Vous cherchez des cadeaux de Noël originaux ? Des objets tripants, conçus et fabriqués ici par des entreprises de propriété québécoise ? Marie-Claude Lortie vous fait quatre suggestions et vous raconte l’histoire des lutins-entrepreneurs derrière ces présents.

Vol Privé

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Des produits de Vol Privé

Les cadeaux : des masques pour dormir dans l’avion, le bus ou le train, des couvertures de voyage, des oreillers pour soutenir la tête, bref, des accessoires pour les voyageurs au design moderne, tout en mérinos, donc lavables à la machine.
La marque : Vol Privé
Les prix : de 79 $ à 220 $
L’entrepreneure : Marie-Claude Roulier, 47 ans

L’histoire

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Marie-Claude Roulier a créé Vol Privé. Elle propose tout ce dont on a besoin quand on va en avion : des couvertures, des masques, des coussins, avec un design et une qualité de tissu nettement supérieurs à ce que les avions offrent.

Diplômée de HEC Montréal, Marie-Claude Roulier travaille pendant 10 ans à Air Canada, avant de prendre un long congé de maternité pour ses trois filles. Au retour, elle repart dans le milieu de l’aéronautique, chez Bombardier, dans la division des avions d’affaires, où elle veille sur les acheteurs à partir du moment où le contrat d’achat est signé, notamment pour l’aménagement et la préparation des aéronefs. Après deux ans, elle quitte cet emploi pour devenir directrice d’un bureau d’avocats, mais au bout de quatre ans, elle décide de réaliser un rêve : se lancer en affaires. Les voyages, les avions, elle en raffole. Et comme elle a constaté un certain manque dans l’accessoire de voyage de luxe, mais pratique, alors qu’elle était chez Bombardier – où elle devait voyager sans arrêt –, elle en fait son projet. Elle propose tout ce dont on a besoin quand on va en avion : des couvertures, des masques, des coussins, avec un design et une qualité de tissu nettement supérieurs à ce que les avions offrent, même dans les classes affaires et compagnie. Elle choisit le mérinos, une laine douce et chaude, plus facile à laver que le cachemire. « Et c’est du slow fashion – de la mode responsable, explique la fondatrice de Vol Privé. Je suis dans l’esprit “acheter moins, acheter mieux”. Je veux que les gens gardent ça longtemps. »

L’entreprise

Chez Vol Privé, tout est fabriqué au Québec à partir de balles de fil de laine de moutons mérinos australiens, teinte et filée en Italie. C’est Marie-Claude Roulié qui fait le design des produits. « Je n’ai pas étudié le design, mais j’ai grandi dans un atelier de couture comme salle de jeu – ma mère faisait mes vêtements avec le restant de ses beaux tissus et aller chez Marshall’s était comme aller à l’épicerie pour nous ! » La laine est tricotée à Pointe-Claire chez Tricot Maxime, les billes de plastique des petits sachets moulants intégrés aux masques pour les rendre un peu lourds et apaisants proviennent d’une usine de Delson. La mousse mémoire des oreillers arrive de chez Zedbed à Shawinigan, tandis que Confections Pagar assemble les morceaux de laine tissés, coupés par Marie-Claude Roulier à son atelier de Saint-Lambert, dans le sous-sol de sa maison. « Mes employés ? Moi-même et une couturière deux jours par semaine. » 

Le défi

« Est-ce rentable ? J’y arrive ! », lance Marie-Claude Roulier. « En 2020, je devrais commencer à faire de l’argent, après deux ans et demi. » Mais même si ça ne marche pas l’année prochaine, la femme d’affaires se donne encore un an ou deux de plus. « Je sais que le potentiel est là. Ce qui est difficile, c’est d’augmenter la production. » Tout est assez artisanal, à petite échelle. Que faire si soudainement des commandes imposantes arrivent ? La femme d’affaires se prépare, autant du côté production que du démarchage de clientèle. Lorsqu’on l’a rencontrée, Marie-Claude Roulier partait pour le salon One of a Kind à Toronto, un immense salon d’artisans où les masques se sont vendus comme des petits pains. Elle était aussi présente au Souk à Montréal. « Je vends aussi beaucoup en ligne, je suis dans plusieurs boutiques. Et j’ai développé les comptes corporatifs. » Vu la petite taille de l’entreprise, les produits peuvent être aisément personnalisés par les entreprises qui veulent faire des cadeaux à leurs clients.

