La date est entourée au calendrier de l’entreprise : ce sera le jeudi 16 décembre dans une magnifique salle de Montréal pouvant accueillir 90 employés. Enfin ! Car il a fallu une recherche digne d’une enquête de Colombo par Mantra Pharma pour dénicher un endroit afin de souligner le temps des Fêtes.

« On voulait idéalement célébrer un vendredi, plutôt qu’un jeudi, mais on s’est dit : “Fiou !” quand la réservation a été confirmée », avoue l’associé fondateur Stéphane Turcotte.

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Stéphane Turcotte, associé fondateur de Mantra Pharma

Mantra cherchait une salle depuis quelques semaines. De nombreuses étaient déjà réservées. C’est que les téléphones des agences événementielles, des hôtels et des centres de congrès ont sonné dès l’annonce gouvernementale du passage du Québec en zone verte, à la fin de juin.

À Montréal, il n’y aurait plus de grandes salles de réception libres, comme celles à la gare Windsor ou au marché Bonsecours, selon l’agence Cava Rose. « Le travail est plus compliqué, car tout le monde cherche des salles à louer », constate l’associée et cofondatrice Paule Labelle.

Le centre des congrès de Saint-Hyacinthe est complet jusqu’en février 2022, informe l’agence-boutique Niché. « On n’est pas les seuls à vouloir se réunir », constate Stéphane Turcotte, qui souhaite du même coup souligner le 15anniversaire de son entreprise.

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Anne-Marie Hinse, directrice des opérations de l’Auberge Saint-Gabriel

Si le variant Delta est contenu et que la quatrième vague ne reste qu’un concept théorique, le party de bureau de la fin de l’année, avec un repas servi dans une assiette plutôt que dans une boîte livrée à la maison, ne sera pas une lubie en décembre 2021. « Ça a repris fort pour les Fêtes, lance Anne-Marie Hinse, directrice des opérations de l’Auberge Saint-Gabriel. Les gens ont le pressentiment que la pandémie sera réglée et qu’on pourra organiser un party de plus de 100 personnes. »

Endroit prisé du Vieux-Montréal, l’Auberge Saint-Gabriel a dû reporter plus de 200 évènements en 15 mois, dont 60 rassemblements du temps des Fêtes. « Ce fut un cataclysmique pour nous, avoue Anne-Marie Hinse. On est descendu à 0 $ de chiffre d’affaires, alors que c’est habituellement des millions. »

Bon nombre d’agences événementielles et de salles prennent donc les bouchées doubles pour organiser des réceptions de Noël en plus de tous les évènements reportés depuis mars 2020. « Habituellement, il y a des réservations dès janvier pour un party les samedis de décembre, note Dave Bernier, président de l’agence La Twist. Cette fois, ça risque d’être de la mi-août à la mi-octobre qu’on réserve des dates. C’est complètement décalé cette année. Ce sera la folie ! »

« Je n’arrêtais pas de dire aux filles de prendre des vacances, car quand ça va frapper… et là, ça frappe ! », illustre Paule Labelle, dont le chiffre d’affaires en pandémie a chuté de 2,3 millions à 80 000 $.

On revient en force et c’est étourdissant.

Paule Labelle, associée et cofondatrice de l’agence Cava Rose

Dans l’espoir d’un automne animé

Ajoutez à cela les organisations qui souhaitent célébrer le retour officiel dans les bureaux à l’automne. « On a des demandes pour des évènements de type ‟marque employeur" en septembre, explique Andréanne Mathieu, fondatrice de Niché. Pas festifs, toutefois. Là, les normes nous permettent des groupes de 250 personnes pour des repas assis et des conférences. Dans les salles, ça prend beaucoup d’espace à cause des mesures sanitaires. »

« Aussi, il faut trouver le personnel pour des évènements aussi gros, ajoute Anne-Marie Hinse. On est sur le qui-vive. Ça nous cause du stress. Moins on aura d’informations quant aux règles à suivre, plus ce sera difficile de s’organiser. »

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Andréanne Mathieu, fondatrice de l’agence-boutique Niché

Même avec l’allègement des règles sanitaires, organisateurs et entreprises doivent, pour l’instant, faire le deuil du party de l’avant-COVID-19. Il faudra être patient avant de rêver à un cocktail dînatoire ou à une formule buffet suivie d’une soirée dansante. Qui plus est, au prix de 2019… « Les tarifs augmentent, affirme Andréanne Mathieu. On voit une hausse du coût des traiteurs, de 20-30 % selon l’un d’eux. Il y a aussi une augmentation des frais liée aux mesures sanitaires : bornes, signalisation, nombre requis d’employés plus élevé. »

Les clients sont, on le comprend, plus hésitants à donner le feu vert. À ce titre, les salles de réception tendent à alléger leurs mesures contractuelles. Dans bien des cas, les dépôts pour une salle peuvent être reportés et même remboursés.

Les gens n’osent plus mettre de dépôt, ils sont craintifs. Ils nous posent tellement de questions. Va-t-on pouvoir danser ? On planifie comme s’il n’y avait pas de règles et on s’ajustera.

Anne-Marie Hinse, directrice des opérations de l’Auberge Saint-Gabriel

C’est dans cet esprit de réajustement potentiel que Mantra Pharma organise son party du temps des Fêtes. La direction est prête à mettre un frein au processus en cas de resserrement des règles ou de recrudescence des cas. « On travaille dans le milieu de la santé, indique Stéphane Turcotte. On côtoie des médecins et des infirmières. On ne veut pas leur transmettre la COVID. On doit être plus catholiques que le pape ! »