Actif doublé à plus de 85 milliards en quelques années à peine. Effectif montréalais approchant les 500 employés. Plus de 4 milliards par an en nouveaux capitaux à investir.

Le tableau de bord de la société montréalaise Investissements PSP a de quoi susciter l'envie parmi les gestionnaires d'actif des plus grandes caisses de retraite au Canada.

Mais au dire de son président et chef de la direction, Gordon Fyfe, les défis de gestion chez PSP s'apparentent encore à ceux d'une entreprise en pleine émergence: produire de bons résultats courants et futurs tout en gérant une croissance rapide de l'actif et des effectifs.

«Pendant que nous développons nos équipes de placement et leur portefeuille, nous devons aussi gérer beaucoup de liquidités qui entrent et qui sortent chaque année dans notre actif», résume Gordon Fyfe en entrevue avec La Presse Affaires.

«Néanmoins, cet afflux de liquidités est aussi l'un de nos principaux avantages comparatifs parmi les gestionnaires d'actif de grosses caisses de retraite. Nous avons plus de flexibilité pour effectuer nos transactions aux moments les plus avantageux selon nos objectifs de rendement.»

D'où provient cet avantage? Pour l'expliquer, il faut rappeler qu'Investissements PSP a été créée il y a 13 ans par le gouvernement fédéral en tant que société d'État autonome avec le mandat de mieux gérer l'actif des caisses de retraite de plusieurs dizaines de milliers d'employés fédéraux.

Il s'agit d'abord de la caisse principale des fonctionnaires, mais aussi celles de la Défense nationale, de la Gendarmerie royale du Canada et, depuis peu, des membres de la Réserve militaire.

À l'époque, en 2000, l'actif combiné de ces caisses de retraite se chiffrait à une dizaine de milliards de dollars. Treize ans plus tard, il vient de passer le seuil des 85 milliards. Et il est déjà prévu autour des 300 milliards dans une quinzaine d'années, selon les hypothèses actuarielles des caisses de retraite fédérales.

En ce moment, la croissance de l'actif géré par PSP est en partie attribuable aux revenus de placement accrus par une gestion active.

Ces revenus ont atteint 7,1 milliards lors de l'exercice terminé le 31 mars, ce qui a porté à 23 milliards le total des revenus engrangés au cours des quatre dernières années, depuis le revers de 9,5 milliards subi l'année de la crise financière.

Mais aussi, admet d'emblée Gordon Fyfe, la croissance d'actif chez PSP provient encore beaucoup de l'influx annuel de 4 à 5 milliards de dollars en nouveaux capitaux à investir.

PSP se retrouve ainsi dans une situation singulière parmi les gestionnaires d'actif des plus grandes caisses de retraite du secteur public au Canada.

Selon M. Fyfe, cette situation découle de la «jeunesse démographique» des caisses de retraite fédérales dont PSP gère les placements, comparativement à ses semblables comme la Caisse de dépôt et placement du Québec et les caisses Teachers' et OMERS en Ontario.

«Ces caisses de retraite sont plus matures démographiquement, et certaines déjà en phase de sortie de liquidités [NDLR: nombre croissant de retraités-prestataires par rapport aux salariés-déposants]. Chez PSP, les caisses dont nous gérons les actifs ne seront pas dans cette situation avant 15 à 20 ans.»

D'où l'avantage comparatif auquel prétend PSP parmi ses pairs en pouvant compter sur un apport considérable de capitaux neufs à investir pour plusieurs années.

Aussi, PSP peut orienter sa recherche d'actifs selon deux critères principaux.

D'une part, des actifs à potentiel supérieur de croissance mais à long terme, notamment dans les économies émergentes par rapport aux économies développées. C'est ce qui explique en partie la part de 16% de l'actif total de PSP qui est identifiée aux régions d'économies émergentes comme l'Asie et l'Amérique latine.

Flexibilité

D'autre part, explique Gordon Fyfe, PSP a la flexibilité de liquidités pour investir rapidement dans des actifs de qualité mais qui se retrouvent en «détresse» temporaire en raison d'une conjoncture négative ou de problèmes financiers chez leurs propriétaires.

Un exemple de cette flexibilité? Au lendemain de la crise financière de 2008, et même si le rendement de son actif en avait été très affecté comme chez ses pairs, PSP avait encore des milliards de dollars en capitaux neufs à investir dans des actifs soudainement dépréciés.

C'est ainsi que PSP a pu profiter de la crise immobilière dans plusieurs villes américaines, dont New York, pour garnir son portefeuille de bons immeubles commerciaux à prix avantageux.

Quelques années plus tard, le portefeuille immobilier de PSP approche les 10 milliards, à hauteur de 12% de l'actif total sous gestion. Et le rendement courant de ce portefeuille immobilier (11% durant l'exercice terminé le 31 mars) cote au double de celui de l'indice de référence sectoriel.

«Nous réalisons de solides rendements de nos divers portefeuilles depuis quelques années et nous entendons bien continuer ainsi», affirme Gordon Fyfe.

Quant à sa lecture courante des marchés du placement, il préfère s'en tenir à sa philosophie de direction des équipes de portefeuille chez PSP.

«Ce qu'il y a d'intéressant dans notre domaine, c'est qu'il y a toujours quelque part de bons actifs qui se retrouvent dans le trouble. Et chez PSP, nous avons les moyens de transiger rapidement dans ce type d'actifs, mais toujours quand ça nous plaît vraiment et selon nos objectifs de rendement.»

Investissements PSP en un coup d'oeil

> Activités: gestion des placements de l'actif de quatre caisses de retraite d'employés fédéraux: fonction publique, Défense nationale, GRC, Force de réserve

> Actif net (au 1er déc. 2013): 86 milliards

> Rendement annualisé depuis quatre ans: 12,2% (au 31 mars)

> Siège administratif: Montréal

> Effectif: 470 employés

> Frais d'exploitation: 0,24% de l'actif net (au 31 mars)

> Rémunération des cinq principaux dirigeants: 16,1 millions (+57% en 2013)

> Année de fondation: 2000 (société d'État fédérale)

Source: Investissements PSP

Les grands gestionnaires de fonds de retraite

> Office d'investissement du Régime de pension du Canada: 192 milliards (au 30 sept. 2013)

> Caisse de dépôt et placement du Québec: 186 milliards (au 30 juin 2013)

> Teachers (Régime de retraite des enseignants de l'Ontario): 129 milliards (au 31 déc. 2012)

> Investissements PSP: 86 milliards (au 1er déc. 2013)

> Alberta Investment Management Corp.: 68 milliards (au 31 déc. 2012)

> Omers (Régime de retraite des employés municipaux de l'Ontario): 61 milliards (au 31 déc. 2012)

> BC Pension: 31 milliards (au 31 mars 2013)

> OPB (Commission des régimes de retraite de l'Ontario): 19 milliards (au 31 déc. 2012)

Sources: rapports annuels, Bloomberg, archives média Eureka