Énamour

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Un échantillon de produits d'Énamour

Les cadeaux : de beaux produits véganes pour la peau, unisexes, pour tous les âges, dans des contenants de verre au design minimaliste et fabriqués à partir d’ingrédients naturels, au Québec. 
La marque : Énamour
Les prix : de 12 $ à 44 $
L’entrepreneure : Marie Custeau, 41 ans (avec l’aide de son mari Damon Sloane, 39 ans)

L’histoire

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Marie Custeau a décidé de lancer Énamour. Elle propose de beaux produits naturels, dans de beaux flacons, fabriqués au Québec, parfumés aux huiles essentielles choisies pour leurs propriétés.

Énamour a commencé à la fin de novembre 2015. Marie Custeau, diplômée en relations publiques, avait longtemps travaillé dans le monde des projets numériques, à Radio-Canada notamment, ainsi que dans des agences de publicité. Mais avec deux enfants, un besoin de flexibilité et de créativité, elle décide de se lancer en affaires, avec son mari, spécialiste du commerce en ligne, qui gardera toutefois son travail à temps plein, histoire de fournir au moins un revenu fixe au couple. Damon Sloane est un Australien que Marie Custeau a rencontré durant un séjour de plus de trois ans à Sydney. Le créneau d’Énamour : de beaux produits naturels, dans de beaux flacons, fabriqués au Québec, parfumés aux huiles essentielles choisies pour leurs propriétés. « J’en pouvais plus des produits naturels dans des bouteilles en plastique laides », dit Marie Custeau. La source d’inspiration pour les produits Énamour est australienne. C’est la marque Aesop, fondée à Sydney. Sauf qu’en plus d’être unisexe, le positionnement de la marque Énamour a maintenant glissé vers l’unifamilial. Les crèmes peuvent être utilisées autant par les parents que les enfants, pour le nettoyage autant que pour l’hydratation. « Acheter moins, acheter mieux », dit Marie Custeau. Un seul produit qui fait tout – par exemple, le liniment – réduit le gaspillage et les emballages.

L’entreprise

Énamour ne compte pas d’employés, juste des collaborateurs. Marie Custeau fait fabriquer tous ses produits au Québec. Elle est la directrice artistique, mais le graphisme et le design des produits sont confiés à des pigistes, comme Marie-Hélène Goulet, qui a défini l’image de la marque. Les crèmes sont fabriquées au laboratoire Du-Var à Boucherville, les savons, à Eastman. Une grande partie des ventes se font en ligne, mais l'entreprise a aussi maintenant la moitié d’une boutique sur l’avenue du Parc, avec La fée raille, où elle offre notamment la vente en vrac et le remplissage de certains produits, pour ceux qui veulent éviter les déchets.

Le défi

Le marketing marche super bien, dit Marie Custeau. Articles dans le ELLE France, Glamour France aussi, les produits se sont même retrouvés dans un spa à New York. Elle ne doute pas de la qualité du produit, de calibre international. Mais après quatre ans en affaires, Marie Custeau ne s’est toujours pas versé de salaire. Sa famille vit grâce au revenu de Damon, qui travaille en commerce électronique chez DavidsTea. Marie, qui fait essentiellement tout le démarchage, cherche donc une grande surface ou une chaîne pour les produits, même s’ils sont déjà vendus dans 45 boutiques, incluant Smallable, un concept store français pour la famille. L’année prochaine, il lui faut du volume, dit-elle. Les supermarchés Avril, The Detox Market, Whole Foods… ? Elle les approche tous. « C’est le défi de 2020 », affirme la jeune femme d’affaires. Les Pharmaprix de ce monde ? « Faut que j’y pense », dit-elle. Trouver où se retrouve son créneau « design, naturel, haut de gamme, mais accessible ». Un plan rêvé : être remarqué par l’équipe de Gwyneth Paltrow et du site Goop – comme ce fut le cas pour la québécoise The Unscented Company –, parce qu’en ce moment, c’est une vitrine très efficace pour établir des standards dans le monde des produits de bien-être chics.

