Le voyagiste Transat A.T., qui détient notamment la filiale Air Transat, a confirmé hier qu’il était en discussion avec plusieurs parties concernant la vente de l’entreprise. Selon nos informations, WestJet et Air Canada sont sur les rangs.

Au cours de l’assemblée annuelle des actionnaires hier à Montréal, le président et chef de la direction de la société, Jean-Marc Eustache, a signalé que le déménagement du centre décisionnel de l’entreprise à l’extérieur de la province n’était pas dans ses intentions. Air Canada est établie à Montréal, tandis que WestJet est à Calgary.

« Est-ce que la société va partir du Québec  ? Ce n’est pas notre intention, a-t-il dit, d’un ton qui se voulait rassurant, devant les actionnaires. Est-ce que la société sera vendue ? C’est le conseil d’administration qui prendra cette décision-là. »

Toutefois, dans un point de presse, à l’issue de l’assemblée, M. Eustache a refusé de confirmer ce qu’il avait déclaré plus tôt concernant la volonté de garder Transat dans la province. « Je n’ai jamais dit ça, s’est-il défendu. Je [ne peux] rien dire. On verra, je ne peux pas vous répondre. »

M. Eustache a toutefois tenu à rappeler que la loi fédérale sur le transport « ne permet pas à un étranger de s’emparer de la compagnie ». « Donc, la compagnie va rester obligatoirement canadienne », a-t-il précisé. Ottawa impose un plafond de 49 % de participation étrangère dans une compagnie aérienne.

Air Canada et WestJet ont décliné nos demandes de commentaires hier. Toute transaction serait soumise au Bureau de la concurrence. Pour Air Canada, une acquisition de Transat pourrait être plus difficile à faire accepter à ce chapitre, selon Jacques Roy, professeur titulaire à HEC Montréal.

L’action bondit

À la Bourse de Toronto, hier, l’annonce de la vente possible a fait grimper la valeur de l’action de 46,2 %.

Par ailleurs, plusieurs questions demeurent sans réponse. Depuis combien de temps les discussions durent-elles ? Quelles sont les offres qui ont été mises sur la table ? Le grand patron a été avare de commentaires.

« Il y a des compagnies qui nous ont approchés, s’est-il contenté de dire. Le problème, c’est qu’à un moment donné, il y a eu des fuites dans le marché. Et là, ça partait dans tous les sens, et la société a décidé qu’il fallait ramener ça à l’ordre. Le conseil d’administration a décidé de publier ce communiqué de presse. »

« Je ne peux pas donner de timeline. On n’a aucune idée de combien de temps ça peut prendre, si ça va aller jusqu’au bout, etc. » — Jean-Marc Eustache

Chose certaine, Jean-Marc Eustache a assuré qu’il tiendrait le gouvernement du Québec au courant de l’évolution des discussions. Rappelons que le premier ministre François Legault est l’un des cofondateurs de l’entreprise qui a vu le jour en 1987.

« C’est évident qu’à partir de maintenant, on va informer toutes les parties prenantes, a-t-il assuré. C’est certain. »

Année difficile

Par ailleurs, le grand patron de Transat n’a pas caché que le dernier exercice a été difficile.

Celui-ci se termine par une perte nette ajustée de 24,5 millions de dollars. La société enregistre également énormément de dépenses dans son projet de développement hôtelier à Puerto Morelos, près de Cancún, au Mexique.

« Ceci représente aujourd’hui essentiellement des dépenses, de l’énergie et des investissements, mais quand nos hôtels s’ouvriront, cela changera singulièrement le profil de Transat, y compris sur le plan financier », a déclaré M. Eustache en assemblée.

Pour diminuer ses coûts, l’entreprise est également en train de reconvertir sa flotte. « On l’avait dit, d’ailleurs, que l’année 2019 serait difficile parce que c’est l’année de transition. Nous avons dit que l’on reviendrait en force en 2021 et 2022. »

La relève

Le président et chef de la direction, aujourd’hui âgé de 71 ans, a balayé du revers de la main l’idée voulant que son éventuel départ à la tête de la compagnie puisse coïncider avec la vente de Transat. « Ça n’a rien à voir, assure-t-il. On fera ça en temps et lieu. Je n’ai jamais donné de date. Mais bon, ça ne prendra pas des siècles. Je vieillis. »

Annick Guérard, chef de l’exploitation chez Transat, a déjà été désignée comme celle qui allait lui succéder.

— Avec Isabelle Dubé et Richard Dufour, La Presse