(Ottawa) Les entreprises et les travailleurs canadiens s’attendent à ce que la croissance des salaires reste faible dans la prochaine année, en raison de l’incertitude accrue liée à la pandémie de COVID-19, a indiqué lundi la Banque du Canada dans deux nouveaux rapports.

L’enquête sur les perspectives des entreprises de la banque centrale révèle que la croissance des salaires devrait généralement ralentir au cours de l’année prochaine, certaines entreprises évoquant un gel des salaires.

Une enquête distincte sur la confiance des consommateurs, publiée avec les perspectives des sociétés, a suggéré que les travailleurs s’attendaient à ce que leurs salaires augmentent au cours de l’année prochaine, mais à un rythme inférieur aux niveaux d’avant la pandémie.

Les intentions d’embauche des entreprises restent historiquement faibles, même si les perspectives générales sur l’emploi augmentent légèrement.

Près du tiers des entreprises ont indiqué à la banque centrale qu’elles s’attendaient à ce que leurs effectifs restent inférieurs aux niveaux d’avant la pandémie pendant au moins les 12 prochains mois, ou ne se rétablissent jamais complètement.

Environ 100 entreprises ont participé à l’enquête régulière de la banque dévoilée lundi. Leurs réponses ont été recueillies entre la fin août et la mi-septembre, alors que le nombre de cas de COVID-19 était encore faible.

En septembre, le pays avait récupéré environ 2,3 millions des trois millions d’emplois perdus au printemps lorsque des entreprises non essentielles ont été fermées pour freiner la propagation de la COVID-19.

L’enquête auprès des consommateurs a montré que ceux-ci avaient maintenant davantage confiance dans leurs perspectives d’emploi et jugeaient avoir de meilleures chances de trouver un nouvel emploi s’ils devaient perdre le leur. La Banque du Canada a aussi constaté une évaluation à la baisse de la probabilité de perdre un emploi.

Malgré tout, les consommateurs ne sont pas prêts à quitter volontairement leur emploi. Cette éventualité est restée beaucoup plus faible qu’avant la pandémie, malgré une légère amélioration, « ce qui semble indiquer que la santé du marché du travail continue d’être un sujet de forte préoccupation ».

« Si cette situation se traduit par une diminution du taux de roulement, la qualité de l’appariement travailleur-emploi pourrait s’en trouver réduite, entraînant ainsi une baisse de la croissance future de la productivité et des salaires », a précisé le rapport.

Les ménages dépensent moins avec la pandémie

Les préoccupations entourant l’accélération du nombre de cas de COVID-19 ont fait en sorte que des restrictions qui avaient été levées ont été imposées de nouveau dans certaines régions du pays.

À mesure que le nombre de cas augmente, il en va de même pour les craintes de voir reculer les gains d’emplois constatés ces trois derniers mois.

Les libéraux ont prolongé un programme clé de subventions salariales jusqu’à l’été prochain, dans l’espoir de renforcer la confiance des entreprises et de stimuler l’embauche. Près de la moitié des entreprises interrogées ont utilisé ce programme fédéral pour limiter leur nombre de mises à pied, éviter de devoir en faire ou réembaucher rapidement des employés.

Le gouvernement a également facilité l’accès aux prestations d’assurance-emploi, alors qu’environ 1,5 million de Canadiens ont demandé un revenu de soutien depuis la fin septembre.

Le directeur parlementaire du budget (DPB) a estimé que les modifications à l’assurance-emploi auraient un coût brut de 8,6 milliards au cours de cet exercice et de 6,5 milliards pour les 12 mois suivants. Dans une note publiée lundi, le DPB a averti que les estimations sont soumises à des perspectives du marché du travail qui « sont très incertaines ».

L’incertitude quant aux impacts économiques et sanitaires de la pandémie a conduit à une baisse des dépenses de consommation, la banque centrale ayant rapporté que de nombreux consommateurs dépensaient moins, et qu’un plus grand nombre d’entre eux avaient reporté des achats importants.

Les sommes épargnées ont ainsi augmenté.

L’enquête de la banque a suggéré que les ménages à faible revenu étaient plus susceptibles de conserver cette épargne supplémentaire par précaution, mais seulement un peu plus que les gens des autres niveaux de revenu. La majorité des ménages prévoyaient de conserver l’argent supplémentaire par précaution ou rembourser une partie de leurs dettes.

Peu de gens ont dit à la banque qu’ils prévoyaient de dépenser ces épargnes supplémentaires l’année prochaine ou la suivante.

« Alors que plusieurs s’attendent à ce que la reprise soit prolongée, il n’est pas tout à fait étonnant que la majorité des ménages envisagent d’être frugaux et de conserver leurs économies », ont écrit les économistes Sri Thanabalasingam et Ksenia Bushmeneva, de la Banque TD, dans une note.

« Mais, par conséquent, il pourrait s’écouler un certain temps avant que la demande des consommateurs ne se rétablisse complètement. »

Les jeunes travailleurs, ceux âgés de 18 à 24 ans dont le taux de chômage demeure parmi les plus élevés de tous les groupes, étaient moins optimistes quant au retour à un horaire de travail normal que ceux âgés de 25 à 55 ans.

Si ce point de vue se concrétise, la Banque du Canada a prévenu que les jeunes travailleurs pourraient courir le risque de « revers économiques plus persistants ».