projet de construction d’usine de recherche et de développement de lithium ». Les démarches de Rio Tinto se font auprès d’Investissement Québec (IQ) – le bras investisseur de l’État québécois – et trois ministères (Économie et Innovation, Énergie et Ressources naturelles et ministère du Conseil exécutif).

Un œil sur les métaux critiques

L’entreprise a déjà réalisé des avancées dans la province dans le créneau des métaux critiques. Sur le site de son complexe métallurgique de Sorel-Tracy, où Québec a investi 8 millions, elle a développé une technologie pour produire annuellement trois tonnes de scandium, minerai critique utilisé par l’industrie aérospatiale et électronique dont la demande est en forte hausse.

On trouve une centaine de chercheurs de Rio Tinto à Sorel-Tracy. Il est permis de croire que ses installations situées en Montérégie seraient en lice pour accueillir un centre de recherche sur le lithium si ce projet voyait le jour. Même sur cet aspect, le géant minier demeure avare de détails. Son inscription au Registre se limite à dire que le lieu est « à déterminer ».

« La technologie va continuer à évoluer », affirme Michel Jébrak, professeur du département des sciences de la Terre et de l’atmosphère à l’UQAM et auteur d’un livre sur les défis de la transformation du lithium.

PHOTO KARENE-ISABELLE JEAN-BAPTISTE, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Michel Jébrak, professeur du département des sciences de la Terre et de l’atmosphère à l’UQAM

Il y a des batteries [pour véhicules électriques] qui seraient deux fois plus efficaces en changeant quelques petites choses. L’idée d’avoir un centre de recherche est logique.

Michel Jébrak, professeur du département des sciences de la Terre et de l’atmosphère à l’UQAM

L’expert affirme que Rio Tinto tente également de retomber sur ses pattes après l’échec de son gigantesque projet de mine de lithium en Serbie survenu en janvier dernier. Sous la pression populaire, le gouvernement serbe a décidé de tirer un trait sur ce qui devait être le plus grand gisement européen de lithium.

Ce projet, qui devait permettre à la minière d’extraire suffisamment de lithium pour permettre la construction de 1 million de véhicules électriques par année, devait coûter 2,4 milliards.

« Rio Tinto a une stratégie lithium et veut se retourner rapidement après son échec en Serbie », dit M. Jébrak, en ajoutant que la société venait de conclure l’acquisition d’un projet de lithium en Argentine pour 825 millions.

La filière batteries que souhaite mettre sur pied le gouvernement Legault souhaite des projets dans toutes les phases, de la mine à la batterie. Les ambitions de Rio Tinto viendraient ajouter un volet de recherche et développement à l’offensive gouvernementale.

Québec est au courant des projets de Rio Tinto, mais n’a pas voulu faire de commentaires ou s’avancer sur une éventuelle contribution financière dans le dossier de la recherche sur le lithium.

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    Nombre de catégories de minéraux critiques et stratégiques visées par Québec dans sa stratégie. Le lithium en fait partie.
    Source : gouvernement du Québec