Le minerai extrait de la mine du Lac Bloom, près de Fermont, sur la Côte-Nord, se distingue déjà par sa haute teneur en fer. Cela n’empêche pas Champion Iron de vouloir l’améliorer, un projet qui pourrait venir gonfler son empreinte dans la province.

Pour l’instant, la société mère de Minerai de fer Québec (MFQ) s’affaire à réaliser l’expansion du site afin d’augmenter la production annuelle jusqu’à 16 millions de tonnes. Elle souhaite aussi agrandir le parc de stockage des résidus miniers, un projet critiqué par le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) et qui attend la décision du gouvernement Legault.

Cela n’empêche pas Champion Iron d’avoir des ambitions à plus long terme.

Dans son rapport trimestriel pour la période de trois mois ayant pris fin le 30 juin, l’entreprise a fait part de son intérêt de voir la teneur de son minerai de fer atteindre 69 %, contre 66 % actuellement.

« Nous sommes présentement dans une étude de faisabilité pour déterminer les coûts et les meilleurs sites pour installer une usine, explique le chef de la direction de Champion, David Cataford, au cours d’une entrevue téléphonique avec La Presse. On parle beaucoup de transformation au Québec, et c’est notre vision à plus long terme. »

Selon lui, l’entreprise devrait être en mesure de présenter les résultats de cette étude l’année prochaine. C’est à ce moment qu’elle pourra décider si elle va de l’avant ou non avec ce projet. Il s’agirait d’un investissement de « centaines de millions de dollars », selon le dirigeant de Champion.

Une chose est certaine, l’usine verrait le jour au Québec, soit sur le site du Lac Bloom ou à Pointe-Noire, à Sept-Îles, où se trouve le terminal maritime destiné à l’exportation du minerai.

« Avec une plus haute teneur, le minerai permet aux aciéries de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, affirme M. Cataford. On sait qu’il va être demandé. C’est important pour nous d’être prêts dans cette transition. »

PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

David Cataford, chef de la direction de Champion Iron

La concentration du minerai de fer serait relevée grâce à la flottation, un procédé visant à séparer les minéraux entre eux. Selon le dirigeant de Champion, le Québec possède déjà un savoir-faire dans la flottation. Le procédé est également utilisé aux États-Unis.

Au premier trimestre de l’exercice en cours, Champion a obtenu un prix moyen d’environ 280 $ US la tonne. La haute teneur du minerai extrait de la mine du Lac Bloom permet à MFQ d’obtenir une prime d’une « trentaine de dollars » la tonne. Les conditions de marché ont toutefois changé étant donné que le prix de l’indice de référence IODEX 65 % Fe CFR China Index se situait, le 1er septembre, aux alentours de 162 $ US la tonne.

« Lorsque nous avions réalisé l’étude de faisabilité pour la deuxième phase de la mine, nous avions utilisé un prix de 84 $ US la tonne, précise M. Cataford. Il y a encore une bonne marge. La croissance de la demande pour le minerai haute pureté vient protéger encore plus le projet. »

Un dossier montré du doigt

L’expansion de la mine du Lac Bloom a déjà toutes les autorisations pour aller de l’avant. Environ 825 personnes travaillent sur le site, et 350 autres travailleurs se consacrent à la deuxième phase. L’agrandissement du parc où seraient entreposés les résidus miniers permettrait de s’assurer d’exploiter la mine pour 20 ans. Ce deuxième projet aurait pour conséquence de détruire 151 hectares de lacs et de cours d’eau. Le BAPE a recommandé à Québec de ne pas approuver le projet dans sa forme actuelle.

« Le rapport a généré beaucoup de questions auprès du gouvernement, reconnaît M. Cataford. On répond à chacune des questions du ministère de l’Environnement. Une fois ce processus terminé, le gouvernement pourra rendre sa décision. »

Ce dossier est délicat, puisque les contribuables font partie des propriétaires de Champion. Investissement Québec, le bras financier de l’État québécois, est le deuxième actionnaire de l’entreprise, avec une participation de 8,59 %.

Champion avait profité des bonnes conditions de marché au premier trimestre ainsi que de l’augmentation des volumes extraits pour afficher un bénéfice net de 224,4 millions, ou 44 cents par action, contre 75,6 millions, ou 16 cents par action, à la même période l’année précédente.

À la fin d’août, l’entreprise a profité de sa bonne situation financière pour racheter la portion restante (125 millions) des actions privilégiées détenues par la Caisse de dépôt et placement du Québec et qui s’accompagnaient d’un dividende de 9,25 %.