Bergerie de la Nouvelle France

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Des couvertures de laine de mouton et d’agneau de la Bergerie de la Nouvelle France

Le cadeau : des couvertures de laine de mouton et d’agneau 
La marque : Bergerie de la Nouvelle France
Les prix : de 89,95 $ à 189,95 $
Les entrepreneurs : Marie-Chantal Houde, 38 ans, et Jean-Paul Houde, 39 ans

L’histoire

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Jean-Paul et Marie-Chantal Houde sont frère et sœur. En plus du lait de brebis et de fromages, ils proposent des vêtements et objets de laine.

Marie-Chantal et Jean-Paul Houde sont frère et sœur. Leur ferme est celle de leur grand-père maternel, qui élevait jadis des vaches, travail repris ensuite par le père de nos deux entrepreneurs. C’est quand celui-ci est mort, il y a 13 ans, que les deux enfants ont reçu la ferme en héritage. Tout de suite, les deux jeunes se sont dit qu’ils feraient non pas de la production de lait à boire, mais du fromage. « Mais on trouvait que le marché commençait à être saturé pour les produits de lait de vache », explique Marie-Chantal. C’est alors qu’est venue l’idée de choisir les brebis. En plus, le Val-Saint-Francois, où est situé leur village de Racine, a longtemps été une région traditionnellement consacrée à la production ovine. « C’est la région de la motoneige – Valcourt est à côté –, mais c’est aussi la région la plus prolifique pour les brebis à laine. » C’est aussi la deuxième région en importance pour la production d’agneaux, après le Bas-Saint-Laurent. À travers tout ça, Marie-Chantal a obtenu un bac en agronomie à McGill, puis elle est partie étudier l’art de fabriquer du fromage en France, dans le Jura. C’est en 2010 qu’a commencé la production de fromages de lait de brebis qui ont rapidement connu le succès : le Zacharie Cloutier, le Madelaine, entre autres. Il y a aussi maintenant du yaourt. Et puis, il y a deux ans environ, Claire Cloutier, la mère des deux jeunes entrepreneurs, leur a demandé pourquoi ils ne feraient pas quelque chose avec la laine des animaux. « C’est chaud, c’est biodégradable, c’est écologique, c’est noble, c’était évident qu’effectivement, il fallait faire quelque chose avec ça », dit Marie-Chantal. C’est là qu’ils ont lancé cette autre activité : la fabrication de couvertures, de chaussettes, de bonnets, de laine à tricoter.

L’entreprise

Nouvelle France, avec sa dizaine d’employés, est d’abord et avant tout une bergerie – pour la production de lait de brebis – et une fromagerie – pour la production de fromages de lait de brebis – qui travaille aussi avec du lait d’autres producteurs. La production de vêtements et d’objets de laine est une nouveauté, mais ancrée dans une longue tradition régionale. À Ulverton, non loin de Racine, il y a un moulin à laine datant de 1840, construit par des colons écossais. La région a longtemps été la productrice des vêtements de laine de l’armée notamment. Malheureusement, explique Marie-Chantal, il ne reste plus de tisserands ni de fileurs dans le val. La laine de Nouvelle France est donc envoyée à l’Île-du-Prince-Édouard, au moulin McAuslan, spécialiste des couvertures à l’ancienne. Sinon, avant, les toisons étaient envoyées à une coopérative en Ontario qui envoyait le tout en Chine. (Ironie, cette laine est souvent rachetée au Québec après avoir été traitée là-bas.) Les bonnets de Nouvelle France sont tricotés à Racine par un employé de la fromagerie. Il y a aussi une collaboration avec des artisans de Charlevoix pour des chaussettes.

