Air Canada (T.AC.B) rêve d'une liaison Montréal-Beyrouth. Les événements et la politique conspirent cependant pour lui mettre des bâtons dans les roues.

«Beyrouth, c'est le plus gros marché qui n'est pas desservi à Montréal, a lancé le vice-président général et chef des Affaires commerciales d'Air Canada, Ben Smith, au cours d'un entretien téléphonique avec La Presse Affaires. Mais nous n'avons pas les droits pour une telle liaison. Il n'y a pas d'entente aérienne entre le Liban et le Canada.»

Il a noté que le marché local était très solide. Selon le recensement de 2006, près de 61 000 personnes d'origine libanaise vivent au Québec, en grande majorité dans la région montréalaise. Mais Air Canada viserait également la clientèle américaine et latino-américaine. À l'heure actuelle, il n'y a aucune liaison directe entre le Liban et les Amériques. Or, il y a de grandes communautés d'origine libanaise au Michigan, au Texas et en Californie, mais aussi en Amérique du Sud. Il y a notamment beaucoup de liens commerciaux entre le Liban et le Mexique.

«Si nous mettons cela ensemble, c'est un énorme volume, a observé M. Smith. Ça mettrait Montréal sur la carte en fait de point de correspondance.»

Le président de l'Association canadienne libanaise-syrienne du Québec, Nabil Fawaz, ne se fait cependant pas d'illusions. «C'est quelque chose que nous demandons depuis une dizaine d'années, a-t-il soupiré. On s'était apprêté à créer une telle liaison en 2000, mais les événements de septembre 2001 sont survenus et tout est tombé à l'eau.»

Il a affirmé que le Liban était pénalisé pour rien.

«Il n'y a jamais eu un seul Libanais associé au terrorisme, a-t-il plaidé. Et le Liban n'a pas la puissance financière ou économique pour faire de la pression sur le Canada.»

M. Smith a reconnu qu'il y avait des considérations autres que commerciales qui entraient en jeu.

«Il y a eu une guerre il y a quelques années, a-t-il rappelé. Ce n'est pas évident.»

Il a toutefois fait valoir que la France, le Royaume-Uni, l'Allemagne et l'Italie avaient conclu des accords aériens avec le Liban.

«S'ils sont satisfaits de la situation au Liban, ce devrait être correct pour nous aussi», a-t-il déclaré.

Le vice-président a affirmé qu'Air Canada faisait du lobby auprès du gouvernement canadien pour l'amener à conclure un accord aérien avec le Liban. Le transporteur a l'appui de députés dont les circonscriptions comprennent de fortes communautés d'origine libanaise.

«Ils font le lobby à la mauvaise place, a affirmé M. Fawaz. Ils devraient le faire aux États-Unis, parce que c'est là où la décision est prise. Malheureusement, nous avons un gouvernement très pro-américain, qui ne va pas s'opposer au gouvernement américain.»

En attendant que la situation se dénoue, Air Canada examine d'autres possibilités de liaisons entre Montréal et l'autre côté de l'Atlantique. Le transporteur a inauguré cette semaine une liaison avec Bruxelles, après la création de liaisons avec Genève, Barcelone et Athènes au cours de la dernière année.

Air Canada cherche à attirer la clientèle locale, mais aussi une clientèle américaine mal desservie qui veut se rendre en Europe. Déjà, l'expérience avec Genève a dépassé toutes les attentes à ce chapitre.

«Nous pensions avoir environ 50% de personnes en transit, a-t-il déclaré. Certains jours, cette proportion atteint 75%.»