Trouver une religieuse dans un presbytère ne devrait pas être une mission impossible. Mais lorsqu’il s’agit d’un fromage, gagnant du premier prix au concours Sélection Caseus, la tâche devient plus ardue. Depuis qu’il a obtenu l’or en septembre au concours des fromages québécois, la Religieuse, produit par la Fromagerie du Presbytère à Sainte-Élizabeth-de-Warwick, est introuvable.

Un phénomène qui semble se répéter année après année, confirme Yannick Achim, marchand fromager, propriétaire de cinq succursales de Yannick Fromagerie.

« À court terme, on en manque, admet d’emblée Jean Morin, propriétaire de la Fromagerie du Presbytère. On va être correct pour les Fêtes », assure-t-il toutefois. En 2017, c’est son Taliah, un cheddar de brebis, qui avait remporté le premier prix au concours Sélection Caseus. Il en avait également manqué.

Avec sa Tomette, lauréate du Caseus d’argent, Simon Hamel, de la fromagerie L’Atelier, est lui aussi victime de son succès. « C’est sûr que j’ai eu beaucoup de questions sur le produit, beaucoup de demandes, affirme-t-il. Il y a de l’ajustement à faire. Il va y en avoir par intermittence jusqu’à ce que je trouve le bon niveau », explique le fromager, qui assume seul sa production et qui loue des installations pour sa fabrication.

Fier de ce prix, Simon Hamel doit « jongler avec de nouvelles données ». Bien qu’il ait l’intention de doubler sa production, sa fameuse Tomette, une pâte ferme au lait de chèvre, nécessite quatre mois d’affinage. « Je pense qu’il ne faut pas avoir peur de manquer de fromage. S’il y en a trop, ça devient un produit de commodité. »

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Yannick Achim, marchand fromager, estime que Sélection Caseus demeure « le plus beau concours qu’on puisse avoir en Amérique du Nord », bien que des fromageries lauréates n’aient pas été prêtes à faire face à la demande. À son avis, les pénuries, « c’est un mal nécessaire ».

Bien qu’il comprenne ce que vivent les petits producteurs, Yannick Achim se désole néanmoins de cette situation. Il souhaiterait que les fromages primés prennent place dans son comptoir. « Dans le cas des trois premiers Caseus, les produits ne sont pas disponibles sur le marché. Les quantités sont minimes. Ils n’étaient pas prêts à faire face à la demande. »

Yannick Achim souligne par ailleurs que ces pénuries ne sont pas toujours le lot des petits. En 2009, le Cendrillon, produit par la fromagerie Alexis de Portneuf, propriété de Saputo, avait été sacré meilleur fromage au monde aux World Cheese Awards. Résultat : les supermarchés où il était distribué ont vu leurs réserves fondre comme neige au soleil, et le produit est devenu pratiquement introuvable.

Malgré tout, M. Achim estime que Sélection Caseus demeure « le plus beau concours qu’on puisse avoir en Amérique du Nord ». Les pénuries, « c’est un mal nécessaire », conclut-il.