(Toronto) Le chef syndical Jerry Dias est retourné mardi à l’usine de fabrication d’avions du nord de Toronto où il a travaillé il y a près de 45 ans pour faire pression sur le propriétaire, de Havilland, pour qu’il mette fin à un conflit de travail en cours.

Alors que les grévistes se rassemblaient devant l’usine de Downsview, au nord de Toronto, le président national d’Unifor a appelé de Havilland Canada et sa société mère Longview Aviation Capital à retourner à la table de négociation en vue d’un accord équitable pour les travailleurs. Il a promis qu’il continuerait à se battre pour les droits des employés.

« Cette usine fait partie de ce que nous sommes : j’ai été embauché ici avec 1500 autres personnes pour le programme Dash 7 », a lancé M. Dias, qui en 1987 était président d’une des sections locales représentant les travailleurs à qui il s’adressait. Son père y travaillait aussi avant lui.

Jerry Dias promettait son appui aux 700 travailleurs représentés par les sections locales 673 et 112 d’Unifor, qui sont en grève depuis le 27 juillet relativement au futur emplacement du programme d’avions passagers à turbopropulseurs Dash 8.

De Havilland a indiqué aux travailleurs plus tôt cette année qu’il ne produirait plus de nouveaux avions Q400 à l’usine de Downsview au-delà des commandes actuellement confirmées, et a annoncé il y a deux ans qu’il mettra fin à la production sur le site une fois les contrats de location du terrain expirés.

Le syndicat a depuis poussé de Havilland à s’engager à fabriquer le Dash 8 dans la région du Grand Toronto lorsque la production reprendra.

L’entreprise a refusé de négocier toute clause de portée qui forcerait la production quelque part dans la région du Grand Toronto et Jerry Dias a dit qu’il s’attend à ce que la production soit déplacée en Alberta.

La porte-parole de De Havilland Canada, Philippa King, a déclaré que l’entreprise souhaitait créer un « avenir durable et à long terme pour le Dash 8 », mais nécessite un « changement fondamental », car Bombardier a vendu le site de Downsview en 2018, plaçant l’usine dans une situation où son temps est compté.

« Malgré les défis à court terme, de Havilland Canada maintient une vision optimiste de son avenir et de l’avenir du programme Dash 8, et a déclaré publiquement qu’elle avait l’intention que l’entreprise soit prête à répondre à la demande de nouveaux avions à mesure que l’industrie se redresse », a-t-elle écrit dans un courriel.

« Cependant, la compagnie ne peut pas et ne se précipitera pas pour prendre une décision sur le futur site de production ni négocier un plan de site en public. »

Mais le premier ministre ontarien Doug Ford mettait déjà de la pression publiquement sur l’entreprise mardi lors d’une visite à une installation d’Alstom à Thunder Bay, en Ontario.

M. Ford a déclaré qu’il était déçu que le programme Dash 8 puisse quitter l’Ontario, le gouvernement provincial ayant dépensé des centaines de millions de dollars pour De Havilland et la production d’avions.

« Tout à coup, ce grand milliardaire arrive et dit : “Je prends [la production Dash 8] de Toronto et de l’Ontario, et nous l’envoyons dans une autre province simplement parce que le milliardaire vit dans cette province”, a dit M. Ford en faisant référence à la propriétaire de De Havilland, Sherry Brydson, un membre de la famille Thomson.

« Ils prennent l’argent et ensuite ils partent. Je pense que c’est dégoûtant. Nous devons nous battre. »

Plus tôt dans le processus de négociation, De Havilland a déclaré qu’il était « désireux de collaborer » avec le syndicat « alors que nous traçons un avenir durable à long terme pour la fabrication d’avions et l’emploi qualifié qu’il soutient. Mais la capacité de travailler ensemble vers un avenir à long terme repose sur un effort concerté pour transformer l’entreprise face aux circonstances auxquelles nous sommes confrontés ».

L’industrie aéronautique a été durement touchée par la pandémie de COVID-19.

Les gens s’efforcent de ne pas contracter le virus et beaucoup renoncent à voyager. Les compagnies aériennes ont dû clouer au sol des avions pendant une grande partie de 2020 et au début de 2021, quand le nombre de cas de COVID-19 était élevé.

Cela a eu un effet d’entraînement sur les ventes des constructeurs d’avions comme De Havilland.

Quand il s’agit de pincer le nerf qui relie leur portefeuille à leur cerveau, nous ne sommes pas dans une bonne situation.

Jerry Dias

Les enjeux sont élevés pour les travailleurs de l’entreprise, qui veulent conserver leur emploi et scandaient « Pas de Dash, pas de contrat », indiquant qu’il n’y aurait pas d’entente sur la reprise du travail sans engagement de maintenir la production du Dash 8 dans la région torontoise.

« Je peine à m’occuper de ma famille sans chèque de paie. Je n’ai pas les avantages d’un deuxième revenu », a déclaré Donna Day, une mère célibataire qui travaille à l’usine depuis 35 ans.

« Perdre son emploi est dévastateur et beaucoup d’entre nous avons dû visiter des banques alimentaires pour la première fois. Nous sommes nombreux à être déprimés et à souffrir de ne pas savoir si nous reprendrons le travail. »

Connie Wright, qui travaille à l’usine depuis plus de 36 ans, est tout aussi passionnée.

Elle est montée sur scène après Mme Day, sa voix chevrotante alors qu’elle décrivait l’usine comme sa « maison ».

« Chaque fois que je vole sur la 400 [l’autoroute] et que je vois ces Dash 8, je sais qu’une petite partie de moi est dans cet avion », a-t-elle déclaré, notant qu’elle avait même écrit son nom sur des parties de certains avions.

« Chaque avion sur lequel j’ai travaillé a mon sang, ma sueur et mes larmes à cause de ce travail, mais nous avons besoin de Longview pour revenir à la table. »