(Washington) Deux des plus grands cigarettiers mondiaux, Philip Morris International et Altria, sont en pourparlers pour refusionner et trouver ensemble les moyens de compenser l’inexorable chute des ventes de cigarettes.

Pour l’heure, Philip Morris, qui a confirmé la rumeur dans un bref communiqué juste avant l’ouverture de la Bourse, reste prudent sur l’issue de ces discussions.

Il n’y a aucune garantie que cette « fusion entre égaux » voie le jour, précise le groupe dans un communiqué, ajoutant qu’il ne fera aucun autre commentaire.

Les deux entreprises tentent de trouver la parade à la chute des ventes de cigarettes, chacune en investissant dans des alternatives comme le vapotage, ou encore le tabac à froid.

Mastodonte

Si la transaction devait se faire-uniquement par échange d’actions, a précisé Philip Morris-elle créerait un mastodonte pesant plus de 200 milliards de dollars de valorisation boursière et plus de 55 milliards de dollars de chiffre d’affaires, réalisé pour l’essentiel par les marques emblématiques comme Marlboro.

Les deux groupes, séparés il y a une dizaine d’années, vendent les même marques, l’un à l’international, comme son nom l’indique, et l’autre aux États-Unis.

La fusion se ferait sur la base de 59 % à PMI et 41 % à Altria crois savoir CNBC. En revanche, les rôles de direction seraient équitablement partagés, selon la chaîne d’informations financières.  

Elle pourrait être annoncée d’ici deux semaines, selon la même source.  

Le titre Altria affichait une baisse de 4 % à la clôture de Wall Street et Philip Morris chutait de presque 8 %.

Philip Morris pèse plus de 113 milliards de dollars en Bourse et Altria près de 84,5 milliards.  

Altria a réalisé un chiffre d’affaires de 25,4 milliards de dollars lors de l’exercice 2018 pour un bénéfice net de presque 7 milliards de dollars.  

Philip Morris International (PMI), pour sa part, a affiché un chiffre d’affaires de presque 30 milliards de dollars pour un bénéfice net de 7,9 milliards de dollars.

Tabac froid

Pour se diversifier,  Altria a annoncé fin décembre un investissement historique de 13 milliards de dollars dans Juul, une start-up basée à San Francisco qui, en trois ans, a conquis les trois quarts du marché des cigarettes électroniques aux États-Unis.

« Nous agissons avec vigueur pour préparer un avenir dans lequel les fumeurs adultes choisissent en masse les produits non combustibles de préférence aux cigarettes », avait alors expliqué le PDG d’Altria, Howard Willard.

Cet investissement, le plus important de l’histoire d’Altria, valorise la jeune société à 38 milliards de dollars. Et Juul-qui n’est pas cotée en Bourse-restera indépendante, assure Altria.  

Juul s’est aussi assurée qu’Altria ne puisse pas posséder plus de 35 % de son capital et d’être son unique partenaire sur le marché des vaporettes pendant au moins six ans.

Altria vise aussi de nouveaux marchés à fort potentiel. Il a ainsi récemment investi massivement dans le cannabis en achetant 45 % du groupe canadien Cronos, pour 1,8 milliard de dollars.

Quant à Philip Morris, il compte radicalement changer d’image et veut utiliser la technologie contenue dans ses nouveaux produits de vapotage pour offrir des services de dépistage de santé.  

Il y a trois ans, PMI avait annoncé son intention de réduire sa production de cigarettes classiques pour les remplacer par une ligne de produits « sans fumée », comme les cigarettes électroniques et les articles qui chauffent le tabac sans le brûler.

Soucis de santé

Le vapotage rencontre un immense succès auprès des jeunes. Ainsi les cigarettes électroniques de Juul, au design épuré, s’arrachent et l’attrait du produit est encore multiplié par les parfums des « jus ».

Les cigarettiers présentent la version électronique comme une alternative beaucoup moins nocive aux cigarettes classiques.

Mais, selon l’Organisation Mondiale de la Santé, les cigarettes électroniques sont « incontestablement nocives » et devront être régulées. Un avis partagé par de nombreuses autorités sanitaires, qui voient avec inquiétude les jeunes se ruer sur ces nouveaux produits.  

Aux États-Unis, les autorités sanitaires fédérales ont recensé depuis fin juin 193 cas potentiels de maladies pulmonaires sévères associées à du vapotage dans 22 des 50 États. Une personne a même succombé fin août.

La cause de ces maladies n’a pas été découverte mais tous les malades avaient récemment utilisé des cigarettes électroniques pour inhaler de la nicotine et, souvent, du cannabis, selon les Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC).