(Montréal) Alors que Cogeco vient de repousser l’offre hostile bonifiée d’Altice USA et de Rogers, sa principale filiale déploie 405 millions afin de mettre la main sur DERYtelecom, qui se présente comme le troisième câblodistributeur en importance au Québec.

La transaction, annoncée mercredi, est la troisième acquisition réalisée depuis le début de l’année par l’entreprise québécoise, mais elle est la plus importante.

Fondé en 1954, DERYtelecom est un fournisseur de services internet, de télévision et de téléphonie établi à Saguenay. L’entreprise de plus de 450 employés est présente dans plus de 200 municipalités québécoises et dans les régions de l’Estrie, Lanaudière, la Montérégie et les Laurentides.

Elle compte quelque 100 000 clients, qui viendront s’ajouter aux 937 272 abonnés desservis par Cogeco Communications au Québec et en Ontario.

« L’acquisition de DERYtelecom est une transaction hautement stratégique qui permettra à Cogeco d’accroître sa présence dans des régions adjacentes à sa zone de couverture au Québec », a souligné son président et chef de la direction, Philippe Jetté, dans un communiqué.

Celui-ci n’était pas disponible pour accorder des entrevues.

À la Bourse de Toronto, mercredi avant-midi, l’action de Cogeco prenait 67 cents pour se négocier à 85,51 $, tandis que le titre de Cogeco Communication grimpait de 45 cents, à 100,27 $.

Pour l’exercice financier qui s’est terminé le 31 août, DERYtelecom, qui avait été rachetée par quatre de ses directeurs en 2016, a généré des revenus d’environ 105 millions, ainsi qu’un bénéfice d’exploitation ajusté de 44 millions. Cogeco estime pouvoir réaliser des synergies annuelles estimées à 3 millions à la suite de la clôture de la transaction, prévue au cours du deuxième trimestre de l’exercice 2021.

En tenant compte des synergies et des bénéfices fiscaux attribuables à la transaction, Cogeco calcule que le prix payé pour cette acquisition est 7,8 fois le bénéfice d’exploitation ajusté de DERYtelecom.

« Cette acquisition relativement modeste à une valeur élevée ne constitue pas le type d’initiative favorable aux actionnaires que nous nous attendrions à ce que Cogeco propose comme solution de rechange à l’acceptation d’une offre de 150 $ par action », a souligné l’analyste Vince Valentini, de Valeurs mobilières TD, dans une note.

De son côté, le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, a estimé que cette nouvelle prise de Cogeco constituait une « nouvelle positive ».

À l’Assemblée nationale, celui-ci a précisé que le gouvernement Legault n’avait pas été sollicité par l’entreprise afin de participer au montage financier de la transaction. Il s’est montré ouvert à la possibilité que Québec puisse participer à un « plan de développement » si Cogeco avait besoin d’aide.

« Il n’y a rien de mieux pour se protéger que de grossir, a dit M. Fitzgibbon. Je me dis que Cogeco prend du muscle, alors ça va permettre d’avoir une meilleure protection contre des prédateurs. »

Cogeco Communications s’attend également à pouvoir élargir sa présence en milieu rural en procédant à l’expansion de son réseau, puisque DERYtelecom était admissible à des sommes émanant des différents programmes de soutien gouvernementaux.

Après le « refus définitif » exprimé dimanche par la famille Audet, l’actionnaire de contrôle de Cogeco et Cogeco Communications, les conseils d’administration des deux compagnies ont repoussé mardi l’offre hostile bonifiée à 11,1 milliards présentée par Altice USA et Rogers.

L’entreprise américaine et le géant canadien des télécommunications ont néanmoins affirmé que leur offre était toujours en vigueur jusqu’au 18 novembre.

Rogers n’avait pas commenté, mercredi avant-midi, l’acquisition annoncée par Cogeco.