L’action de Canopy Growth a perdu vendredi plus de 7 % après que le producteur de cannabis a fait état d’une hausse de ses revenus pour le quatrième trimestre, mais d’une plus importante perte que prévu en raison d’une montée en flèche de ses dépenses d’exploitation.

Le titre de la plus grande société de cannabis au pays au chapitre de la valeur boursière a retraité de 4,39 $, soit 7,6 %, à 53,28 $ à la Bourse de Toronto dans la foulée de la publication de ses résultats financiers pour le trimestre clos le 31 mars.

Canopy a affiché un chiffre d’affaires de 94,1 millions, comparativement à celui de 22,8 millions de la même période l’an dernier. Les analystes visaient des revenus de 92,6 millions, selon les prévisions recueillies par Thomson Reuters Eikon.

Cependant, la perte nette attribuable aux actionnaires de la société de Smiths Falls, en Ontario, a gonflé à 335,6 millions, ou 98 cents par action, en regard de celle de 61,5 millions, ou 31 cents par action, de la même période un an plus tôt.

C’est trois fois la perte nette de 30 % par action attendue par les analystes, selon Thomson Reuters Eikon.

Le cochef de la direction de Canopy, Bruce Linton, a indiqué qu’il investissait beaucoup pour assurer la croissance à long terme de l’entreprise, notamment en augmentant sa capacité de production et en préparant le lancement de produits comestibles et d’autres produits à base de cannabis, dont la légalisation est prévue plus tard cette année.

« Il faut utiliser ce capital pour développer son envergure. Et nous l’avons fait », a-t-il affirmé lors d’une conférence téléphonique vendredi, soulignant que ces investissements avaient permis de développer des actifs qui ne contribuaient pas encore au résultat net.

Sur une base ajustée, la perte avant intérêt, impôts, dépréciation et amortissement a atteint 98 millions, comparativement à 21,7 millions un an plus tôt, les dépenses d’exploitation ayant progressé de plus de 300 %.

Les charges d’exploitation trimestrielles ont totalisé 242,9 millions, alors qu’elles avaient été de 56,2 millions au quatrième trimestre de 2018.

« Le manque de rentabilité ne devrait pas surprendre étant donné les commentaires récents de la société sur les engagements d’investissement », a observé l’analyste Ryan Tomkins, de la firme Jefferies, dans une note adressée aux clients. « Mais, compte tenu de l’ampleur des pertes et du fait que la rentabilité est de plus en plus surveillée par les investisseurs, cela suscitera probablement des inquiétudes. »

Une faible marge brute

Vivien Azer, analyste chez Cowen, a estimé que les revenus trimestriels étaient « encourageants » par rapport aux estimations et que Canopy restait le chef de file des ventes totales de cannabis parmi les principaux producteurs canadiens autorisés.

Cependant, cela a été contrebalancé par une marge brut d’une faiblesse record, soit 16 %, et une plus importante perte, a-t-elle observé dans une note aux clients.

« Bien que nous comprenions que l’industrie en est à une phase naissante, (Canopy) devra manifestement commencer à faire preuve de discipline en matière de dépenses et de levier d’exploitation pour maintenir la confiance des investisseurs », a écrit Mme Azer.

Sur une base annuelle, Canopy a enregistré des produits nets de 226,4 millions pour l’exercice 2019, en hausse par rapport à ceux de 77,9 millions de l’exercice précédent, soit avant la légalisation du cannabis récréatif en octobre.

La perte nette annuelle attribuable aux actionnaires s’est élevée à 685,4 millions, en hausse par rapport à celle de 70,4 millions de l’exercice précédent.

M. Linton a admis vendredi que la société de cannabis avait atteint le « creux de notre marge ».

« D’ici à ce que nous finissions cette année, nous allons remonter notre modèle de marge pour revenir où nous nous trouvions, et nous aimerions faire aussi bien ou mieux », a-t-il indiqué aux analystes, soulignant ses investissements et le potentiel de la vente de produits comestibles à forte marge dès décembre.

Rentabilité dans deux ans ?

Les revenus de Canopy liés au cannabis récréatif, en gros et au détail, se sont élevés à 68,9 millions au plus récent trimestre. Le Canada a légalisé le cannabis à usage récréatif en octobre.

Les revenus bruts du cannabis médicinal au Canada pour le trimestre ont totalisé 11,6 millions, en baisse par rapport à ceux de 19,5 millions de la même période l’année précédente.

Les revenus du cannabis médicinal à l’international ont également reculé, ne s’établissant qu’à 1,8 million au dernier trimestre, contre 2,4 millions un an plus tôt et 2,7 millions au troisième trimestre.

Les détaillants de cannabis ont été confrontés à des pénuries d’approvisionnement depuis la légalisation, ce qui a incité certaines provinces à retarder la délivrance de nouvelles licences de vente au détail et d’autres à limiter les heures d’ouverture des magasins. La situation s’est cependant améliorée ces derniers mois.

Alors que la société se lance sur le marché américain du CBD — maintenant qu’une loi américaine a ouvert une voie légale à cet effet — et déploie une série de produits dérivés du cannabis à partir de décembre, Canopy s’attend à réaliser un bénéfice avant impôts, intérêt et amortissement dans environ deux ans, soit son exercice 2021.

« Nous ne donnons pas de prévisions précises, mais cela ressemble à une cible raisonnable et probable », a affirmé M. Linton.