Le défi

La production de vêtements et autres objets en laine n’est pas le premier produit de la Fromagerie et de la Bergerie de la Nouvelle France. Mais c’est une activité qui s’imbrique parfaitement bien dans la philosophie des deux entrepreneurs, qui adorent plonger dans leurs racines ancestrales – leurs fromages ont les noms des premiers colons de leur famille, arrivés au Québec en 1634 et 1642 – et celles de leur région. C’est aussi une façon de valoriser un sous-produit de la production de fromage. Actuellement, ils doivent payer 3 $ pour faire tondre une brebis, alors que la laine revendue vaut à peine 50 cents. Il faut donc trouver une façon de déployer ce volet de l’entreprise, mais en marge des activités centrales de la fromagerie. Les entrepreneurs pensent notamment à développer le créneau des cadeaux d’affaires. « On veut fermer la boucle avec tout ce qu’on produit. » La viande d’agneau de la Bergerie est aussi commercialisée. Pour le moment, les couvertures sont vendues uniquement à la fromagerie, à Racine. Il faut appeler là-bas directement. L’onglet du site web pour la vente en ligne devrait toutefois être fonctionnel en 2020.

LVNEA

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Des produits de LVNEA

Les cadeaux : des bougies et des parfums naturels, fabriqués à base de plantes, à Montréal, avenue du Parc
La marque : LVNEA
Les prix : de 45 $ à 96 $
L’entrepreneure : April Lea, 37 ans

L’histoire

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

April Lea, photographe diplômée de l’Université Temple originaire de Philadelphie, a toujours eu une passion pour les parfums. Elle propose des bougies et des parfums naturels, fabriqués à base de plantes.

April Lea est une photographe diplômée de l’Université Temple, originaire de Philadelphie, qui a toujours eu une passion pour les parfums. En 2009, elle est venue en vacances avec une amie au Québec. Elle n’est jamais repartie. Après avoir travaillé pendant environ cinq ans comme photographe commerciale à Montréal, notamment pour des entreprises de vente en ligne, elle a accepté l’offre d’une copine de Philadelphie de partir en tournée aux États-Unis pendant trois mois, avec une boutique éphémère de produits artisanaux. C’est là qu’April a commencé à vendre ses petits parfums naturels, fabriqués à partir de plantes, dans son studio. Et les produits ont été très bien reçus. Et c’est là aussi qu’elle a commencé à comprendre le marché des milléniaux, le rôle d’Instagram pour le marketing des produits et le potentiel des plateformes de vente comme Etsy, où elle a continué à vendre ses parfums. « Ça, ça a vraiment aidé », dit-elle. Elle a par la suite lancé son propre site, officiellement il y a six ans, et April travaille aujourd’hui sur la plateforme Shopify. Depuis juin, elle a une boutique-atelier sur l’avenue du Parc, dans le Mile End.

L’entreprise

Avec ses quatre employés, LVNEA est à la fois une boutique en ligne, une boutique physique et un atelier, qui vend des parfums naturels, des bougies et quelques autres produits à base de plantes partout dans le monde. Plusieurs de ses produits sont véganes. Les commandes arrivent de Sibérie, d’Australie, du Japon… Un parfum conçu récemment avec la chanteuse américaine Chelsea Wolfe est tombé en rupture de stock après 24 heures. Formée comme photographe, April Lea est une autodidacte de la parfumerie, mais elle a une solide expérience de marketing par les réseaux sociaux et de vente en ligne. C’est elle qui prend toutes les photos pour le site web et pour les mettre sur les différentes plateformes de diffusion de la marque.

Le défi

Pour garder les prix le plus bas possible, LVNEA ne fait pratiquement que de la vente directe, en magasin ou en ligne. Elle ne vend que très peu dans le gros à des distributeurs. Une chandelle fabriquée totalement à partir de produits naturels peut aisément coûter, dans une boutique, le double du prix demandé par LVNEA. Donc la croissance devra se faire dans l’atelier et par la vente en ligne. « Or, on est déjà à l’étroit », dit-elle. April Lea rêve aussi peut-être d’un spa dans la forêt. Et espère pouvoir un jour se payer un salaire. Pour le moment, elle vit de ses économies. Et réinvestit tous ses revenus et profits dans son entreprise.