La performance trimestrielle supérieure aux attentes du marché dévoilée hier par la Banque Nationale n'a pas détourné l'attention des investisseurs et des analystes qui continuent à s'interroger sur l'exposition de l'institution financière montréalaise au secteur pétrolier.

Coïncidence ou pas, l'action de la Banque Nationale réagissait plutôt bien en matinée en Bourse jusqu'à ce que des analystes multiplient les questions entourant la gestion du portefeuille de prêts au secteur pétrolier de la banque, durant la téléconférence qui s'est déroulée sur l'heure du midi.

Après avoir affiché une hausse supérieure à 1 % durant la première moitié de la séance, le titre de la Banque Nationale a clôturé en baisse de 2,3 % hier à Toronto.

L'analyste Mario Mendoca, de la TD, a contribué à changer le ton de la téléconférence en affirmant que des investisseurs émettaient l'hypothèse que les banques canadiennes auraient une propension à se montrer beaucoup plus accommodantes envers leurs clients (dans le secteur pétrolier) en ce qui concerne les conditions des prêts accordés et que des clients bénéficieraient de certains allègements.

Plus précisément, l'analyste a demandé s'il existait des cas où la banque modifiait les conditions des prêts parce qu'elle ne veut pas qualifier un prêt de « douteux » et ainsi limiter les provisions à déclarer dans l'espoir que la situation s'améliore.

Le PDG de la Banque Nationale, Louis Vachon, s'est d'abord montré étonné par la question posée en ajoutant que les hypothèses à cet effet proviennent probablement de vendeurs à découvert plutôt que d'investisseurs. Il s'est ensuite montré catégorique en disant que lorsqu'un prêt est douteux, il est douteux et une provision est prise par la banque comme les règles le prévoient.

Mario Mendoca est revenu à la charge en demandant s'il se pourrait que la banque puisse changer la définition de prêt douteux en modifiant les conditions des prêts.

« Ce qui serait malheureux, ce serait de voir de grosses pertes sur prêts surgir dans quelques trimestres. Cela causerait beaucoup de dommages à la crédibilité des banques canadiennes. C'est pourquoi je pose ces questions. » 

- L'analyste Mario Mendoca

« Il y a un haut niveau de scepticisme entourant les pratiques des banques canadiennes et je tente d'aller au fond des choses », a ajouté M. Mendoca, en soulignant qu'il ne s'agissait pas d'accusations.

UNE QUESTION QUI LAISSE UN GOÛT AMER

L'analyste Darko Mihelic, chez RBC, est venu appuyer son collègue de la TD en disant que des investisseurs lui posaient aussi souvent ce type de questions. M. Mihelic a ensuite évoqué le cas précis de l'entreprise albertaine Cathedral Energy Services, un client de la Banque Nationale, qui a publié un communiqué le 27 janvier pour indiquer avoir renégocié des modifications à sa facilité de crédit afin d'avoir des conditions moins restrictives. Darko Mihelic a ainsi voulu savoir si des modifications pouvaient survenir avant une violation de conditions et non après, ce que les dirigeants de la Banque Nationale ont confirmé.

La discussion a semblé avoir laissé un goût amer aux investisseurs et l'action de la banque a poursuivi sa descente jusqu'à la fermeture des marchés.

Au début de la conférence téléphonique, Louis Vachon avait pris soin d'indiquer que l'exposition du portefeuille de prêts de la banque au secteur de l'énergie était somme toute faible (environ 3 % de l'ensemble des prêts de l'institution) et que la situation demeurait « gérable ».

M. Vachon avait même dit voir certains signaux positifs dans le secteur pétrolier. « Dans les dernières semaines, il y a eu des émissions d'actions, des ventes d'actifs et des capitaux opportunistes ont fait leur apparition », a-t-il mentionné avant d'ajouter qu'il était cependant encore trop tôt pour dire que ça confirmait le début tant attendu d'un mouvement de consolidation dans l'industrie.

LES RÉSULTATS DU TRIMESTRE EN BREF

T1 2016 T1 2015

BÉNÉFICE PAR ACTION AJUSTÉ

1,17 $ 1,14 $

PROFITS 427 millions 410 millions

PERTES SUR CRÉANCES 63 millions 54 millions