Le Syndicat des débardeurs du port de Montréal a déposé vendredi matin un préavis de grève générale illimitée qui débutera lundi prochain. Le regroupement affilié au Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) explique que ce préavis est devenu nécessaire en raison des récentes modifications apportées aux conditions de travail des débardeurs par les compagnies maritimes.

Les débardeurs comptent « fermer le port de Montréal lundi », si « aucune entente de trêve » n’est conclue avec la partie patronale d’ici dimanche.

« La balle est dans le camp des patrons », a lancé le conseiller du Syndicat des débardeurs du port de Montréal (SCFP), Michel Murray, lors d’une conférence de presse vendredi midi.

L’Association des employeurs maritimes (AEM) se dit « déçue » que « même après 65 séances de négociation depuis septembre 2018, nous soyons encore dans l’impasse ».

Dans un communiqué publié vendredi matin, l’AEM affirme avoir déposé une contre-proposition de trêve, avec obligations de résultat, que le comité exécutif du syndicat a refusée.

L’annonce des débardeurs est une suite de l’escalade récente des tensions entre les syndiqués et l’Association des employeurs maritimes.

Lundi dernier, un préavis patronal de 72 heures a été envoyé au syndicat pour annoncer une modification à la baisse de certaines conditions salariales prévues à la convention collective. Il était ainsi prévu que les salaires horaires des débardeurs et des hommes d’entretien qui travaillent le soir, la nuit et la fin de semaine seraient modifiés à compter de jeudi à 15 h.

Deux fois au cours des dernières semaines, le syndicat a déclenché une grève de quatre jours. Le syndicat a affirmé que depuis lundi dernier, plusieurs navires ont été détournés vers d’autres ports dont ceux de Halifax, New York et Saint-Jean au Nouveau-Brunswick.

L’Administration portuaire de Montréal (APM) se dit « hautement préoccupée » par les « impacts importants » des récentes grèves des débardeurs et par la nouvelle menace d’une grève générale illimitée.

« Les activités portuaires sont essentielles à la bonne marche de l’économie et pour le ravitaillement, entre autres, des produits alimentaires et autres biens essentiels », écrit l’exploitant dans un communiqué publié en fin d’après-midi.

L’APM plaide que 6300 entreprises en transport dépendent du port et qu’il est à l’origine de 19 000 emplois. Une grève forcerait notamment, dit-elle, les lignes maritimes internationales à rediriger certains navires, parfois vers des ports concurrents américains, ce qui occasionnera des coûts importants pour les entreprises et, ultimement, les consommateurs.

L’administration portuaire implore le gouvernement fédéral de poursuivre son intervention et de déployer rapidement « tous les moyens nécessaires » pour aider les parties à en venir à une entente.

Horaires de travail

Les pourparlers achoppent principalement sur la question des horaires de travail.

« On pense que l’employeur met plus d’argent dans le juridique qu’il en met à la table de négociation », a déclaré le représentant syndical Michel Murray vendredi, en faisant référence à la bataille que les deux partis se sont livrée, pendant 21 mois, sur la définition de « service essentiel », au milieu des négociations pour une nouvelle convention collective.

Le Conseil canadien des relations industrielles a conclu le mois dernier que l’association des employeurs n’avait pas démontré « de risques imminents et graves pour la santé et la sécurité du public » – les critères d’un service essentiel – en cas de grève.

L’Association des employeurs maritimes avait demandé au conseil en octobre 2018 d’examiner si les débardeurs effectuent des travaux essentiels dans le but de protéger les quais contre les menaces de grève.

Le syndicat soutient avoir déposé des offres pour revoir de façon fondamentale les horaires de travail.

Le conseiller syndical au SCFP, Michel Murray, a expliqué que les débardeurs sont sollicités pour travailler 19 jours sur 21, avant d’avoir un congé de deux jours, à cause de la forte activité au port de Montréal.

En 2015, les débardeurs du Québec gagnaient en moyenne 110 000 $ avant les prestations, selon les chiffres du ministère du Travail de la province. Les avantages sociaux des débardeurs montréalais s’élèvent à 22 000 $ annuellement, y compris un régime de retraite à prestations déterminées payé par l’employeur.

La convention collective entre le syndicat et l’Association des employeurs maritimes (AEM) est échue depuis le 31 décembre 2018.

La semaine dernière, cinq regroupements d’employeurs ont dit être préoccupés par l’impact sur l’économie de l’escalade des tensions au port de Montréal. Le Conseil du patronat du Québec (CPQ), la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM), la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) et Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ) ont appelé tous les gouvernements à intervenir rapidement pour limiter les dégâts pouvant découler du prolongement de cette situation.