En cette période économique difficile, plusieurs entreprises et organisations ne veulent plus que leurs gestionnaires voyagent en classe affaires. Cela n'attriste pas le grand patron de Porter Airlines, Robert Deluce. Bien au contraire.

«Ces passagers sont habitués à un degré élevé de service, indique M. Deluce lors d'une entrevue avec La Presse Affaires. Ils se tournent vers Porter, réalisant qu'avec un tarif économique, ils peuvent obtenir gratuitement quelque chose qui ressemble de près au service de la classe affaires, comme une navette, l'usage d'un salon, l'internet sans fil, une boisson servie à bord dans un véritable verre, une bonne collation. La plupart des transporteurs vous demandent d'aller fouiller dans votre portefeuille et de sortir de précieux billets pour avoir accès à ces agréments additionnels, qui sont tous gratuits chez Porter.»

Le service constitue l'un des trois pierre d'assise du transporteur, avec la commodité et la rapidité.

«Nous mettons l'accent sur le fait de ramener une certaine dignité aux déplacements par avion, déclare M. Deluce. Nous voulons en faire ce que c'était dans le passé, alors que c'était plaisant de voler.»

La stratégie semble donner de bons résultats. Alors que la plupart des transporteurs nord-américains sabrent dans leur capacité, Porter Airlines ne cesse d'ajouter des vols. Au cours des derniers mois, Porter a fait passer de neuf à 14 le nombre de vols quotidiens entre Montréal et Toronto. Ce nombre devrait passer à 18 au cours des prochains, soit le double de ce qu'il était il n'y a pas si longtemps.

«Nous ajoutons de la capacité surtout en matinée et en fin d'après-midi, alors que plusieurs de nos vols sont pleins, indique le président de Porter, en visite à Montréal justement pour souligner l'augmentation du service entre Montréal et Toronto. Nous voulons être certains que nous clients puissent continuer à avoir accès au service auquel ils sont habitués.»

Porter exploite présentement 12 appareils Q400. D'ici un an, le transporteur aura reçu les 20 appareils commandés à Bombardier.

«Avant d'avoir reçu le dernier appareil, nous aurons probablement à passer une commande additionnelle auprès de Bombardier, déclare M. Deluce. Elle devrait être de la même taille que la commande initiale, sinon plus importante encore. Cela va dépendre des négociations.»

Le transporteur est rentable depuis juin 2007.

«Nous avons un programme de partage des profits avec les employés, indique M. Deluce. Nous avons pu faire des paiements en 2008 et au premier trimestre de 2009. Nous avons la chance de connaître la croissance.»

Il note que l'appareil choisi par Porter explique une grande partie de son succès. «Le Q400 nécessite de 30 à 40% moins de carburant que certains biréacteurs régionaux et les biréacteurs de petite taille comparable», explique-t-il.

Il affirme que les coûts de Porter sont moins élevés que ceux de WestJet, qui elle même se targue d'avoir des coûts 40% moins élevés que ceux d'Air Canada.

Air Canada et la filiale régionale Jazz n'avaient pas apprécié l'apparition de Porter Airlines en 2006, et surtout son implantation dans l'aéroport de l'île de Toronto, à un jet de pierre du centre-ville. Le prédécesseur de Jazz exploitait 30 vols par jours à partir de cet aéroport en 2000, mais Jazz a progressivement réduit ces vols. Au début de 2006, elle n'en exploitait plus que sept. Jazz a essayé de reprendre pied en déposant une demande d'injonction à l'encontre de Porter à la Cour supérieure de justice de Toronto. Porter a répliqué en accusant Air Canada et Jazz de collusion et en réclamant 850 millions de dollars en dommages et intérêts.

Les deux causes n'en finissent pas de languir en cour.

«Jusqu'ici, il y a eu une douzaine de décisions qui ont toutes été en faveur de Porter, lance M. Deluce. Nous avons eu le plaisir de recevoir plusieurs chèques d'Air Canada pour couvrir nos frais.»

Il ajoute qu'Air Canada a présentement d'autres chats à fouetter, avec une restructuration potentielle, pour remettre l'accent sur cette lutte judiciaire.